

Metal’o Phil et Matias Kupiainen (Stratovarius)
Matias Kupiainen est d’un naturel timide. C’est avec les mains moites et le regard fuyant qu’il répondra, non sans honnêteté à mes questions, le soir de la venue du groupe à Lyon. Faut dire que compte tenu de la position qu’il occupe, on comprend aisément son anxiété. L’homme remplace en effet Timo Tolkki, le guitariste emblématique fondateur de Stratovarius. Difficile de passer après quelqu’un sans qui, pour certains, il est impensable que le groupe continue d’exister sous ce nom. Retour sur cette nouvelle recrue et sur le soap opera de Stratovarius.
Nous sommes fin 2003, les Finlandais viennent de sortir le très moyen Elements Pt.2. A ce moment-là, les rapports au sein du groupe sont des plus tendus. On apprend même que Timo Tolkki et Timo Kotipelto (chant) en seraient venus aux mains dans un bar. Ce dernier et Jorg Michael (batterie) quittent alors le groupe, suite à de nombreuses altercations avec le leader de la formation. Dans le même temps, ce dernier est hospitalisé pour problèmes de santé mentale. Puis Jens Johannsson (claviers) annonce que Kotipelto sera remplacé par une femme surnommée Miss K. Un recrutement qui s’avère n’être qu’un leurre pour entretenir le buzz.
Puis le groupe se réconcilie et sort en 2005 un disque éponyme controversé, ébauche d’une évolution remettant en cause les standards auxquels les fans s’étaient habitués. Les tempos sont plus lents, les influences nouvelles, à l’instar de ce « Maniac Dance » qui ouvre le disque, plus proche de « Enter Sandman » que de « Black Diamond ».
Nouveau split en 2008. Le groupe avait avant cela révélé les initiales du nouveau disque : « R…. R…. ». A la suite de cette séparation, on comprend très vite que certaines des compos de Revolution Renaissance, le nouveau groupe de Tolkki, avaient à l’origine été composées pour cet album de Stratovarius qui ne verra donc jamais le jour. Une des compos du premier opus de Revolution Renaissance, « Last Night On Earth » avait d’ailleurs été jouée par Strato à l’édition 2007 du Wacken. Une version démo avec Kotipelto au chant avait également circulé sur la toile.
Comme c’est Timo Tolkki qui a décidé de mettre fin à l’aventure, on se dit que Strato, c’est fini pour de bon. Et c’est le coup de théâtre. Stratovarius renaît pour la énième fois. Après tout, on n’est plus à une reformation près, alors pourquoi pas ? Sauf que cette fois-ci, Tolkki n’est plus de la partie. Hérésie ? Question épineuse, car le nouveau disque Polaris sonne plus comme du Strato que son prédécesseur, pourtant composé par Timo !
Stratovarius est-il attaché à un son particulier ou bien à l’esprit d’un seul homme ? Entre l’aventureux Stratovarius (2005) composé par Tolkki et le plus traditionnel Polaris (2009), composé sans Tolkki, lequel est le plus « Strato » ? En tout cas, malgré la controverse qu’il a suscitée, votre serviteur trouve à l’album éponyme un certain charme. Quant à Polaris, malgré une impression de pilote automatique, il a le mérite de nuancer le côté happy des précédentes réalisations.
Quoiqu’il en soit, nous avons voulu en savoir plus sur ce Matias Kupianen, un garçon très gentil au demeurant et, comme nous le disions en introduction, quelque peu timide. S’il ne fait pas oublier le feeling de Tolkki, Matias a tout de même de la bouteille et fait correctement son taff. L’homme joue de la guitare depuis l’âge de 4 ans et est également producteur de musique. Il surprend par ses influences progressives, fusion, mais aussi death/grind ! En effet, il est aussi membre de Fist In Fetus, un duo pratiquant un style que l’on pourrait qualifier de death/grind néoclassique. En effet, les soli de guitare font justement penser à Tolkki ou Malmsteen. Un mélange original.
Son recrutement s’est apparemment fait naturellement : « Tout est allé très vite. Ils avaient fait appel à moi pour les aider à produire le disque et pour enregistrer les guitares. Finalement, je n’ai pas eu le temps d’avoir la pression, puisqu’il n’y a pas eu de temps mort. »
La question du nom s’est évidemment posée, compte-tenu du départ du géniteur et du compositeur principal de Stratovarius. Matias raconte à ce propos : « On avait trouvé plusieurs idées de noms de groupe, mais elles étaient toute très mauvaises (rires) ! ». Pour la petite histoire, les Finlandais avaient notamment pensé à se renommer Polaris. Ainsi, Stratovarius aurait été le premier groupe de l’histoire à sortir… deux albums éponymes de suite ! Au final, devant l’absence d’idées « coup de coeur », le groupe décida de garder le nom d’origine. Une solution qui, de toute façon, ne posait aucun problème juridique, Tolkki ayant cédé les droits à Kotipelto, Jens Johansson et Jörg Michael. Une cession pour lequel le groupe remercie d’ailleurs sincèrement Timo, comme en témoigne ce message qui lui est adressé officiellement via le site officiel.
Un album que, visiblement, le groupe assume plus que Stratovarius (2005) ou Elements Part.2 (2003), qui ont complètement disparu des setlist. Même à l’époque de leur sortie, ces albums étaient déjà très peu représentés (3 ou 4 titres maximum). Cela ne sera pas le cas ici. A l’heure actuelle, le groupe joue 4 titres et compte en jouer bien plus à court et moyen terme. Le fait est que Matias a préféré, dans un premier temps, se concentrer sur les classiques afin de bien les assimiler. Quant à l’avenir à long terme, Matias nous répond avec humour : « Ouais, on a encore deux ou trois splits de prévus sur notre programme histoire de faire le buzz (rires)! Non, cette fois je pense que le soap opera est bel et bien terminé ».
C’est tout le mal qu’on leur souhaite. Car quoi qu’on en dise, la cohésion scénique de ce nouveau line-up ainsi que le plaisir qu’ils ont à jouer ensemble, sans faire oublier l’apogée du milieu des années 90, inspirent bien plus d’enthousiasme que les derniers concerts donnés avec Timo Tolkki.