« Plus que jamais cet album fait preuve d’une certaine démence » disions-nous au sujet du nouvel – et dernier – album de Ministry From Beer To Eternity. Mais il faut dire que l’homme derrière cette entité incontournable du metal industriel est lui-même un frappadingue. Il faut lire l’entretien qui suit pour se rendre compte que Jourgensen a un monde bien à lui dans sa tête. Sans doute que ses excès – l’homme est « mort » trois fois, comme il aime le rappeler – y sont pour quelque chose, même s’il y a évidemment beaucoup d’humour dans ses propos. En tout cas, tout ceci, ainsi que son vécu, en font un personnage absolument passionnant avec lequel on pourrait discuter des heures durant.
Jourgensen nous parle donc de son nouvel album, sa conception intimement liée au décès de son ami et guitariste Mike Scaccia, sa volonté de mettre sa carrière musicale entre parenthèses et se consacrer à d’autres formes d’art, voire à l’enseignement, sans toutefois fermer les portes quant à la possibilité de revenir sur scène en tant que Ministry dans un futur plus lointain.
« Dans l’univers, [la Terre] est littéralement vue comme un putain de ghetto, d’accord ? [Rires] Je le sais ; je le sais depuis l’une de mes morts où on me l’a dit. »
Al Jourgensen : C’est “Bonjour” pour moi, “bonsoir” pour toi!
Radio Metal : « Bonsoir », comment vas-tu ?
Je vais bien ! En fait, je vais très, très bien. J’ai fini tous mes projets ; en dehors de mes projets d’écriture, j’ai fini tous mes projets musicaux. Je prends une année de congés en ce qui concerne la musique pour me concentrer sur mes livres qui vont bientôt sortir, et ce ne sont pas des autobiographies. Je sais que j’ai sorti une autobiographie récemment, mais je ne considère pas ça comme un livre, pour moi c’est juste un type bourré qui raconte ses histoires pendant que quelqu’un d’autre les écrit. [Rires] Donc, une autobiographie ce n’est pas un livre. J’ai un roman à propos d’un tueur en série qui devrait sortir l’année prochaine, et j’ai aussi une bande dessinée dans laquelle je deviens un super héros appelé The Captain Of Industry. J’ai mes potes, comme Lemmy Kilmister, Ozzy Osbourne ou Trent Reznor, pour m’aider à combattre le mal et j’ai des super-pouvoirs. Donc je me concentre sur cette BD et j’ai aussi un ami, qui a fait tous mes clips – depuis les six ou sept dernières vidéos – qui a aussi une bande dessinée, ou un dessin animé, qui s’appelle Mi Burro et parle d’un âne et un sex-club au Mexique. [Rires] J’y fais quelques voix-off et j’y joue aussi un des personnages. Donc je prends une année de congé en ce qui concerne la musique. J’en avais besoin, après la mort de Mikey… C’en était trop, tu vois. J’avais juste besoin de prendre une pause d’un an pour écrire et me remettre les idées en place. Ça me fait vraiment du bien.
OK, et dans cette bande dessinée, quels sont tes super-pouvoirs ?
Eh bien j’ai cette Flying V… Au lieu d’une cape j’ai un harnais d’où je peux sortir ma mini flying V et balancer un accord pour détruire des immeubles, des gens, tout ce que je veux détruire. J’ai aussi des super-pouvoirs qui me permettent d’entendre des conversations à l’autre bout du monde. Un peu comme la NSA des États-Unis, j’espionne les gens et je tends l’oreille pour repérer le mal. Et bien sûr je peux voler. Je vole directement sur place et je règle le problème. J’ai aussi des pouvoirs électriques qui viennent de mes doigts. Donc j’ai une ouïe développée, de l’électricité, je vole et j’ai aussi cette flying V qui est comme un bang supersonique qui détruit tout. Alors je pense que ça va être pas mal ! [Rires]
[La ligne coupe et Al Jourgensen rappelle]
Tu sais quoi ? C’est la NSA qui conspire contre cette interview ; ils veulent entendre ce qu’on se raconte ! [Rires] Bref, tu sais, avec cet éditeur de bandes dessinées nous allons planifier la première année de ce projet, et nous avons déjà eu les autorisations de, comme je le disais, d’autres artistes qui vont m’aider dans le club de The Captain Of Industry. Nous serons un peu comme, tu vois, Batman ou Superman qui travailleraient ensemble, Wonder Woman, ce genre de conneries. Moi, et Lemmy, et Ozzy… nous allons tous combattre le mal ensemble.
J’aurais quelques questions sur le nouvel album. Tu as été cité disant que les sessions d’enregistrement de cet album étaient les plus créatives jamais connues par Ministry. Comment expliques-tu cela, qu’est-ce qui a généré autant de créativité ?
Eh bien, la mort de Mikey a évidemment joué un grand rôle là-dedans parce que quand il a bouclé ses dernières parties de guitare, il est sorti d’ici avec un sourire qui allait d’une oreille à l’autre et m’a dit : « Mec, c’est le meilleur album qu’on a jamais fait. » Et puis même pas deux jours après, je me retrouve à Dallas pour faire un discours à ses funérailles, OK ? Et puis après j’ai dû revenir ici et mixer la mort de mon meilleur ami pendant les trois ou quatre mois suivants. Alors je voulais faire en sorte que ce soit bien et que Mikey soit heureux, parce que si Mikey est heureux, peut-être qu’il peut se rendre dans un monde meilleur au lieu de hanter ma putain de baraque, d’en arracher les photos des murs et d’être destructeur. Donc j’ai essayé de faire le meilleur album que je pouvais parce que je ne voulais pas qu’il me hante.
« Il y a Jimi Hendrix, et après il y a Mike Scaccia, et tous les autres peuvent aller se faire foutre, OK ? »
Tu as aussi dit que rien ne va aussi bien sans qu’au bout du compte le sol ne se dérobe sous nos pieds. Penses-tu qu’il n’y a pas de hasard ou que la vie pèse toujours les choses d’une façon ou d’une autre pour obtenir une sorte de balance ?
Bon mec, regarde : je suis mort trois fois, OK ? Je ne sais pas si tu as déjà lu le livre mais je suis mort trois fois. Je sais qu’il y a de meilleurs endroits où se trouver que ce trou à rat qu’on appelle la planète Terre. Alors j’essaie de faire de mon mieux dans ce trou à rat pour le temps que je m’y trouve. Avant, je n’avais pas envie d’être là, je voulais m’évader ailleurs, mais ces derniers temps, je crois que je suis prêt à rester là pour aussi longtemps que je le peux et juste m’éclater. Je n’ai plus besoin de l’argent, je n’ai pas besoin de la célébrité, je n’ai pas besoin des groupies, je n’ai pas besoin des tournées… Je n’ai même plus le besoin de faire des albums ! Je m’amuse et j’aime être là maintenant, même si c’est toujours un trou à rats ! Je veux dire, dans l’univers, cet endroit est littéralement vu comme un putain de ghetto, d’accord ? [Rires] Je le sais ; je le sais depuis l’une de mes morts où on me l’a dit. Tu sais, quand tu meurs – du moins lors d’une de mes morts – tu te retrouves dans cet endroit blanc, tout le monde appelle ça la « lumière blanche », et tu apprends toutes les informations de toutes les autres cultures de toutes les autres planètes, et toutes les autres galaxies, les univers, tout ce que tu veux. Tu apprends absolument tout. Et après, quand tu reviens, tu es extrêmement déçu parce que tu penses : « OK, je suis de retour dans cette merde… sérieux ? Je préfèrerais être là-bas.” Mais je profite au maximum de mon temps sur cette planète en ce moment. Ça me fait vraiment du bien. Tu m’as attrapé à un moment où je suis de vraiment bonne humeur. Je suis en train de boire un très bon Bordeaux de 2005 alors que je te parle, alors j’adore la France et [rires] je suis vraiment dans un bon état d’esprit. Et en bonne santé aussi, pour une fois, ce qui est la raison pour laquelle j’ai voulu arrêter le groupe après The Last Sucker. Je veux dire, j’étais vraiment, vraiment en mauvaise santé et je me suis dit « ça vaut pas le coup. » Je suis mort une fois de plus – ma troisième fois – d’un ulcère hémorragique, et une fois sorti de l’hôpital, le premier coup de fil que j’ai reçu était de Mikey qui me disait : « Mec, il faut absolument que nous fassions cet album de country dont on parle depuis trente ans », et j’ai répondu : « Ouais, eh bien nous ferions mieux de le faire maintenant parce que je ne sais pas combien de temps je serais encore là ». J’étais vraiment en mauvaise santé. Alors il est venu et nous avons fait un album de country. Et pendant que nous faisions cet album de country, qui s’appelle « Buck Satan And The 666 Shooters » au passage, nous nous sommes mis à jammer sur des riffs – des riffs metal – entre deux chansons, pour nous divertir ou pour le fun, ou tout simplement pour nous occuper. Après ça j’ai commencé à revoir ces textos et e-mails de tarés de la part de Mikey qui me disait : « Mec, ces riffs sont trop bons, il faut absolument que nous fassions cet album », parce que je ne voulais pas faire cet album. Alors Mikey m’a convaincu et a dit : « Il faut que tu mettes des paroles sur ça et que tu fasses ce que tu as à faire. Ces riffs que nous avons composés sont vraiment cool. » Alors je me suis lancé et j’ai fait l’album et il est venu ici, et puis deux jours plus tard il était mort. Donc c’est un album qui a vraiment une saveur à la fois douce et amère pour moi. J’ai perdu mon meilleur ami et je crois que cet album est devenu ce qu’il était supposé devenir, et je sais que Mikey l’aime, peu importe l’endroit où il se trouve à présent. Alors je suis plutôt content que le dernier album de Ministry soit quelque chose dont je puisse être fier contrairement à… Tu sais, tu as tous ces groupes comme Aerosmith ou The Rolling Stones… Qui en a vraiment quelque chose à faire si les Rolling Stones sortent un nouvel album, ou Aerosmith, hein ? Ils sont un peu arrivés au bout. Ce sont de très bons groupes rétrospectivement, mais aujourd’hui, je pense qu’ils ont épuisé toutes leurs idées. Alors la mort de Mikey a vraiment été un grand signe pour que je réalise que « OK, j’ai utilisé toutes mes idées sur cet album, c’est fini pour moi, il est temps de passer à autre chose. » Et c’est pour ça que je me dirige vers l’écriture de livres et que je m’éloigne de la musique pour quelques temps. Comme je le disais, il ne va pas y avoir de tournée pour cet album. Nous ne ferons pas de tournée, je ne vais pas embaucher quelqu’un pour remplacer Mikey et partir en tournée dans le seul but de gagner de l’argent. Je n’ai pas besoin de ce putain d’argent. Je pense qu’on devrait simplement le laisser reposer en paix et j’espère que tout le monde appréciera cet album. Je pense que c’est un très bon album. Je le pense vraiment, et il a été très difficile à réaliser compte tenu des circonstances mais je pense qu’il contient tout ce que Ministry a pu faire au cours de ces trente dernières années en un seul album. C’est un peu comme si au lieu des « Plus Grands Hits » tu avais les « Plus Grands Riffs. » Nous n’avons pas frayé de nouveaux chemins pour Ministry. Par exemple, si quelqu’un achetait un coffret de Ministry et te l’offrait en cadeau pour Noël, et mettait cette boite sous le sapin de Noël, eh bien cet album serait le paquet cadeau et le ruban qui le décore en prime ! Ça le rend officiel. C’est un cadeau, OK ?
« Cet album est bizarre. J’ai un type de 83 ans avec un respirateur artificiel et une bouteille d’oxygène qui chante [et] j’ai Mikey qui est mort en plein milieu de l’album. »
Comme tu l’as dit, tu es mort trois fois et tu es revenu. On a vraiment l’impression que la mort ne veut pas de toi ! [Rires] Comme s’ils se disaient en enfer : « Oh, Al Jourgensen ? Non, pas moyen, on ne peut pas l’avoir ici ; renvoyons-le sur terre ! »
[Rires] Eh bien, tu sais ce qui est marrant ? Il y a un vieux proverbe qui dit que les chats ont neuf vies, hein ?
Ouais.
OK, eh bien, je suis officiellement devenu le tiers d’un chat ! [Rires]
[Rires] C’est génial ! Sur cet album, il y a des trucs encore plus dingues, il y a même des moments quasiment hystériques, comme dans la chanson « Side F/X Include Mikey’s Middle Finger (TV4) » [NDLT : « Side F/X avec le doigt d’honneur de Mikey »]. D’où sont venus ces moments de folie ?
Eh bien, le truc du « doigt d’honneur de Mikey » était vraiment marrant parce que ça a demandé beaucoup de travail au niveau de la production parce qu’il est un guitariste si rapide et si doué : littéralement, il est mon deuxième guitariste préféré au monde. Il y a Jimi Hendrix, et après il y a Mike Scaccia, et tous les autres peuvent aller se faire foutre, OK ? En gros. Mais on a poussé Mikey à jouer la guitare solo uniquement avec son doigt d’honneur, donc on a dû pas mal éditer parce qu’on ne pouvait pas le laisser utiliser le reste de sa main, donc il n’arrêtait pas de nous faire des doigts durant tout le temps où il jouait ses dernières parties de guitare, c’était génial !
Il s’agit probablement de l’album le plus varié de Ministry. Penses-tu que, d’une certaine façon, c’est aussi celui qui représente le mieux le groupe et ses différentes orientations musicales, et que grâce à cela il est devenu la fin parfaite d’une carrière ?
Il faut que ce soit la fin d’une carrière. Je ne peux pas surpasser ça, c’est un très bon album et comme je l’ai dit, il a été réalisé dans des conditions vraiment bizarres. Tu sais, cet album n’aurait jamais dû voir le jour avant que Mikey ne me convainque de le faire et ensuite Mikey est mort juste après ça. Mais il était tellement content de cet album que je me suis senti la responsabilité de faire en sorte qu’il sonne le mieux possible, et le rendu final est vraiment bon. Je sais que tu es censé dire que chaque nouvel album est ton meilleur album, c’est ce que tous les artistes disent, mais je ne sais pas s’il s’agit de mon meilleur album. C’était l’album le plus difficile et le plus éprouvant que j’ai eu à faire, mais je pense que le rendu est vraiment pas mal, et je pense que quand les gens vont l’entendre, ils entendront trente ans de Ministry et beaucoup de Mike Scaccia sur cet album. Je veux dire, c’est très « post mortem » d’une certaine façon. C’est un peu du style [rires] : « C’est bon, j’ai fini. Voilà ce qu’on a sorti, maintenant il est temps de faire quelque chose d’autre. » J’espère que tout le monde va l’apprécier. Comme j’aime bien le dire, si tu n’aimes pas cet album tu ne peux t’en prendre qu’à Mikey parce qu’il m’a forcé à le faire, et si tu aimes cet album tu peux me donner tout le mérite.
[Rires] La chanson « Change Of Luck » est la dernière vraie chanson de l’album et son refrain est très remonté mais par la suite un passage très positif et entraînant est ajouté. Cela symbolise-t-il tes propres sentiments, la colère d’avoir perdu ton meilleur ami mais en même temps la nostalgie et le fait d’être reconnaissant pour les superbes moments que tu as passé avec lui ?
Ce sont là des bonnes théories mais, en fait, j’ai écrit cette chanson à propose de la manière dont Mikey est parti d’ici absolument heureux, et comment deux jours après il était mort. « Change Of Luck » [NDLT : La Chance Tourne], ça arrive à chacun d’entre nous, alors nous devons vivre nos vies chaque jour et l’apprécier parce que tu ne peux jamais savoir ce qu’il va se passer l’instant d’après. En gros, c’est de ça que parle « Change Of Luck. » C’est une chanson personnelle, ce n’est pas une chanson politique ou quoi que ce soit, c’est simplement à propos de Mikey et de moi-même. Tu sais, tout peut arriver, « Change Of Luck » mec.
Quelle est l’idée derrière le dernier morceau « Enjoy The Quiet, » quels sont ces sons qu’on peut entendre ?
Eh bien, celui-là en fait c’est… J’ai un autre ami, du nom de Sgt. Major, qui a chanté dans Rio Grande Blood sur une chanson appelée « Gangreen, » et on l’a repris pour cet album. Il n’est vraiment pas en bonne santé. Il vient de se faire retirer un poumon. Il a fait toutes ses parties vocales sur « Thanx But No Thanx » avec un respirateur artificiel et un masque à oxygène. Il a 83 ans. C’est le gars qui… tu connais le film Full Metal Jacket ?
Ouais.
Eh bien le sergent instructeur de ce film a été entraîné par le type qui chante sur mon album, donc c’était un bleu. Ce que je veux dire c’est qu’il a tout appris de ce type. Je suis allé à la source d’origine ; je n’ai pas pris le type en carton qu’on voit dans les films, les séries télévisées et tout ça. J’ai trouvé le vrai type ici à El Paso au Texas et il a tellement changé. Tu sais, être un sergent instructeur dans la marine ça veut dire qu’en gros, t’es un trou du cul, et lui, à la fin de sa vie, il a viré complètement à gauche, il déteste les fous furieux de droite, les extrémistes, les nazis et les skinheads et… il les déteste et pourtant il était l’un d’entre eux par le passé. Donc ça a vraiment été une belle progression pour lui, parce qu’il n’a plus beaucoup de temps à vivre non plus. Je veux dire, il vient de se faire retirer un poumon, et ils pensent à… ils ne savent pas quoi faire de son autre poumon. Comme je le disais, cet album est bizarre. J’ai un type de 83 ans avec un respirateur artificiel et une bouteille d’oxygène qui chante, j’ai Mikey qui est mort en plein milieu de l’album, je veux dire [rires] tout cet album est très spécial pour moi. Éprouvant, mais très spécial.
« Je suis officiellement devenu le tiers d’un chat ! »
Tu as déjà expliqué pourquoi il n’y aurait pas de tournée pour soutenir l’album, mais que dirais-tu aux fans qui seraient déçus ou même en colère à l’idée de ne pas pouvoir voir Ministry en concert une dernière fois pour dire au revoir au groupe ?
Eh bien, je pense qu’ils devraient vraiment prendre un Valium ou deux et se détendre pendant un an pour me laisser réfléchir et faire d’autres choses, et laisser les choses se tasser. Je veux dire, je suis déjà parti en tournée sans Mikey avant ; j’avais Tommy Victor de Prong sur la tournée The Last Sucker parce que Mikey s’était fait opérer du dos la même année, donc j’ai déjà eu d’autres personnes en tournée. Paul Raven – à la base de Killing Joke qui est venu ensuite dans Ministry – est mort au sein de mon groupe pendant qu’on faisait The Last Sucker – enfin, du moins, juste après – et j’ai pris Tony Campos de Static-X qui l’a très bien remplacé. Tommy Victor a très bien remplacé Mikey, mais je ne veux pas être comme Alice Cooper ou autre et simplement embaucher une poignée de musiciens de 19 ans très en vogue à Los Angeles et en faire le nouveau Ministry. Je trouve que c’est vraiment maladroit et je ne veux pas faire ça. Alors j’espère que les fans comprendront. Je leur ferai des ordonnances pour du Valium jusqu’à ce que nous décidions de jouer à nouveau.
Sur un autre sujet : l’année dernière lorsque vous avez joué à Paris au Bataclan, tu as interrompu et annulé le concert après 15 minutes, et le concert du lendemain à Rock En Stock a été complètement annulé. Quelques personnes à la salle de Paris, et le jour d’avant au festival Léz’Arts Scéniques…
Eh, tu sais quoi ?
Ouais ?
Je n’en ai rien à foutre de savoir si Paris est en colère ou si les propriétaires sont en colère ou quoi que ce soit d’autre. Je n’étais vraiment pas en forme ; il faisait 150 degrés Fahrenheit sur scène [NDT : 66°C], il n’y avait pas d’aération et j’ai réussi à faire huit chansons. C’était le maximum que j’ai pu faire, et après je me suis effondré et j’ai été transféré dans un hôpital parisien. Il y a des photos de moi à l’hôpital parisien et tout sur ma page Facebook. J’étais exténué. Je n’étais pas bourré. Le fait est que je n’avais même pas bu ce jour-là, j’avais pris deux bières ! J’étais exténué. J’étais déshydraté. Regarde ce qui vient d’arriver à Lemmy Kilmister, de Motörhead, au Wacken, OK ? Il s’est effondré après six morceaux, et c’était sur une scène en plein air, à un festival. J’étais dans une salle fermée, sans aucune aération, après huit morceaux et cinq semaines de tournée, j’étais très malade et… et ça arrive ! Lil’ Wayne s’est effondré sur scène il n’y a pas longtemps. Combien de fois Amy Winehouse s’est-elle effondrée sur scène ? C’est… tu sais, tout ce monde s’imagine que les tournées rock c’est un monde imaginaire magique. Le job le plus merdique que j’ai jamais eu à faire, c’est de faire une tournée rock. Alors je suis très fier d’avoir tenu huit chansons ce soir-là. Lemmy n’a tenu que six chansons, Amy Winehouse en a tenu quatre, Lil’ Wayne en a tenu six. J’ai tenu huit chansons avant de m’effondrer, alors ils peuvent tous aller se faire foutre.
Qu’est-ce qui te vient à l’esprit lorsque tu repenses à tes trente ans de carrière en tant que Ministry, depuis l’album With Sympathy jusqu’à From Beer To Eternity ?
Eh bien, je crois que j’ai toujours voulu être un éducateur, un instituteur, un professeur pour des gamins dans les lycées et les universités, sauf que notre société est tellement à la ramasse qu’on paie plus les stars du rock que les éducateurs. Et j’ai choisi l’argent, et j’ai décidé de suivre la voie du rock lorsque j’ai commencé à vendre des albums. Mais j’ai toujours voulu être éducateur, donc d’ici la fin de l’année prochaine, la boucle sera bouclée. Non seulement je fais des livres mais je vais aussi faire une tournée l’année prochaine, simplement ce ne sera pas en tant que Ministry : je vais aller parler dans les universités partout dans le monde sur divers sujets. Je vais faire une tournée mondiale pour faire des conférences et apparemment ils veulent entendre ce que j’ai à dire. C’est très épanouissant pour moi, car je n’ai jamais voulu être une rock star, je n’ai jamais voulu tourner, je n’ai… Tu sais, c’était un passe-temps, j’en ai juste perdu le contrôle et j’étais payé un paquet de fric pour ça, contrairement aux instituteurs. Les instituteurs ont des salaires merdiques, et pourtant ce sont les gens les plus importants sur cette planète. Les pompiers et les instituteurs, ceux-là sont les gens sur lesquels je peux compter, OK ? Donc, c’est bon de revenir en arrière et faire de l’enseignement et donner des cours, plutôt que toute cette folie qui me pousse à être sur des stations de radio. Appellerais-tu un instituteur maintenant pour lui demander comment se passe sa classe cette année ? Non, car selon la société ceci n’a pas d’importance. Pourtant tu es ici à me parler et moi je ne suis qu’un vieux trou du cul bourré. Je préférerais être un instituteur et donc ça me fait du bien de revenir à ça.
Interview réalisée par téléphone le 22 août 2013 par Metal’O Phil.
Fiche de questions : Spaceman.
Retranscription et traduction : Natacha.
Introduction : Spaceman.
Site internet officiel de Ministry : www.thirteenthplanet.com
Album From Beer To Eternity, sorti le 6 septembre 2013 chez AFM/13th Planet Records
Al en interview sur RM voilà un de mes rêves enfin exaucés.
Un de plus.
😉
ps : itw culte. Evidemment.
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J’ai rarement lu un interview si bon.
Une petite leçon de vie en somme sur la fin en prime, mais on en attend pas moins de sa part.
Vivement quelques années que je puisse enfin les voir (en espérant que le vent souffle vers la scène ahah)
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