Raised Fist ne s’est pas manifesté depuis quatre ans et la sortie de l’album From The North (2015). Ce dernier démontrait la volonté des Suédois de proposer une musique aux multiples accroches avec un goût prononcé pour les mélodies, tournant véritablement entériné par Veil Of Ignorance (2009). Pour autant, la formation n’a jamais vraiment abandonné ses influences des premières heures en conservant des aspects de ses racines punk-hardcore. Quoi qu’il en soit, la réputation et le savoir-faire de Raised Fist en la matière faisaient office de garantie. Anthems, neuvième effort du groupe, poursuit son évolution et incarne l’enthousiasme dont il fait preuve aujourd’hui, appuyé par les dires du frontman Alexander « Alle » Hagman : « On avait l’impression d’avoir réalisé un chef-d’œuvre. » Sans aller jusqu’à l’emphase, Anthems a bénéficié d’une attention toute particulière, ce qui se ressent dans la production. De fait, Anthems a élevé le standard d’exigence autour de Raised Fist.
Selon Alexander Hagman, Anthems est le premier album du groupe où le traitement de la batterie et du chant a profité du même investissement que le reste de la musique et les mélodies. Force est de constater que le premier riff groovy le démontre platement : la batterie s’exprime pleinement avec un son de caisse claire au claquant atypique qui participe à l’impact immédiat de chaque rythmique. Le chant d’Alexander occupe effectivement un spectre plus important qui rend justice à sa versatilité. Versatilité qui gagne encore un peu plus de terrain : son grain saturé aigu et intense si particulier côtoie de nombreuses nuances, comme lors du pré-refrain de « Venomous » presque interprété en mode « crooner » ou de l’accalmie de « Polarized » qui monte en tension. Il suffit d’à peine vingt secondes pour se rendre compte qu’Anthems est voué à l’efficacité désarmante et que tout a été pensé pour. Raised Fist navigue entre tous les registres qu’il maîtrise, quitte à les croiser, à l’instar d’« Anthem » qui alterne riffing heavy-power, hardcore et mélodique. La prouesse de Raised Fist est de créer une sorte de cohérence entre des ingrédients distincts qui mène toujours aux mélodies entêtantes. Il est évident que le refrain d’« Anthem » est taillé pour le live, incitation facile à lever le poing et à bondir fiévreusement. Raised Fist parvient en outre au même résultat en variant son arsenal : « Seventh » fait la part belle au phrasé syncopé du frontman avec un groove singulier, renvoyant davantage aux affinités punk du groupe.
Impossible de se tromper donc, Anthems a été conçu avec un dessein : l’immédiateté. L’auditeur ne doit fournir aucun effort pour entrer dans le jeu de Raised Fist. « Into This World » et « We Are Here » sont deux chansons aux refrains entêtants, proches des récents hits d’In Flames, la première étant la plus longue de l’album dépassant à peine les trois minutes trente : Raised Fist a privilégié le rendu live, distillant les accroches et éléments spécifiques à chaque morceau, quitte à perdre en profondeur. Un titre comme « Shadows », s’amorçant avec un riffing agressif d’un certain classicisme, va nécessairement laisser place à une élancée mélodique, quitte à se muer en un break qui voit Alexander Hagman s’illustrer avec sa voix claire. Derrière les aspects « bas-du-front » de la musique de Raised Fist se cache toujours la bonne idée qui sublime la composition : le break basse-batterie d’introduction d’« Oblivious », repris plus loin accompagné d’arpèges mélancoliques, ou encore les dédoublements de voix sur les couplets de « We Are Here » en sont de bons exemples. La recette peut néanmoins accuser quelques coups d’arrêt, à l’image de « Murder » qui démontre que lorsqu’un refrain se veut plus anecdotique (malgré les « We are Raised Fist ! » fédérateurs), la « facilité » de certaines plages du morceau se fait davantage ressentir. Anthems se conclut avec « Unsinkable II », suite du titre présent sur From The North qui, en l’occurrence, permet de rendre compte de toute l’expertise mélodique de Raised Fist, faisant honneur à une tradition scandinave désormais bien connue.
La conception d’Anthems est très simple : c’est une friandise de luxe dont le seul et unique dessein est de lever les foules. Si Raised Fist s’est attelé à procurer beaucoup de soin au rendu sonore et aux détails de production, les compositions sont instinctives et répondent à nouveau (et même davantage qu’auparavant) à l’impératif de la présence d’une accroche souvent pertinente. C’est un album de rock dans sa philosophie, facile dans son appréhension et instantanément appréciable malgré quelques répétitions, le tout conservant ce qui fait la singularité du groupe suédois.
Lyric vidéo de la chanson « Anthem » :
Album Anthems, sortie le 15 novembre 2019 via Epitaph Records. Disponible à l’achat ici