Difficile de suivre les péripéties de Rhapsody depuis 2011 et le split qui a amené les musiciens à migrer entre Luca Turilli’s Rhapsody et Rhapsody Of Fire. Sans revenir sur tout l’historique des événements, le résultat est qu’aujourd’hui, d’un côté on retrouve le Rhapsody dirigé par Luca Turilli et Fabio Lione et de l’autre Rhapsody Of Fire, mené par le claviériste Alex Staropoli. À nouveau, après la compilation de réenregistrements Legendary Years – un bon moyen de présenter le nouveau visage du groupe sur un terrain connu des fans –, c’est bien la formation d’Alex Staropoli qui s’illustre avec son troisième album post-2011 et premier de compositions originales depuis l’arrivée du nouveau frappeur Manuel Lotter et surtout de la nouvelle voix du groupe en la personne de Giacomo Voli (qui a participé à l’équivalent italien de The Voice). The Eighth Mountain inaugure une nouvelle saga pour toujours autant de grandiloquence et bien davantage…
Rhapsody Of Fire n’entend évidemment pas modifier d’un iota son concept. Au contraire, The Eighth Mountain témoigne de la volonté de retrouver les grandes heures de la formation avec des sagas telles que celle de l’épée d’émeraude avec les classiques Legendary Tales (1997), Symphony Of Enchanted Lands (1998), Dawn Of Victory (2000) et Power Of The Dragonflame (2002). Si Rhapsody Of Fire présente ici un tout nouveau line-up, avec Alex Staropoli désormais seul membre originel, le combo ne s’est pas pour autant montré frileux. Ce dernier a sollicité l’orchestre symphonique national bulgare pour réaliser les orchestrations. The Eighth Mountain contient deux chœurs de plus de vingt personnes et une pléthore de solistes pratiquant des instruments médiévaux. De quoi amorcer en grande pompe la nouvelle saga de l’empire Nephilim, histoire écrite par Roby De Micheli et Alex Staropoli, prenant le relais de Luca Turilli à la grande époque, puis Fabio Lione sur les deux précédents opus. Dragons, épées, tyrans, guerriers, magiciens, sortilèges : tous les ingrédients chers à Rhapsody Of Fire sont à nouveau réunis, la différence avec les derniers albums étant que cette fois-ci, la formation semble avoir retrouvé la vivacité et le côté enjoué de ses débuts. L’introduction « Abyss Of Pain » faite de chœurs et de cordes tout en tension permet de construire une véritable attente avant « Seven Heroic Deeds » et ses leads de guitare inarrêtables. Rhapsody Of Fire est revigoré, ce qui se perçoit dans les tonalités en mode majeur, dans un esprit plus « happy metal », mais aussi dans le timbre de Giacomo Voli incarnant parfaitement son rôle de narrateur exubérant, y compris en se frottant occasionnellement à un grain black metal (« Seven Heroic Deeds » et « Tales Of A Hero’s Fate »). La conjugaison de ses lignes vocales avec les chœurs confère un véritable sentiment de profusion sur « Master Of Peace », embelli par le travail pharaonique sur les guitares de Roberto Di Micheli, autant les leads que la précision des rythmiques qui filent à vive allure (« Clash Of Times » contient lui aussi son lot de prouesses guitaristiques…). « Rain Of Fury » lui emboîte le pas et est un condensé de tout ce qui a fait le succès de Rhapsody depuis le début : des mélodies exubérantes, un tapis de cuivres et de cordes, un chant démonstratif à souhait pour un refrain galvanisant et des soli de chevaucheurs de dragons. Recette éculée mais retrouvée et réappropriée par son géniteur. Pour tout dire, il y a presque quelque chose de régressif dans la démarche de Rhapsody Of Fire, dont l’enregistrement de Legendary Years, on se rend compte aujourd’hui, n’était que la première étape.
S’il faut très peu de temps pour constater que Rhapsody Of Fire a retrouvé toute sa fougue, il faut justement marquer des temps d’arrêt dans l’écoute de ce The Eighth Mountain pour ne pas frôler l’indigestion. L’album déborde d’instrumentations qui s’enchevêtrent, certes parfaitement produites (quoique là aussi il y ait un petit quelque chose de régressif dans le traitement assez medium/aigu du son…) mais qui peuvent essouffler jusqu’aux plus valeureux des auditeurs. Il faut une certaine vaillance pour absorber l’intégralité du propos de Rhapsody Of Fire qui décide de ne lever le pied qu’à trois reprises : « Warrior Heart » et son atmosphère dans le pur cliché foklorico-médiéval, l’épique et vallonné « March Against The Tyrant » qui a des airs zeppeliniens dans ses arpèges de guitare, et « The Wind, The Rain, The Moon » essentiellement orchestral à l’exception du final où le groupe vient finir en puissance. En réalité, c’est surtout cette dernière ballade qui sort son épingle du jeu grâce à l’investissement de Giacomo Voli. Il y a une grâce cachée derrière le surjeu, pour peu qu’on accepte celui-ci. The Eighth Mountain se clôt par sa pièce maîtresse de dix minutes, « Tales Of A Hero’s Fate », avec une nouvelle sphère d’exubérance atteinte par le groupe. Fin du monde, genèse d’un nouvel ordre, luttes épiques, on ne sait plus où donner de la tête. Il faut attendre la narration conclusive de l’éternel Christopher Lee pour retrouver une accalmie et ses esprits.
The Eighth Mountain ravive la flamme de Rhapsody Of Fire. Fort d’un nouveau line-up et inspiré par une toute nouvelle saga, le groupe entre dans une nouvelle ère en lorgnant sur son passé, sans doute le meilleur moyen de rassurer les fans inquiets de ne plus reconnaître le quintet italien. Et tant pis si la fibre musicale donne parfois l’impression d’être d’un autre temps, elle ravira les nostalgiques par le niveau de forme affiché et l’intensité des compositions. The Eighth Mountain est une véritable tempête, un florilège de ce qui fait l’essence de la musique de Rhapsody. Parfois c’est trop. Mais tout juste. Rien qui n’empêche d’aiguiser sa lame pour trancher du démon torse nu en invoquant les dieux.
Clip vidéo de la chanson « Rain Of Fury » :
Lyric vidéo de la chanson « The Legend Goes On » :
Album The Eighth Mountain, sortie le 22 février 2019 via AFM Records. Disponible à l’achat ici
Les critiques sont plutôt bonnes sur tous les sites consultés jusque là et j’attends donc cet album avec impatience.
Y a déjà un single et quelques extraits qui circulent et ça a l’air vraiment bien.
Giacomo est à la fois fidèle au chant de Fabio tout en ajoutant une fraîcheur non négligeable.
Après écoute, un excellent Rhapsody, assez dans l’esprit de Legendary Tales et Symphony part 1 mais avec un rendu plus moderne.
Les nouveaux sont vraiment bons, notamment le batteur et surtout le chanteur, Giacomo Voli fait des merveilles.
Un bon 16/20 pour moi.