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Interview   

Rise Of The Northstar… is fucking back!


Leur dernier concert remontait à décembre 2019, on n’avait plus beaucoup entendu parler d’eux depuis… Evidemment, une pandémie est passée par là, les forçant à faire une croix sur toute perspective de tournée. Fidèle à son habitude de discrétion quand il n’arpente pas une scène, Rise Of The Northstar ne s’est pas tourné les pouces pour autant. Le combo a pris son temps ces dernières années, caché dans l’ombre pour élaborer son troisième album et revenir en mode coup de poing avec un Showdown qui, dès son entame, ne laisse aucun doute sur son intention d’en découdre. Suite logique de The Legacy Of Shi (2018), il étend également un peu plus l’univers de ROTN.

Le groupe préférant réfléchir à ses réponses, c’est par e-mail que nous avons interrogé Vithia et Eva-B sur la conception du disque et ses particularités, mais aussi sur leur fibre artistique toujours à la croisée du shonen manga et des grooves heavy des années 90 et leur « philosophie » par rapport au groupe en tant que tel.

« Quand j’écris je suis à mi-chemin entre l’impulsion et la réflexion. Je ne cours pas spécialement après la vulgarité, mais c’est toujours agréable de jurer en français quand tu joues à l’étranger [rires]. »

Radio Metal : On a passé une période avec la pandémie où les concerts ont quasiment disparu. Vous aviez d’ailleurs une tournée prévue en avril 2020 qui a été annulée. ROTN est avant tout un groupe de scène et qui se vit en live. Comment avez-vous vécu le fait qu’on vous ait enlevé cette part de vous-mêmes ? Etiez-vous optimistes sur un retour à la normale ou vous posiez-vous des questions sur votre avenir ?

Vithia (chant) : Ça a été un peu long, en effet. Personnellement, j’en ai profité pour redoubler d’efforts sur notre artwork, peaufiner mes lyrics, étoffer l’album avec Eva-B… Et m’occuper de ma famille. Même si nous ne tournions pas, nous bossions beaucoup le groupe, donc nous n’avions pas le temps de nous ennuyer, mais je me demandais si effectivement les concerts allaient reprendre normalement. Ça a été un sacré merdier cette crise sanitaire…

Eva-B (guitare lead) : Nous avons clairement profité de cette période pour nous consacrer au maximum à la composition. Ça nous a permis d’avoir énormément de recul sur l’album, de revenir sur des morceaux plusieurs mois après leurs ébauches. Pour ma part, je n’avais aucune idée de comment le futur allait se présenter, mais nous avons fait en sorte d’utiliser ce temps pour être productifs. Le retour n’en sera que plus grand !

Vous faites partie de ces groupes qui n’ont pas cherché à compenser l’absence de dates avec des concerts en livestream. Vous estimez que ROTN est une expérience qui doit se vivre forcément physiquement et pas derrière un écran ?

Vithia : Pour dire vrai, j’étais tellement aux prises avec cet album que je ne me voyais pas faire ça. Et puis ça demande pas mal de technique vidéo-sonore ce genre de « live ». Nous ne sommes pas forcement armés pour et j’aime bien que ce qui sort de chez nous soit impeccable. De plus, quand nous enregistrons et composons, ce n’est pas simple de sortir de cet élan « créatif » pour passer à de l’action pure. Enfin jouer sans public… Bof quoi.

Eva-B : Nous avons toujours été très discrets sur de nombreux points, nous prenons notre temps, cachés dans l’ombre. Nous n’allons pas nous plonger dans un projet juste parce qu’il « faut faire quelque chose ».

Quand vous composez, la finalité, c’est le live. C’est plus que jamais le cas avec Showdown, que ce soit avec à nouveau une intro ou un morceau comme « Crank It Up ». Comment avez-vous trouvé toute cette énergie à une période sans concert et où l’avenir de l’industrie live était très incertain ? Est-ce qu’il y avait une forme de contre-réaction ou d’évacuation des frustrations ?

Il est possible qu’une partie des frustrations de l’époque se soit retrouvée dans cet album. Et encore, une bonne partie était déjà composée avant le Covid-19, puisque nous devions initialement commencer l’enregistrement des instruments en mars-avril 2020. Après, c’est toujours très difficile de rationaliser et de poser des mots sur le moment précis où tel ou tel morceau s’est fait. Sur le moment même de la création, tu ne penses pas à tout ça. Un morceau peut démarrer à n’importe quel moment, en partant de rien. J’ai déjà composé des morceaux très agressifs alors que tout allait bien dans ma vie.

Dans le titre de l’album, Showdown, il y a le terme « show », donc concert/spectacle, justement, mais en soi, le mot veut dire « épreuve de force ». Est-ce que ça résume pour vous ces dernières années, à la fois pour le groupe et pour les gens en général ? Est-ce que cet album est une réponse à cette épreuve qu’on a tous vécue ?

Vithia : C’est marrant que tu notifies ça, mais en vérité non, « Showdown » c’est comme ça que j’avais nommé l’un de nos premiers titres pour le nouvel album, ça sonne bien et ça me rappelle cette licence mythique sur Neo Geo : Samurai Shodown (« Samurai Spirits » au Japon). Je n’ai jamais trop compris où était passé le « W » dans le titre occidental de ce jeu [rires]. C’est enfin, et surtout, le thème principal de l’album qui est dans la continuité du storytelling de The Legacy Of Shi sorti en 2018 et où Shogun No Shi vient encore me – ou nous – challenger. Je m’efforce de chercher des mots ou des gimmicks qui sonnent, Showdown était tout trouvé selon moi.

Et l’album, considérez-vous qu’il ait été lui-même une épreuve de force ? Ça faisait cinq ans que ROTN n’avait pas sorti d’album : en avez-vous profité pour étaler la conception de Showdown et le peaufiner, ou bien est-ce que vous êtes plutôt dans l’impulsion créatrice ?

Eva-B : Oui, nous avons a énormément peaufiné les morceaux au fil du temps. Comme je l’ai dit précédemment, certains morceaux datent de 2019, nous les avions dans les oreilles depuis longtemps, et il nous est arrivé de changer quelques riffs lors de l’enregistrement ou d’ajouter des éléments. C’est surtout au niveau des lyrics qu’il y a eu beaucoup de changement et d’essais différents. Je pense que Showdown est un bon mix des deux, une impulsion du moment qui a été digérée sur plusieurs mois pour la perfectionner au maximum. Après, pour ma part, je n’ai pas particulièrement vécu la création de cet album différemment des autres. J’ai toujours fait comme d’habitude : créer des morceaux qui nous font kiffer.

Vithia : C’est plus l’enregistrement qui a été long, et qui a pu, à certains moments, représenter une épreuve. J’essaie à chaque fois de faire mieux que sur l’album précédant où j’ai été pas mal encadré. Là, c’était surtout moi et Eva-B dans une pièce, ce qui représente une confrontation en soi [rires].

« Aussi lucratif que soit le business du manga, il y a toujours des auteurs qui vont plus loin que simplement conter une belle histoire, qui délivrent un message ou soulèvent des questions. En ça, certains mangas ou animés m’ont aidé à appréhender, et parfois comprendre, le réel. »

Vous aviez produit The Legacy Of Shi avec Joe Duplantier. Même si l’ingénieur Johann Meyer du Silver Cord Studio de Gojira a une nouvelle fois réalisé le mix, n’avez-vous pas voulu poursuivre cette collaboration ? Comment ça s’est passé d’ailleurs pour Showdown sur ce plan ?

Eva-B : Vu la période, ça aurait été très compliqué de retravailler avec Joe, et je pense qu’il n’aurait pas eu le temps de se consacrer à cet album comme il l’a fait avec The Legacy Of Shi. Il aurait fallu repartir au Silver Cord et ce n’était pas prévu. Pour la petite histoire, Johann devait venir en France en mars-avril pour faire tout l’enregistrement. Ce qui n’a pas été possible. Nous avons voulu attendre un peu pour voir si la situation allait s’améliorer, mais plus le temps passait, plus nous nous retrouvions dans une impasse. Nous avons donc décidé d’enregistrer sans lui, et qu’il allait s’occuper uniquement du mix.

Au sujet de Joe Duplantier, Vithia, tu nous avais dit la dernière fois : « Lui et moi avons eu pas mal de petits accrochages en studio, notamment au niveau de la voix, parce que nous n’étions pas d’accord sur tout. » Sur quoi par exemple ? Quelle était sa vision au niveau vocal par rapport à la tienne ? Est-ce que ça peut expliquer une volonté de ne pas réitérer l’expérience ?

Vithia : Joe a été très intransigeant au niveau de mon accent anglais, il m’en a fait baver… Mais il m’a aussi beaucoup fait progresser. Enregistrer avec lui était génial mais pour cet album, j’avais envie de fonctionner différemment, à savoir : enregistrer en France sur une plus longue période. J’avais envie de pouvoir prendre le temps d’enregistrer, prendre du recul, pour revenir et modifier des trucs. Un schéma classique d’enregistrement qui s’inscrit sur un mois ne te permet pas trop ça. Là, j’ai vraiment fonctionné en fractionné, j’ai parfois enregistré chez B’, parfois chez moi, mais en me laissant toujours plus de temps et un recul que je juge nécessaire… Sans oublier les Hit Points que j’avais gagnés au contact de Joe ! [Rires]

L’album commence de façon coup de poing et est bourré d’énergie agressive, mais vous développez aussi votre facette mélodique sur « One Love », le dernier morceau « Rise » ou le long solo de « Clan ». Est-ce que c’est réfléchi dans la structure de l’album pour offrir des sortes de respirations et varier les plaisirs ?

Nous essayons toujours d’aller explorer de nouveaux horizons avec nos albums, d’évoluer, d’emmener le truc plus loin. Je n’ai pas envie de faire deux fois le même disque. Il y a toujours eu un peu de mélodie dans nos disques, de l’intro de « What The Fuck » sur Welcame à un morceau comme « Step By Step » sur The Legacy Of Shi, en passant par le pont de « Sound Of Wolves » sur l’EP Demonstrating My Saiya Style. Mais là, Eva-B m’a proposé des trucs encore plus mélo et j’ai kiffé. J’ai pris le temps qu’il fallait pour apprivoiser ses compos et essayer de m’y poser avec tact, et dans la limite de ce que mon spectre vocal me permettait [rires].

Eva-B : C’est clair que nous essayons de plus en plus de choses, et la mélodie est un point important qu’on retrouvera sûrement dans le futur. Ça permet de se diversifier, d’être moins redondant. Mais ça fait surtout plaisir [rires]. Surtout pour les solos. J’adore faire des solos très thrash à la Slayer, je ne dis pas le contraire, mais ça fait du bien de composer sur d’autre types de riffs aussi, d’exprimer d’autres choses.

Je parlais du solo de « Clan », on en trouve aussi un très mélodique dans « Rise », mais globalement il y en a peu dans l’album : avez-vous besoin d’avoir quelque chose à dire plutôt que d’en faire systématiquement comme dans le heavy, par exemple ?

Si tu comptes bien le nombre de solos, il y en a quasiment autant que dans les autres albums. C’est juste qu’une bonne partie arrive à la fin de l’album, du coup, t’as l’impression qu’il y en a moins. Je pense que certains morceaux s’y prêtent, d’autres non. Il faut que ça serve le morceau. Pour « Clan » par exemple, le morceau a réellement pris naissance avec le passage d’intro en clean. Et dès que j’ai trouvé ce truc, je savais qu’il fallait le refaire plus tard et faire un solo dessus. J’en avais juste envie, j’avais déjà des notes qui me venaient, rien qu’en le jouant tout seul.

Dans le morceau éponyme, Vithia, tu hurles « allez tous vous faire foutre, allez tous vous faire niquer », et il n’y a vraiment aucune retenue, tu lâches toute ta rage. Ça peut être interprété comme vulgaire, mais considères-tu que dans un monde qui est de plus en plus porté sur les apparences et l’hypocrisie, ce genre d’expression très directe est saine ? Voire cathartique ?

Vithia : Quand j’écris je suis à mi-chemin entre l’impulsion et la réflexion. Certains titres comme « Clan » ou « Arayashiki » me demandent plus de temps ou d’introspection. Et parfois, des riffs dévastateurs m’appellent et j’attaque vachement plus librement. Ça a été le cas pour ce couplet sur le titre « Showdown ». Je ne cours pas spécialement après la vulgarité, mais c’est toujours agréable de jurer en français quand tu joues à l’étranger [rires].

Tout au long de vos morceaux, on entend différentes voix, « Raijin » en étant un bon exemple : abordez-vous ça comme l’incarnation de différents personnages dans un manga ?

Non pas trop. La voix gutturale que l’on entend parfois en back ou parfois carrément en feat avec moi, c’est tout simplement le Yōkai Shi. Il est là, omniscient à nos côtés, ou en face du groupe. J’aime bien nuancer un peu les octaves vocalement, Shi ou parfois la voix d’Eva-B m’aident à ça, ça crée de la diversité, du dynamisme et ça muscle méchamment un couplet.

« Je regrette juste de ne pas avoir eu plus de musiciens autour de moi pour pouvoir monter un groupe plus tôt. La jeunesse est une arme. »

Dans Showdown, vous chantez aussi bien en anglais qu’en français, et je crois même un tout petit peu en japonais. Est-ce que chacune de ces langues exprime quelque chose de différent dans vos chansons ? Qu’est-ce qui vous fait passer de l’une à l’autre ?

J’ai grandi en écoutant du metal US, c’est de là que je viens. J’adorerais te dire que j’ai limé plein de groupes français étant jeune mais ce serait un mensonge, la plupart de mes classiques viennent de l’autre côté de l’Atlantique. J’ai donc toujours voulu attaquer en anglais mes lyrics, parce que ça sonne bien, parce que j’ai été nourri à ça. Mais j’ai aussi pas mal écouté de rap français, et au fil du temps, j’ai eu cette envie de placer de plus en plus de français dans nos textes. Pas trop non plus, je veux que ces phases soient un peu rares, comme des petites lueurs dans le noir. Quand j’écris dans notre langue, ça me repose terriblement, je trouve ça difficile d’écrire des trucs sensés et stylés en anglais, mon vocabulaire n’est pas aussi riche qu’en français. Du coup, quand je galère à terminer un titre en anglais, je ne me pose plus de question et j’enchaîne en français. Le japonais c’est juste pour parfaire tout ça, donner un peu plus de substance. Je ne me fixe pas trop de limites à vrai dire.

Raijin est le dieu du tonnerre et des éclairs. La mythologie japonaise serait-elle, historiquement, la première forme de manga pour vous ?

Je ne la connais pas assez pour te répondre. Je peux juste te dire que quand tu t’approches d’une salle de concert et qu’un groupe de metal y joue, ça ressemble au bruit du tonnerre… Le titre vient, entre autres, de là.

La dernière fois, tu nous as dit : « Je me sers souvent de la métaphore des mangas pour faire passer des messages. » Inversement par rapport à la question précédente, est-ce que tu vois les mangas un peu comme des mythologies, à l’image de la mythologie grecque, qui sont des histoires, certes, mais aussi souvent des allégories permettant de mieux comprendre le monde, bien réel ?

Comme je me suis familiarisé avec le manga assez jeune, il m’a accompagné tout au long de ma vie, m’a ouvert au dessin et à l’art en général. Il m’a donc sûrement parfois aidé à trouver des réponses. Des œuvres comme Akira de Katsuhiro Ōtomo ou Vagabond de Takehiko Inoue sont des puits de réflexion pour moi, et j’aime à m’y replonger régulièrement. Mais ça, c’est ma sensibilité liée à ces œuvres, je ne peux pas répondre à la place des auteurs eux-mêmes… Je pense qu’un artiste, au sens noble du terme, est à la recherche de la vérité. Aussi lucratif que soit le business du manga, il y a toujours des auteurs qui vont plus loin que simplement conter une belle histoire, qui délivrent un message ou soulèvent des questions. En ça, certains mangas ou animés m’ont aidé à appréhender, et parfois comprendre, le réel.

Raijin est plus connu en Occident sous le nom de Raiden qu’on retrouve dans plusieurs jeux vidéo et qui a été introduit, plus particulièrement, par Mortal Kombat. Quelle est l’influence des jeux vidéo dans votre art mais aussi dans votre vie en général ?

Perso je suis un gros fan d’arcade. C’est là mon unique rapport au jeu vidéo : je ne trouve absolument plus le temps de me perdre de longues heures dans un jeu nouvelle génération, je préfère l’instantanéité des jeux d’avant. Les tutoriels où tu passes quinze plombes à apprendre comment contrôler ton perso m’emmerdent prodigieusement [rires]. Les jeux vidéo n’influent pas trop sur mon travail dans le fond mais plutôt sur la forme, je trouve les artworks des 80’s et 90’s magnifiques avec des illustrateurs d’exception !

Eva-B : Je joue beaucoup aux jeux vidéo. Leur influence principale est que je mets plus de temps à répondre aux mails et aux interviews… [Rires].

On retrouve l’idée de clan qui vous est chère dans un des morceaux. Est-ce que ce groupe répond à un besoin d’appartenance quand vous étiez jeunes ? Vous sentiez-vous exclus ?

Vithia : Pas spécialement. Je regrette juste de ne pas avoir eu plus de musiciens autour de moi pour pouvoir monter un groupe plus tôt. La jeunesse est une arme.

Dans le morceau « Clan », justement, tu chantes à un moment donné que cette musique est un divertissement, qu’en vivre est un accomplissement. Vous êtes encore un groupe assez jeune, puisque Showdown n’est que votre troisième album. A partir de quand avez-vous commencé à en vivre ? Et qu’est-ce qui a été le plus déterminant pour y parvenir ?

Eva-B : Nous avons vraiment commencé à en vivre à partir de 2016-2017 je crois. Cela requiert de beaucoup tourner, y compris à l’étranger. Sans ça, ce serait juste impossible. Il faut aussi proposer aux supporters des produits physiques qu’ils ont envie d’acheter et du merch qu’ils ont envie de porter.

Vithia : N’être qu’un musicien ne suffit plus, mais si autour de ton groupe tu crées des trucs comme du merch ou des services, si tu prends des points un peu partout, il y a moyen de t’en sortir. Après ce n’est clairement pas simple, respect à tous les groupes qui se tapent pour exister.

Vous revendiquez le mélange des « grooves heavy des années 90 » avec « l’esprit féroce du shonen manga ». Est-ce que les deux sont liés, d’une certaine façon, pour vous ? Est-ce que, pour vous, les années 90 seraient un âge d’or, à la fois pour le rock et pour le shonen manga ?

Les deux ne sont pas liés. Ce sont deux passions que j’ai depuis que je suis jeune mais chacune est distincte de l’autre. Je les ai juste réunies malgré moi dans ce groupe, tout simplement parce qu’à chaque fois que je crée un truc, ça respire le manga [rires]. Chaque génération défend son époque, te dira que c’était mieux avant, etc. Il y a encore de purs trucs qui sortent de nos jours, la saison une de One Punch Man est magnifique par exemple. Mais ayant grandi dans les 90’s il est quasi impossible pour moi d’être neutre : je ne sais pas si les 90’s représentent un âge d’or pour le rock ou le shonen manga, mais en tout cas cette période est fondamentale pour le groupe et pour moi-même.

« Tout aussi « fusion » qu’ils soient, RATM est surtout le dernier grand groupe de rock selon moi. »

Il y a toujours eu un grand conservatisme dans le metal. D’ailleurs les années 90 ont été conspuées par les metalleux des années 80. Pensez-vous que la jeune génération actuelle de metalleux et rockeurs soit plus ouverte que les précédentes ?

Eva-B : Il y a, je pense, un grand changement par rapport aux années 90, qui est que la « vieille » génération qui écoute du metal a eu des enfants, et leur a transmis cette musique. Il y a donc un échange qui se fait entre parents et enfants, dans les deux sens, qui n’existait pas. Nous l’avons vu à notre dernière séance de dédicaces avec un père « metalleux à l’ancienne » qui est venu avec son fils, et qui nous a découverts grâce à lui. Est-ce qu’un truc pareil aurait pu arriver dans les années 80 ou 90 ? Les parents de cette époque qui avaient des gosses qui écoutaient du Metallica n’écoutaient pas du tout de metal – dans la grande majorité bien sûr. Tu le vois aussi en festival, où toutes les générations sont désormais présentes. Il y aura toujours des « c’était mieux avant », mais je pense que c’est de moins en moins le cas.

La dernière fois, Vithia, tu nous avais dit : « J’adore Rage Against The Machine, c’est vraiment le groupe qui m’a mis à la musique. » Peux-tu développer l’impact qu’a eu ce groupe sur toi, sur Rise Of The Northsar, sur ta fibre artistique ?

Vithia : C’est RATM qui m’a donné envie de monter sur scène, et c’est via leurs prestations live que j’ai mieux appréhendé le groupe qu’ils formaient. Je trouve que le rock dur se sublime en direct, c’est là qu’un riff ou qu’un lyric prend tout son envol. Je pense que c’est sur ce point-là que RATM m’a beaucoup inspiré, à penser les compos par le live et pas autrement. Le flow de De La Rocha est aussi imparable, le fond, la forme, le goût… Tout aussi « fusion » qu’ils soient, RATM est surtout le dernier grand groupe de rock selon moi.

Ces dernières années, on a vu une montée de polémiques sur l’idée d’« appropriation culturelle », notamment chez des artistes mainstream. Vu que vous empruntez ouvertement au shonen manga et à la culture japonaise, qu’on retrouve aussi bien dans vos accoutrements que dans vos paroles et vos visuels, n’avez-vous pas peur de ce phénomène ?

Je t’avoue n’y avoir jamais pensé. Nous avons tourné plusieurs fois au Japon et les gens ont toujours été très honorés que nous soyons imprégnés de leur culture comme ça. Et puis nous sommes avant tout un groupe de metal, plutôt teinté US pour le coup. Réussir à rendre toutes ces influences homogènes sans se pervertir : en ça réside peut-être la nuance ?

Vous aviez enregistré The Legacy Of Shi à quatre, car Hokuto No Kev était parti et Phantom n’était pas encore parmi vous. Depuis, il semblerait que Thomas Pain, alias Phantom, soit lui aussi parti, puisqu’on retrouve sur les récentes photos un autre Phantom masqué… Et vous avez aussi un nouveau bassiste – caché sur les premières photos – en la personne de Yoru. Pouvez-vous éclaircir un peu ces histoires de line-up ?

Phantom a intégré le groupe à l’enregistrement de The Legacy Of Shi, il y a eu un Phantom avant Thomas, il y en aura après lui, peu importe qui se cache sous le masque ou derrière le bandana, seul son jeu compte. C’est un peu pareil pour notre nouveau bassiste. Yoru ça veut dire « la nuit » en japonais, il fait écho au Phantom. À eux deux, ils forment une redoutable section rhythmique. Dans notre style de musique dite « extrême » les changements de line-up sont courants, la pandémie mondiale n’ayant clairement pas aidé, certains ont réorienté leur choix de vie.

Par le passé, tu nous as dit : « Rise Of The Northstar est un groupe discret, nous voulons que les gens se concentrent sur ce qui se passe sur scène et pas en-dehors. C’est pour ça que sur nos réseaux, nous montrons peu de choses et n’étalons pas nos vies. » c’est possible pour un groupe aujourd’hui de ne pas entrer dans le jeu des réseaux sociaux qui ont un peu tendance à faire la pluie et le beau temps de nos jours ? D’autant que les gens sont très demandeurs, presque voyeurs… Est-ce que la prise de distance ne pourrait pas être interprétée comme de la froideur ?

Je t’avoue n’en avoir aucune idée [rires]. Je pense que la scène metal reste une scène d’aficionados et de mélomanes, la musique et les prestations scéniques sont au cœur des débats. Le reste est somptuaire. Je trouve assez prétentieux l’idée de mettre sa vie en avant quand on n’a encore rien accompli. Pour l’instant, nous restons un groupe plutôt underground même si nous avons une solide base de fans.

L’une des forces de ROTN, c’est sa présentation visuelle, avec vos costumes de scène. Or on peut voir que les groupes qui ont le plus de succès aujourd’hui – et qui ont eu des ascensions rapides – sont souvent les groupes qui développent le plus leur visuel, leurs costumes, le côté théâtral. On voit vraiment que c’est la direction que vous prenez : pensez-vous que c’est en train de devenir primordial aujourd’hui de développer un univers et de ne pas se contenter de la musique si on veut percer et se démarquer ?

J’ai toujours été quelqu’un de très visuel, et j’aime l’idée d’un « show », un vrai. Même si nous venons d’une scène très brute, nous ne nous sommes jamais trop fixé de limites artistiques. J’adorerais développer de plus gros spectacles, j’ai plein d’idées, mais pour l’instant il faut prendre en compte une certaine réalité logistico-économique, alors à défaut d’avancer comme nous le voulons, nous avançons comme nous le pouvons !

Interview réalisée par e-mail le 21 avril 2023 par Nicolas Gricourt.
Photos : Berzerker.

Site officiel de Rise Of The Northstar : www.rotnsofficial.com

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