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Interview   

Royal Blood réinvente le rock à deux


Royal Blood, c’est une histoire – un conte de fée, presque – comme seul le rock, le vrai, peut en créer. Un puissant duo formé du bassiste-chanteur Mike Kerr, qui par un savant branchements d’amplification et de pédales parvient à faire oublier l’absence de guitare, et du batteur grooveur Ben Thatcher, qui en l’espace d’un album et trois ans sont passés de leur garage aux plus grandes scènes du monde et à tisser des liens avec les plus grands, tels que Jimmy Page ou Lars Ulrich.

Il nous reviennent cette année avec How Did We Get So Dark?, leur second album, mais premier à avoir véritablement été attendu par un public. Nous avons échangé avec Ben Thatcher sur cet album qui affirme leur patte et sur lequel ils n’ont pas hésité à malmener le rock. Mais avant ça, nous en avons profité pour revenir sur ces trois folles années depuis le premier opus qui les ont propulsés parmi les plus gros espoirs du genre.

« Il y a quelques nuits où ça part un peu en vrille, avec des incidents où quelqu’un se retrouve à devoir se faire retirer un testicule… »

En un seul album, vous êtes passés d’un groupe de garage à jouer dans de grandes salles avec certains des plus gros groupes en activité. Comment avez-vous géré cette rapide ascension et ce succès ?

Ben Thatcher (batterie) : Ouais, en fait, c’est arrivé très rapidement aux yeux des médias et du public mais pour notre part, nous avons travaillé très dur dans des groupes avant et nous jouons ensemble depuis longtemps. C’est d’ailleurs lorsque nous avons décidé que nous allions faire ça juste pour s’amuser, au lieu d’essayer de d’aller quelque part, que les gens ont commencé à aimer et que avons vraiment attiré l’attention. C’était assez dingue, ceci dit, de voir notre groupe notre qui au début jouait devant personne, un an plus tard, faire salle comble. Je ne pense pas que nous ayons eu assez de temps pour réaliser ce qui se passait, car c’était un tourbillon d’événements qui s’enchaînaient les uns après les autres, des choses folles se produisaient, nous rencontrions des gens dingues et nous vivions notre rêve.

N’est-ce pas difficile de ne pas perdre la tête et garder les pieds sur terre quand une telle chose t’arrive ?

Je ne peux que parler pour mon propre vécu, et Mike et moi avons un esprit très terre à terre grâce à notre éducation, et notre sens de l’humour nous fait vraiment redescendre. Il n’y a pas d’égo en tournée, nous ne faisons que simuler : lorsque nous sommes sur scène, nous aimons devenir ces gens qui peuvent avoir l’aire de [frimer]. Car lorsque nous sommes sur scènes nous jouons la comédie, c’est du spectacle. Mais en tant que personne, nous sommes en fait très terre à terre et très normaux [rires].

Apparemment, ce n’était pas très reposant, vous avez été hospitalisé deux fois, et votre ingénieur du son a même perdu un testicule…

Ouais, nous y avons été fort sur les tournées. Nous avons tourné presque trois ans ensemble. Nous avons eu la chance d’avoir une équipe et des gens qui travaillaient pour nous et qui étaient extraordinaires, mais pas seulement dans leur boulot, ce sont aussi des gens géniaux avec qui on s’amuse beaucoup, et avec qui on passe des bons moments à boire et à faire la fête. Une tournée de Royal Blood, c’est comme une grande famille. Et tous les deux, nous sommes avant tout des meilleurs amis, donc ça vient même avant la musique. Nous sommes ensemble plus souvent que la plupart des couples mariés ! Donc, évidemment, lorsque ceci se passe, il y a quelques nuits où ça part un peu en vrille, avec des incidents où quelqu’un se retrouve à devoir se faire retirer un testicule… Ouais, il y a tout plein d’histoires dans lesquelles je ne vais pas renter, mais c’était très amusant. Ceci dit, c’est important d’essayer de garder la santé. Nous faisons constamment la fête mais pour que ça dure et que tu puisses donner tes meilleurs concerts… Car au bout du compte, les gens ont payé pour venir te voir et ils s’attendent à ce que tu sois au top dans ta prestation. Et donc il est très important pour nous d’être à la hauteur et se sentir bien en le faisant, au lieu d’avoir la gueule de bois et tout. Donc nous avons une bonne méthode pour rester en forme et en bonne santé.

Mike a déclaré que « Royal Blood 2013-2015 était une suite de temps forts flous. » Quels ont été les plus grands et palpitants moments ?

C’était dément ! Des choses comme lorsque nous avons pu jouer aux Brit Awards et nous avons gagné un Brit Award, c’était irréel. Car nous avions presque l’impression de ne pas être à notre place. Nous étions un groupe de rock dans un monde de musique pop et de célébrités, et ce n’est pas ce que nous sommes. Personne ne nous reconnaît dans la rue, c’est remarquable ! Mais là, nous étions à la télévision à gagner une récompense. Donc c’était dingue pour nous. Il y avait d’autres choses comme jouer dans d’énormes salles, être en tournée avec les Foo Fighters… C’est quelque chose que je n’aurais jamais cru que je dirais un jour ! Nous avons vécu des expériences vraiment sympas. Jimmy Page, je suis fan de lui et il est venu à notre premier concert à New York, c’est là que nous l’avons rencontré pour la première fois, et il n’y avait presque personne là-bas et Jimmy est arrivé, c’était dingue ! C’était l’une des premières rock star célèbres que nous avons rencontrée. Lars Ulrich était adorable également lorsque nous l’avons rencontré. Nous jouions à San Francisco et quelqu’un a frappé à la porte de notre loge, Mike a ouvert et il était là, genre : « Hey, mec ! Est-ce que je peux venir passer un peu de temps avec vous ? » Nous étions là : « C’est Lars ! Qu’est-ce qu’il fout dans notre loge ? » Après ce « oh mon Dieu » initial, il était tellement sympa avec nous et il était là : « Vous avez pu un peu voir San Francisco ? » Nous étions là : « Non, on n’a rien vu. » Il disait : « Qu’est-ce que vous faites ce soir ? » Nous : « Rien. » Lui : « Montez dans ma voiture, allons-y, je vous emmène faire un tour. » Et il nous a emmenés faire une visite de San Francisco. C’était extra ! Encore une fois, un moment irréel.

« C’était un peu l’était d’esprit. Au lieu d’être un groupe de rock qui se contente d’être un groupe de rock classique, que se passerait-il si quelqu’un d’autre prenait nos instruments ? »

Votre nouvel album, How Did We Get So Dark?, sort trois ans après votre premier album. N’en aviez-vous pas marre de jouer les dix même chansons encore et encore pendant trois ans? Ne vouliez-vous pas retourner en studio plus tôt pour faire de la nouvelle musique ?

Non parce nous le jouions à différentes personnes, le groupe était encore en train de grandir, nous jouions face à différents publics, pas seulement le nôtre mais nous faisions aussi des festivals, nous avons tourné avec les Foo Fighters, donc nous jouions pour leur public. Et à chaque fois que tu joues, tu reçois une énergie différente. Tu as cette excitation de jouer ta musique pour des gens qui ne l’ont pas entendue auparavant ou bien qui l’ont écoutée et apprécient déjà, donc tu peux les voir chanter et ça apporte une nouvelle énergie. Donc tu oublies un peu que tu joues les mêmes chansons, car c’est un spectacle. Donc ça n’est pas vraiment devenu ennuyeux. Donc nous voulions juste tourner mais comme tu dis, nous n’avions que ces dix chansons et, si ça n’était pas ennuyeux, il était tout de même temps d’arrêter de tourner et écrire d’autres chansons. Car alors tu as un nouvel album à promouvoir, ce qui nous permet de jouer davantage de chansons dans notre set live, et c’est très important pour le développement du groupe.

Vous avez donné votre dernier concert le 9 octobre à Austin, au Texas. Est-ce que ça veut dire que ça vous a pris plus d’un an pour faire cet album ?

Ouais. Nous essayons d’écrire des petits bouts en tournée mais nous trouvions que c’était difficile, et le processus qui consiste à créer est différent du fait de tourner. Donc dès que nous avons arrêté de tourner, après Austin, nous avons été directement en studio, pour écrire autant que nous le pouvions. Mais les chansons, pour nous, ne viennent pas si rapidement, ou pour certaines si, mais si tu veux vraiment sortir ton meilleur travail, il faut prendre un peu de temps et laisser les chansons de développer. Donc ça a pris plus d’un an pour que nous soyons contents de tout ce que nous sortons.

C’est la première fois que vous avez travaillé sur un album avec un public qui l’attendait. Avez-vous ressenti de la pression pour être à la hauteur du succès du premier album ?

Durant les plus de douze mois à le concevoir, tu ressentais effectivement cette pression, mais je pense que nous sommes vite sortis de ça, et nous étions comme : « Tout ce que nous allons faire, c’est exactement la même chose qu’avec le premier » qui est d’écrire la musique que nous adorons jouer, sur laquelle nous sommes tous les deux d’accord. Car c’est tout ce qui nous importe, ressentir la pression que nous nous imposons nous-même pour faire les meilleures chansons que nous pouvons. Je ne pense pas qu’une quelconque pression en vue de réussir commercialement aide. Car alors, tu ne fais pas ce que tu veux faire, tu fais quelque chose pour une autre raison, et nous ne voulons pas rentrer là-dedans. Nous voulions faire de la musique que nous adorons jouer et qui nous stimule, au lieu de faire de la musique que nous pensons que les gens pourront peut-être apprécier.

A quel point les tournées intensives et l’énergie live ont-elles profité à cet album ?

C’est difficile à dire. Il y a clairement eu des choses auxquelles nous avons pensé à propos de cet album, des choses que nous voulions faire et que nous n’avions pas dans notre set live. Donc nous voulions nous aventurer sur différents terrains et des choses dont on prend conscience uniquement en jouant en live. Je pense que ça reste assez séparé mais il y a évidemment le fait que nous voulions jouer nos chansons dans ces salles, donc nous nous sommes rendu compte que nous pouvions presque jouer « moins », car les chansons sonnent tellement énormes dans ces grands lieux. Mais nous nous concentrions quand-même surtout sur les chansons plutôt que sur les concerts, nous voulions écrire les meilleures chansons possible, au lieu de penser à comment elles sonneraient live.

Etant un duo, vous êtes un groupe limité par essence. Est-ce que ça vous force à être plus pertinents et efficace avec vos chansons, les riffs, les rythmes, etc. parce que vous devez vous reposer sur moins d’éléments ? Genre, moins tu as d’outils, plus malin tu dois être…

Je pense que lorsque tu joues autant, tu deviens meilleur dans ton jeu et tu gagnes en confiance et tu es plus à l’aise, ça devient plus facile. Et il faut alors à nouveau repousser tes limites. Mais ouais, il faut être créatif, je pense. Et nous ne voulions pas répéter ce que nous avons fait sur le premier album. Nous aurions pu facilement le faire, se contenter d’écrire Royal Blood II, mais quel intérêt ? Nous pensions que ce serait super de faire quelque chose de différent sur celui-ci. Certaines personnes n’aimeront peut-être pas certaines des diverses choses que nous avons faites. Par exemple, nous voulions faire une chanson qui soit la plus calme que nous ayons jamais faite, et aussi la chanson la plus bruyante que nous ayons jamais faite sur cet album. Donc nous avec un spectre un peu plus large, par rapport aux choses qui s’y passent.

« Tu n’aurais pas des groupes comme Black Sabbath, Led Zeppelin et Nirvana s’ils n’avaient pas détraqué le rock. Ils ont pris la musique qui était apparue avant eux et l’ont bousillée. »

Avez-vous essayé d’ajouter d’autres couches à votre musique ? Comme du clavier, des guitares, etc.

Ouais, en fait, au cours de l’année passée à le composer, nous avons vraiment expérimenté avec plein de choses. Avec le premier album, c’était une basse, une batterie, du chant, et c’est tout ce que nous faisions, rien d’autre, pas de guitare, rien. Donc c’était un peu la règle que nous nous étions imposée, mais avec ce nouvel album, c’était presque l’opposé. C’était : « Bon, on peut faire tout ce qu’on veut. Si on veut ajouter un guitariste, on peut le faire, pareil pour le chant ou peu importe. » Donc nous avons vraiment expérimenté avec un paquet de ces choses mais au final, lorsque nous le faisions, les chansons sonnaient trop ordinaires ou presque ennuyeuses. Une fois que tu mets tous ces éléments dans la création des chansons, c’est genre : « Où va Royal Blood ? Cette chanson était bien comme elle était. » Peut-être que lorsque tu retires ces choses pour ne garder que l’essence, et qu’il ne te reste plus que nous deux de façon brute, c’est là que ça sonne énorme et excitant. En fait, sur ce nouvel album, il y a des petits bouts comme des chœurs avec lesquels nous avons expérimenté, mais ça reste entièrement nous. Nous avons découvert que c’était ça Royal Blood : seulement nous deux jouant ensemble.

A ce sujet, Mike a mentionné des influences de Daft Punk, Black Sabbath et du hip hop. Peux-tu nous parler des influences venant de divers genres musicaux que vous avez utilisées ?

Ouais, surtout le truc avec les Daft Punk, nous étions là : « Que feraient-ils s’ils avaient nos instruments ? » C’était un peu l’était d’esprit. Au lieu d’être un groupe de rock qui se contente d’être un groupe de rock classique, que se passerait-il si quelqu’un d’autre prenait nos instruments ? Donc ces éléments de hip hop sont arrivés et toutes ces choses, rien qu’en ayant un autre état d’esprit par rapport à ce que nous voulions créer. Mais je pense que ça reste… Nos goûts musicaux sont très éclectiques, c’est très varié, mais ce que nous avons écrit, ce sont des chansons dont nous sommes très contents et des chansons qui nous stimulent et que nous pouvons jouer et dont nous adorons le son, mais ce n’est clairement pas tout ce que… Je pense que si nous avions utilisé tout ce que nous aimons, ça aurait sonné horrible [rires]. Ça aurait été du heavy pop RnB… Ca partirait trop dans tous les sens !

A propos du single « Lights Out », Mike a dit que vous avez pas mal été du côté des Daft Punk et que vous essayiez « de déconner avec le rock. » Penses-tu que le rock a besoin qu’on le secoue un peu ?

C’est clair ! Je pense que si ça sonne trop comme du rock, ça reste pareil que ce que les gens ont fait avant. Tu n’aurais pas des groupes comme Black Sabbath, Led Zeppelin et Nirvana s’ils ne l’avaient pas détraqué. Ils ont pris la musique qui était apparue avant eux et l’ont bousillée, ils ont distordu le chant, ils ont distordu les guitares, ils ont écrit des sections dans les chansons que personne n’avait jamais faites. Et je pense que ça vaut pour n’importe quel genre musical maintenant, ceci dit. Je pense qu’avec le hip hop, tu as Kendrick Lamar qui démarque et fait tout ce qu’il veut, genre : « Wow ! Ce n’est pas du hip hop ! C’est autre chose. » C’est là où tu as des gens qui disent : « Je n’aime pas, ce n’est pas mon truc, ce n’est plus du rock, c’est autre chose. » Mais je trouve que c’est palpitant d’explorer et n’avoir aucune règle dans la musique.

L’album pose une question : How Did We Get So Dark? (Comment sommes-nous devenus aussi sombres ?, NDT). Du coup, quelle est la réponse à cette question ?

Je n’en suis pas très sûr mais Mike a écrit ces paroles avant quoi que ce soit. Nous avons trouvé ça marrant. Et nous nous disions toujours : « Il faut qu’on utilise ces paroles quelque part. » Et nous avons écrit pas mal de chansons où nous avons essayé d’inclure ça. Je pense que c’est simplement que nous aimions beaucoup ce titre et ça résumait un peu les chansons et l’atmosphère de l’album.

Ce titre semble faire écho à celui de votre premier EP Out Of The Black. Qu’est-ce que cette obscurité et noirceur représentent pour vous ?

Je ne sais pas ! Ouais, c’est un peu une coïncidence mais c’est aussi le genre de choses à propos desquelles nous écrivons. Nous avons un peu un humour noir. La musique est assez heavy et pour un groupe commercial, c’est plus sombre que la plupart des choses. Mais je ne suis pas trop sûr… Je pense que nous aimons flirter avec le fait d’être un groupe de rock et à la fois sous la lumière de la pop, et nous sommes plutôt du côté sombre des choses par rapport à ça.

Interview réalisée en face à face le 5 mai 2017 par Aline Meyer.
Fiche de questions : Nicolas Gricourt et Philippe Sliwa.
Retranscription, traduction et introduction : Nicolas Gricourt.
Photos promo : Perou.

Site officiel de Royal Blood : royalbloodband.com.

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  • « Donc, évidemment, lorsque ceci se passe, il y a quelques nuits où ça part un peu en vrille, avec des incidents où quelqu’un se retrouve à devoir se faire retirer un testicule… »

    Ouais, des fins de soirées normales, quoi…

    😀

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