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Interview   

SATYRICON : ENTRETIEN AVEC SATYR ET FROST



Radio Metal : Comment allez-vous?

Satyr (chant) : Ça va, on a eu un day-off hier, cette tournée est extrêmement rude. On l’a commencée en donnant 4 concerts en Norvège, après on a eu 2 jours pour transporter le matos jusqu’en Allemagne par nous-même… Depuis ces concerts norvégiens on a joué tous les jours et on n’a eu qu’un seul jour de relâche… Je viens de revoir tous mes musiciens à l’instant car hier nous étions tous en des endroits différents, et tout le monde semble revitalisé et de nouveau d’aplomb. Ce day-off nous a fait le plus grand bien. Hier nous avons fêté mon anniversaire, moi Frost et le claviériste sommes allés dîner chez Paul Bocuse et c’était très sympa!

Bon anniversaire du coup ! Alors, vous avez la peau froide maintenant (NDLR : référence au titre « My Skin Is Cold »)?!

Frost (batterie) : Je crois que tu peux te choper une amende pour ce genre de question! (rires)

Satyr : Parfois la presse a tendance à prendre les métaphores un peu trop au premier degré…

Il faut écouter plusieurs fois « The Age Of Nero » pour comprendre ses sous-titres. Ce nouvel album est très sombre, lourd, on se laisse lentement écraser… Pensez-vous qu’il y a une coupure entre les trois premiers albums et les trois derniers?

Frost : Ma réponse est sûrement différente de celle de Satyr, lui peut répondre de son point de vue en tant que compositeur, moi je suis aussi un auditeur externe…J’ai plutôt le sentiment que chaque album de Satyricon a sa propre personnalité. Je comprends que tu ressentes un certain schisme entre d’une part les trois premiers albums et les autres. Car les premiers avaient moins de mélodies et d’harmonies, ils sont plutôt épiques et basés sur des émotions et des thèmes plus médiévaux, folks et épiques. Alors que les derniers albums sont beaucoup plus rudes et directs, on y trouve moins d’harmonies et de mélodies, ça rentre dans le lard directement, bien rock’n’roll. Je soutiens que les albums sortis depuis « Rebel Extravagenza » ne suivent pas vraiment de chemin particulier, il n’y a aucune sorte de thème ou de concept ou quoi que ce soit. Pour moi « The Age Of Nero » ne peut pas être comparé aux anciens albums, de la même façon qu’on ne peut pas comparer deux êtres humains. Tout comme des formes organiques vivantes avec chacune sa force de caractère, les albums ne peuvent pas être comparés. C’est comme comparer des pommes et des oranges, vouloir trop le faire n’a aucun sens. Il est évident que Satyricon a sacrément évolué, mais je pense que les sensations, les ondes que « The Age Of Nero » dégage, le voyage dans lequel il t’emmène… Tout cela est très différent des précédents albums. Il m’arrive aussi de croire que jamais auparavant un album de Satyricon n’aurait pu te faire voyager autant que celui-ci, par sa puissance et sa capacité à vraiment emmener l’auditeur quelque part. Et je pense que la musique sert à ça, ce pouvoir communicatif. Tout celà grâce à une meilleure composition, à une meilleure globalité de la musique que l’on fait.

Dans votre musique on peut entendre des cuivres et vous faites clairement avancer le métal. Pourquoi avoir choisi de mettre les cuivres en avant ?

Satyr : Ca sonne très bien, et pas seulement avec le métal mais avec notre musique en particulier. Prends la harpe par exemple: c’est un instrument très particulier qui a été utilisé dans beaucoup de styles de musique, elle est plus efficace pour certaines choses que pour d’autres, n’est-ce pas? C’est pareil avec les cuivres, le tuba, le trombone, les trucs comme ça…Ce sont des instruments très singuliers (peut-être plus particulièrement le tuba), ils ont un gros son. Ce ne sont pas les meilleurs instruments à utiliser dans une composition où l’on veut utiliser un instrument discret et doux. Ce que j’essaie de dire c’est que l’on n’a pas trouvé intéressant de sortir quelque chose de son contexte, on a trouvé que ça allait pile-poil avec le métal et notamment avec Satyricon. Ca va super bien avec ce qu’on fait! Et personnellement j’adore le son des cuivres, je trouve ça fantastique! C’est comme quand on enregistrait les cuivres pour la chanson « Den Siste » pour « The Age Of Nero », je l’ai dit à l’instrumentiste, parce que ça faisait un moment qu’on n’avait pas travaillé ensemble. Et donc on répétait un peu au studio d’enregistrement le matin, je lui ai dit « C’est fantastique! Le son que ça a : si puissant et si riche! » On va voir ce que le futur nous réserve, Satyricon a toujours été intéressé par l’essai de nouveaux procédés, pas simplement pour juste essayer mais pour voir où peut aller la musique.

Pensez-vous que vous pouvez mettre n’importe quel instrument de musique dans le métal?

Satyr : Je pense que ça dépend beaucoup du projet que tu as. À plusieurs reprises dans l’Histoire du rock des groupes ont joué avec des orchestres symphoniques, ça devient plus un spectacle qu’un simple groupe de musique. Certains ont particulièrement brillé sur ce point d’ailleurs…

Frost : Oui c’est un domaine où certaines règles sont à suivre, tu sais qu’il y a certaines choses qui vont à l’encontre des règles. Mais ce n’est qu’une question de fonctionnalité en fait, si tu utilises un instrument non conventionnel et qu’il passe bien alors on le laisse, peu importe l’image qu’il a.

Voyez-vous Satyricon comme un groupe visionnaire?

Frost : Absolument! Je pense que Satyr est certainement le plus grand visionnaire de toute la scène ainsi que le plus grand compositeur car il sait où il va, ses idées sont solides et il sait les réaliser.



(Frost) : « Pour moi « The Age Of Nero » ne peut pas être comparé aux anciens albums, de la même façon qu’on ne peut pas comparer deux êtres humains. Tout comme des formes organiques vivantes avec chacune sa force de caractère, les albums ne peuvent pas être comparés. C’est comme comparer des pommes et des oranges, vouloir trop le faire n’a aucun sens. »

Pensez-vous que les gens ont peur de l’innovation car ça les fait affronter leur propre peur de l’inconnu?

Frost : Oui. C’est probablement une peur dont ils n’arrivent pas à se débarrasser, ou peut-être n’ont-ils pas le dynamisme adéquat pour entrer dans des territoires inconnus.

Satyr, tes paroles sont difficiles à interpréter car elles utilisent beaucoup d’images, au delà de la musique tu sembles être un artiste par dessus tout.

Satyr : Nous sommes tous deux créatifs dans des domaines différents. Pour les paroles j’ai toujours utilisé l’abstrait comme langage direct. Tu connais bien les Doors? Si il y a bien une chose qui est fascinante avec les Doors c’est ça, certaines des paroles de Jim Morrisson sont si abstraites qu’elles créent une atmosphère unique. Et ça a clairement été pensé dans le sens où il racontait une histoire ou passait un message ou quoi que ce soit… C’est marrant comme tu peux te faire une idée à partir d’un langage abstrait, quelque chose qui n’a de sens que pour celui qui l’a écrit peut avoir un tout autre sens pour quelqu’un qui le perçoit autrement. C’est comme la langue: elle peut être une couleur à part entière, pour les Australiens par exemple, ils aiment beaucoup les paroles black métal en Norvégien parce que ça sonne d’une certaine manière dans leurs oreilles, c’est ce qu’ils m’ont expliqué. Intéressant.

Vous semblez admirer les guerriers et les héros, mais ne pensez-vous pas que la société de nos jours met plus les victimes en valeur?

Frost : Chacun a sa propre opinion sur le sujet, n’est-ce pas ? De nos jours même si l’esprit combatif n’est pas très étendu il est tout de même admiré par la plupart des gens, même par ceux qui ne l’admettent pas forcément. Mais je pense que les gens ont de la reconnaissance pour ceux qui ont un fort esprit combatif, ceux qui ont un esprit de guerrier. Quelqu’un avec une telle aura recevra sûrement immédiatement respect et admiration. Je pense que ça fait partie de nos gènes, c’est dans la nature de tout être vivant.

Pensez-vous que le black métal est en train de s’ouvrir? Alors que le métal retourne de plus en plus vers ses racines.

Satyr : Je ne pense pas que le métal traditionnel ne se soit jamais approché de trop près d’un sous-genre. Prends différents types de musique, comme l’électronica par exemple: ce ne sont pas des groupes comme « Faithless » qui défrichent de nouveaux territoires, ce sont plutôt des DJs ou des petits clubs qui suivent un axe underground, ce sont eux qui découvrent de nouveaux horizons musicaux. Il en va de même dans le métal je pense. Je ne les connais pas personnellement et ce n’est pas un groupe de métal, mais je pense que quand un groupe tel que At The Drive-in, ou même Tool, est arrivé tout le monde a senti la nouveauté, la fraîcheur. Ce ne sera certainement pas un groupe comme Iron Maiden, Slayer ou AC/DC qui réinventera le métal. Ils font leur sauce, il la font bien, et ils continuent à la faire. Mais ce seront toujours les petits groupes qui iront vers de nouveaux horizons musicaux. C’est ce que nous nous efforçons de faire dès à présent.

Quand « Now Diabolical » est sorti vous disiez que vous alliez conquérir le monde, y êtes-vous arrivés? Avez-vous une rue à votre nom ?!

Satyr : Bon Scott a sa propre rue, elle vient d’être inaugurée, bien des années après sa mort, genre trente ans après quelque chose comme ça, en Australie. Le savais-tu?

Eh bien non !

Satyr : Ça date de pas longtemps.

Frost : Je crois qu’on ne peut pas prendre le nom de personnalités vivantes pour nommer des rues !

Satyr : C’est un trip qu’on a commencé à partir de « Now Diabolical » mais plutôt de « Volcano ». En tant que groupe on a commencé à vraiment foncer droit devant, on a toujours été musicalement ambitieux, tout autant qu’au niveau « succès commercial », donc depuis « Volcano » on y travaille. Ça prend beaucoup de temps, surtout pour un groupe comme Satyricon, qui n’accepte pas les compromis au niveau musical, des paroles ou des visuels. On se bat toujours pour ce que l’on croit être juste. Commercialement c’est plus intelligent de s’adapter mais Satyricon ne s’est jamais adapté à rien. Nous croyons réellement qu’avec notre pugnacité, avec la qualité de notre musique et de nos visuels, il nous est possible d’aller bien plus loin que là où nous sommes déjà. Ce que nous réalisons c’est que « Now Diabolical » a fait beaucoup pour le groupe et en ce qui concerne « The Age Of Nero » nous partons gagnants. Donc nous sommes très optimistes pour l’avenir, on attend plein de bonnes choses.

Frost : Là encore on a l’esprit conquérant qu’il faut pour faire venir les gens à nous, on attend pas qu’ils viennent d’eux-même. C’est notre plus grande passion.

Satyricon est comme une brume noire, on se pose pas mal de question sur votre conception de la vie… Comment concevez-vous le bonheur s’il est possible?

Satyr : Grande question parmi les grandes, n’est-ce pas? Bien sûr que je cherche à être heureux, c’est très important pour moi. Il n’y a pas de contradiction à ça, il est pleinement possible d’aimer l’obscurité et les émotions sombres, surtout dans l’art, et d’en même temps chercher l’harmonie et le bonheur dans sa vie privée. Pour moi il n’y a pas de contradiction.

Frost : Je crois qu’il peut y avoir un amalgame, et le fait que tu poses la question est un signe de cet amalgame généralisé selon lequel quelqu’un qui travaille dans les arts obscurs cultive forcément son malheur dans sa propre vie pour pouvoir travailler, et ça nous concernerait. Ca n’a pas de sens, ce n’est pas logique, il y a une incompréhension au niveau sémantique… Les gens voient les choses de manière trop artificielle. Beaucoup de compositeurs ont écrit des ?uvres extrêmement sombres sans que les gens pensent d’eux qu’ils sont forcément suicidaires, destructeurs ou quoi que ce soit! On ne se pose pas la question pour un compositeur classique ou un compositeur de musique électronique, par exemple, quand il crée de la musique sombre on sait que c’est quelque chose de naturel, quelque chose que l’artiste en question a en lui ou en elle. On fait du métal sombre, et d’emblée on va croire qu’on parle de gens malheureux, qu’on cherche l’autodestruction, mais ça n’a pas de sens. Pour qu’on puisse s’exprimer aussi énergiquement que ce que nous faisons actuellement il nous faut une certaine base, quelque chose d’énorme dans notre vie, et quand quelque chose a cette importance, la création prend son essor. Donc il nous faut juste cette base de départ, sans elle il nous serait impossible de mettre autant de nous-même dans un tel projet vivant…

Entretien réalisé le 28 novembre 2008 à Lyon
Traduction par Gredin

MySpace Satyricon : myspace.com/satyricon




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