Bariolés, corpse-paintés, charismatiques, Descending, Carach Angren, Fleshgod Apocalypse et enfin Septic Flesh, s’étaient donnés rendez-vous le 13 mai dernier au CCO de Villeurbanne afin d’offrir au public lyonnais une soirée cérémonielle et intensément immersive. Une affiche pour les amoureux d’extrême mais pas trop, puisque la majorité des groupes de ce soir-là savent faire un subtile mélange de brutalité et d’orchestrations de qualité. C’est donc la grandiloquence de l’extrême qui aura réussie à attirer les guiboles des fans du genre dans cette soirée chaude et physiquement éprouvante.
Grecs, Italiens, Hollandais, la salle villeurbannaise accueillait une partie de l’Europe qui pour l’occasion a revêtue son plus bel habit : extrêmement délabré mais profondément classieux.
Artistes : Septic Flesh – Fleshgod Apocalypse – Carach Angren – Descending
Date : 13 mai 2013
Salle : CCO
Ville : Villeurbanne
La dernière galette de Descending, New Death Celebrity, remonte désormais à 2011. Le combo hellène arrive donc sur scène avec une apparente sérénité. Deux années à promouvoir ce nouvel opus ont forgé le groupe qui assure un set rôdé, carré mais, du coup, manquant de spontanéité. Le concert a débuté à l’heure, avec pas même une petite minute de retard, et pourtant le public est déjà nombreux et ne boude pas la première partie (en tout cas, on a vu pire). Cependant, l’intensité dégagée sur scène forme une bulle autarcique dans laquelle le groupe va malheureusement s’enfermer. La faute, sans doute, à son rôle de première partie ouvrant pour trois autres groupes qui, eux, sont attendus de pied ferme par le public lyonnais.
Musicalement, Descending évolue dans un metal extrême moderne, style très clairement en vogue depuis une petite décennie, et réussir à y démontrer une identité musicale forte n’est pas chose aisée (quel que soit le style, d’ailleurs). Toutefois, de ce côté-ci Descending fait mouche. Car bien que certains plans et passages, parfois stéréotypés, fassent penser à un certain Gojira (particulièrement marqué sur « The Energy »), la bande arrive à matraquer les oreilles des spectateurs par quelques assauts de riffs bien sentis. Incisifs et percutants ! Les Grecs démontrent également une belle maîtrise instrument en main. Fait constaté chez Nick Vell (batterie) qui cogne avec précision ses fûts et montre une réelle intelligence dans ses plans et breaks. Le groupe clôture son set sur le très efficace « Shared Planet », dont le refrain reste gravé dans un coin de tête quelques semaines encore après le show. Une prestation au final solide mais relativement impersonnelle malgré le fort potentiel musical du combo et sa sincérité.
Mais avouons-le, personne n’est véritablement venu pour Descending ! Concert plié, matos emballé, changement de plateau effectué : la soirée peut enfin commencer.
Setlist :
I Keep Returning
Suicide Promise
The Energy
How Much This Life Weights?
No Other Gods Before Me
Shared Planet
Carach Angren se fait rare entre les frontières françaises. L’occasion pour certains, ce soir, de voir de leur propres yeux ce combo de black à la notoriété grandissant album après album. « An Ominous Recording » résonne en toile de fond. Le public se concentre devant les planches, les bras se dressent haut, quelques cris gutturaux enthousiastes résonnent. Carach Angren est déjà là, peaufinant ses derniers réglages. C’est un véritable rituel qui se prépare. Corpse-paintés, les Hollandais annoncent : ce soir, c’est direction théâtre.
Visuellement, que dire ? Est offert au public un spectacle marqué au fer rouge, labellisé « black metal » et motivé par toute la grandiloquence que l’ont connaît aux combos de black dit « symphoniques ». Le sur-jeu fait partie du show et malgré les apparences quelques peu « niaises » (oui, la position crabe « à la Immortal » n’est pas la position donnant le moins à sourire), Seregor (guitare et chant) reste un sacré leader et un particulièrement bon showman. Celui-ci mime, joue chacun de ses textes, extériorisant tout à tel point que l’on sent l’homme littéralement épuisé à la fin du set. L’aspect théâtralisé de la musique rentre donc en totale adéquation avec le jeu scénique du quatuor (Carach Angren est à la base un trio qui, pour cette tournée, s’est adjoint les services d’un violoniste), formant une symbiose qui, malgré le côté démesuré de la chose, rend le spectacle agréable et profondément captivant. Les yeux sont rivés vers ces étranges personnages qui cultivent l’art de l’horreur avec un show lugubre mais qui, paradoxalement, démontrent une réelle proximité avec leur public. Un réel plaisir de jouer qui, de fait, libère une atmosphère débridée et légère. Finalement, le but est d’assister à un concert de black mais sans trop se prendre la tête. Les puristes du style, eux, ont sans doute préféré se diriger vers le bar afin de pleurer à la mémoire des grandes heures de Burzum et consorts (histoire vraie !).
Mais là où le concert va montrer une certaine faiblesse c’est dans l’interprétation des titres sur scène. Le son, de base, n’aide pas car relativement brouillon (guitare sous-mixée et batterie sur-mixée !). Et la batterie va être un vrai problème, au moins pour les premiers rangs. Car Carach Angren est un combo qui en studio a toujours relégué la batterie au second plan. Jamais mise en avant, celle-ci apporte simplement une rythmique. Mais sur scène le fait d’entendre « clairement » les nombreux blasts et de se prendre le tout en pleine face déstabilise une oreille habituée et connaisseuse de l’œuvre studio de la bande. Ainsi, l’essentiel de Carach Angren, à savoir, ses orchestrations, se retrouvent (mais comme trop souvent dans ce genre de concert) étouffées par une batterie pas toujours précise.
Pourtant, et à juste titre, cela ne gâche pas le plaisir de certains. Des titres tels que « The Funerary Dirge Of A Violinist », « The Sighting Is A Portent Of Doom » ou autre « Lingering In An Imprint Haunting » (qui a ouvert le show) restent fédérateurs et de très bonne facture. C’est finalement pour cela que le public répond majoritairement présent à ce concert à la limite du rituel sacrificiel. Là où l’on égorge des poussins en sirotant un jus de carotte, tapant la bise à ces bourreaux peinturlurés et transpirant qui, après avoir tout donné sur scène, accordent encore un peu de leur personne aux fans, dans une grande simplicité au point merch’. Classe !
Setlist :
An Ominous Recording
Lingering in an Imprint Haunting
Haunting Echoes From the Seventeenth Century
The Funerary Dirge of a Violinist
Spectral Infantry Battalions
Bitte Tötet Mich
The Sighting is a Portent of Doom
Bloodstains on the Captain’s Log
Fleshgod Apocalypse, c’est un véritable phénomène. Discret pendant ses premières années, c’est finalement en 2011 que le combo italien balance sans scrupule un pavé dans la sphère métallique avec Agony, son deuxième et dernier bambin en date. Et ce n’est finalement pas si étonnant de les voir en dessous de Septic Flesh sur cette affiche tant le groupe intrigue. La bande crée incontestablement un engouement sincère et passionné autour d’elle depuis cette sortie il y a deux ans. Les Italiens font partie de cette scène extrême qui joue vite (Francesco Paoli à la batterie est une véritable machine) et qui sait user d’orchestrations à tout va pour apporter une plus-value à sa musique. Une sauce qui a donc de quoi plaire. Du moins, ça c’est pour le studio…
Le concert démarre par une attaque frontale venue de nulle part. La première mesure de « The Hypocrisy » n’est pas terminée que le public implose. Notre chère photographe en paiera même les conséquences sur son matériel. Le coup a été porté de front afin de saisir de suite l’attention de l’audience devenue euphorie et débauche en un claquement de doigts. Mais toute la subtilité que peut avoir la musique du quintet va crouler sous un amas de sons épais, crasseux et peu distincts (du moins, devant la scène) encourageant un peu plus le défouloir physique à défaut d’une réelle dégustation auditive. Francesco Ferrini, placé sur le bord de scène avec un bon vieux piano droit, aura du mal à se faire entendre – n’étant véritablement mis en valeur que sur l’excellent « The Forsaking » qui clôturera le show – alors que Paolo Rossi (basse et chant), a contrario, arrive – et c’en est presque étonnant – à retranscrire de manière juste et amplement correcte ses lignes de chant clair et aiguë. Le tout de manière distincte bien entendu.
Le groupe est-il sur-évalué ? Peut-être (notamment sur scène avec une retranscription assez approximative de leurs œuvres studio) mais n’en demeure pas moins un fait inébranlable : le groupe a du tube en réserve. Après un petit « Requiem In Si Minore » extrait d’Oracles (2009) le groupe déballe son principal argument : « The Violation ». Ce titre relance l’euphorie. Les têtes headbanguent, les corps suent, la respiration s’accélère. Le charisme des musiciens dans leurs habituels costards poussiéreux et en charpie prend encore plus de place sur ce titre dont le groupe connaît la réputation auprès des fans. C’est un malin plaisir qui pousse Tommaso Riccardi à hurler dans son micro afin d’invectiver encore et toujours ce public désormais tout acquis au groupe. Finalement, même si le son a été des plus qualitativement limité sur l’ensemble du spectacle, la performance scénique apporte le véritable contre-poids à ce concert. Car avec une si grosse performance sur les planches, les Italiens ont prouvé que cette place de second n’était et n’est pas volée.
Setlist :
Temptation
The Hypocrisy
The Egoism
The Deceit
Requiem In Si Minore
The Violation
In Honour of Reason
The Forsaking
La scène est enfin vidée. La batterie de Fotis « Benardo » Giannakopoulos surplombe la foule enfin dense. Deux étendards ornent les bords de scène. Au centre de celle-ci : le pied de micro du chef d’orchestre nommé Seth Siro Anton. Une scène peu renouvelée depuis un petit moment mais, à la limite, ce n’est qu’anecdotique. Celle-ci n’attend plus que ses occupants qui arrivent enfin.
Douze titres au programme de ce soir avec une avalanche de classiques en vue. « The Vampire From Nazareth » et « Communion » ouvrent la danse, sorte de véritable bal méditerranéen – égyptien ou influencé de la Grèce antique. La musique du combo percute les murs du CCO revenant, tel un boomerang, transpercer les corps. Dans cette configuration si intimiste, Septic Flesh croît comme un poisson dans l’eau. Son charismatique leader arpente la scène de manière assurée, n’ayant guère à pousser la voix dans ses prises de paroles pour s’attirer les suffrages du public. De plus; le sieur a un chouïa pris niveau masse musculaire, ce qui le rend d’autant plus imposant. Clairement, le groupe n’est pas venu les mains dans les poches et est bel et bien présent en terre lyonnaise pour à nouveau y laisser son empreinte. Cela s’annonce relativement bien parti avec le très bon « A Great Mass Of Death » auquel s’enchaîne la très accrocheuse et entraînante « Virtues Of The Beast ».
Les titres s’enchaînent, récoltant toujours les applaudissements sincères du public. Même si le show semble avancer de manière très méthodique et carrée, la performance scénique, musicale et le spectacle visuel font oublier les quelques faiblesses de ce dernier. Et même si, indéniablement, observer Seth Siro étaler tout son métier sur scène (celui-ci jouant sans cesse avec sa basse qui, plus d’une fois, est passée à quelques centimètres du sol) reste captivant, c’est bien la musique de Septic Flesh qui permet une telle intensité et un tel spectacle. Bien sûr, un leader est celui que l’on observe le plus mais il serait injuste de ne pas s’intéresser à ses acolytes. Christos Antoniou à la guitare, adepte du riff très vite assimilable et « simple » (faisant oublier qu’à une époque Septic Flesh faisait tout simplement du death moins assimilable), s’avère plus vivace que Seth Siro Anton (tout en retenue et sobriété). D’ailleurs, ces vieilles racines, certains fans aimeraient bien les revoir, comme un sporadique clin d’œil au passé. Histoire d’offrir également une playlist de classiques avec au milieu une petite surprise, du style « Melting Brains »… Mais non, pas de ça ce soir. C’est plutôt « Unbeliever » et « Pyramid God » qui viennent encore secouer la foule. « Pyramid God », l’occasion d’ailleurs de jeter un petit regard sur ce que fait Fotis « Benardo » Giannakopoulos derrière ses fûts, dominant la foule, précis, apporte toute l’assise rythmique nécessaire et tient la route d’un bout à l’autre du show.
Septic Flesh continuera sur cet élan jusqu’à la fin de son set. « Lovecraft’s Death » (pour fédérer), « Oceans Of Grey » (prenant toute sa dimension en live), « We The Gods » (pour fédérer, encore) et « Persepolis » (pour fédé… rah, vous aurez compris !) bouclent la première partie de ce concert. C’est donc en toute logique que le public se met à réclamer le retour du groupe sur scène. En plus du combo on veut « Anubis » et « Anubis » on a eu. L’occasion de faire chanter la foule sur ce grand classique du combo hellénique. Des « Anubis ! » résonnent en chœur. Les poumons se vident de toute particule d’air sur chaque refrain. Les têtes bougent au rythme du morceau, marquant chaque cassure et break. « Five-Pointed Star », annoncé par le chanteur comme « un morceau un peu plus rapide » alignera pour de bon le public lyonnais. Connaisseurs ou non, les membres de l’audience ressortent sonnés de ce concert. Une soirée de haute volée, où chaque groupe aura été encouragé, soutenu et sincèrement applaudi. Un constat que n’aura pas manqué de partager Seth Siro Anton, fier de ce public qui aura, pour remercier son équipe, effectué un petit wall-of death en souvenir du passé.
Setlist :
The Vampire From Nazareth
Communion
A Great Mass Of Death
Virtues of the Beast
Unbeliever
Pyramid God
Lovecraft’s Death
Oceans of Grey
We The Gods
Persepolis
Rappel :
Anubis
Five-Pointed Star
Photos : Claudia Mollard
A voir également :
Galerie photos du concert de Septic Flesh
Galerie photos du set de Fleshgod Apocalypse
Galerie photos du set de Carach Angren
Petite correction : pour les concerts hors de Grèce ce n’est quasiment jamais Sotiris qui joue… (et ce n’était pas le cas là non plus !)
[Reply]
c’est vrai, meme qu’il est chauve, donc ca peut pas etre lui^^
Merci messieurs, correction faite 😉