C’est un fantasme qui se réalise. Les adeptes de Septicflesh n’attendaient que ça : la première prestation live des Grecs en présence d’un véritable orchestre. Ceux qui suivent la discographie de Septicflesh depuis Communion (2008) savent que le groupe a pris l’habitude de composer ses albums avec un orchestre et un chœur, le FILMharmonic Orchestra et The Prague Children Choir. Cependant, le coût logistique et les impératifs de préparation conséquents ont toujours empêché Septicflesh de donner vie à leur vision en live. Infernus Sinfonica MMXIX corrige cet affront : Septicflesh est allé enregistrer un concert à Mexico, assisté du Metropolitan Theater Of Mexico, d’une centaine de musiciens du Symphonic Experience Orchestra, de l’Enharmonia Vocalis Choir et de la National University of Mexico’s Children’s and Youth Choir. Rien que ça. Il ne faut pas s’y tromper : si Septicflesh délivre des compositions homériques sur album, rien ne vaut la puissance d’un véritable orchestre enregistré sur le vif.
Infernus Sinfonica MMXIX marque la fin d’un chapitre pour le groupe, dernière sortie inédite avec le label Season Mist avant de rejoindre le mastodonte Nuclear Blast. Septicflesh s’est acharné sur le moindre détail. Le line-up est bien évidemment le même qu’à l’accoutumée avec en outre la présence du membre fondateur Sotiris Vayenas qui exécute son chant clair, habituellement absent des tournées. Le défi logistique était immense, et ce jusqu’à la performance en elle-même où l’on peut entendre Spiros « Seth » Antoniou se plaindre du système intra-auriculaire. Un mal nécessaire, puisque aucun ampli ne devait être présent sur scène pour ne pas interférer avec les micros de l’orchestre. Septicflesh a uniquement sélectionné des titres issus des quatre derniers albums, Communion (2008), The Great Mass (2011), Titan (2014) et Codex Omega (2017). Avant tout par souci de familiarité avec le public, mais aussi parce que ceux-ci étaient déjà arrangés pour un orchestre. Infernus Sinfonica MMXIX est quand même l’occasion d’apprécier de plus vieux titres avec une production réévaluée, à l’instar de « Communion ». Septicflesh a réussi à équilibrer parfaitement la place prise par l’orchestre et le groupe. Inévitablement, certains riffs ont moins de corps qu’en studio – caractère inévitable du live et des balances avec l’orchestre – mais les compositions gagnent toutes en intensité. « Portrait Of A Headless Man » donne le ton, précédé d’une introduction réalisée par l’orchestre qui installe immédiatement l’auditeur dans cette ambiance occulte prônée par Septicflesh. Que ce soit les chœurs, les bois, les cordes ou les cuivres : tout se distingue parfaitement. La grandiloquence, la vraie.
Infernus Sinfonica MMXIX est l’occasion de constater que Septicflesh bénéficie réellement de l’expérience de compositeur classique de Christos Antoniou : le massif et dynamique « Martyr » laisse apprécier, parmi les imposants cuivres, toutes les nuances des cordes de l’orchestre. Même les titres plus entraînants tels que « The Pyramid God » et ses leads ne détonnent pas. Certaines compositions bénéficient même d’un véritable lifting, à l’image des nombreux arrangements d’orchestre et de chœurs apportés en supplément à « Anubis » et qui décuplent la dimension homérique du titre ou le final hollywoodien de « Persepolis ». Infernus Sinfonica MMXIX est la vitrine presque parfaite de l’univers de Septicflesh. Presque, car le groupe accuse quelques moments plus brouillons comme les blasts de « Vampire From Nazareth » et ses guitares qui prennent l’allure d’un magma sonore. Ces imprécisions sont largement oubliables. L’autre écueil est peut-être la trop grande présence scénique de Seth. Si ce dernier parvient aisément à créer une communion avec le public et à le faire entrer dans une transe entre la ferveur religieuse et la ferveur guerrière, il fait parfois sortir l’auditeur de l’atmosphère épique du concert en ressassant les gimmicks du frontman rock. Un détail qui altère légèrement l’écoute prolongée d’Infernus Sinfonica MMXIX. Rien de suffisant pour entailler le prestige de la performance. La puissance du refrain d’« Enemy Of Truth » et le final majestueux de « Dark Art » parlent d’eux-mêmes : Septicflesh est taillé pour se produire avec un tel arsenal.
Infernus Sinfonica MMXIX, et son allure de best of de la seconde période du groupe, fait honneur à tout le travail de Septicflesh et son soin maniaque pour les orchestrations. Tous les spectres des instruments sont respectés, la synergie est quasi parfaite. Certes, le cadre du live amène son lot d’imperfections sonores, loin d’être légion. Reste qu’Infernus Sinfonica est indéniablement la démonstration la plus puissante et la plus poignante du lexique de Septicflesh. Les Grecs ont parfaitement raison : l’orchestre est irremplaçable et transcende tout ce qu’il accompagne.
Trailer :
Album Infernus Sinfonica MMXIX, sortie le 31 juillet 2020 via Season Of Mist. Disponible à l’achat ici