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Interview   

Sepultura ouvre des portes


Sepultura est un exemple de résilience et il l’a une nouvelle fois démontré lors de la pandémie qui a mis à l’arrêt le monde du spectacle vivant, alors que le combo brésilien venait tout juste de sortir son quinzième album, l’excellent Quadra. Dans l’impossibilité de promouvoir ses nouvelles chansons et même tout simplement de se réunir, Sepultura a été l’un des premiers groupes à se retrousser les manches et à innover. Pas de live stream ici, mais des événements en ligne où le groupe échangeait avec les fans, jouait des morceaux à distance et parlait de divers sujets (allant de l’histoire du groupe jusqu’à l’environnement, en passant par la politique, le sport, la philosophie, la dépression, etc.), le tout accompagné d’invités.

Avec toute cette matière musicale obtenue, le groupe a finalement eu l’idée de compiler tout ça (ou presque) sur un disque. Ainsi est né SepulQuarta, l’album. C’est à l’occasion de la sortie de ce dernier que nous avons échangé avec Andreas Kisser – huit mois après notre dernier entretien – pour nous parler de cette expérience et de divers sujets annexes.

« Parfois, on peut être déçu quand on rencontre les gens derrière la musique ou l’art. Mais je n’en ai jamais eu peur, je cherche toujours à rencontrer mes idoles. Je n’ai jamais rien attendu d’eux car j’ai déjà tout d’eux, c’est-à-dire leur musique et leur influence. »

Radio Metal : Le projet SepulQuarta était un événement récurrent où vous pouviez dialoguer avec vos fans, jouer de la musique et échanger des idées. C’est né au tout début de la pandémie et l’album SepulQuarta que vous sortez désormais en est le résultat. Question très simple : peux-tu nous raconter toute l’histoire de ce projet ?

Andreas Kisser (guitare) : L’album Quadra est sorti en février 2020. Nous étions prêts à partir en tournée avec Sacred Reich et Crowbar aux Etats-Unis. Tout était prêt, les répétitions, la setlist, etc. et tout d’un coup, tout a été annulé à cause de la pandémie. Il y avait plein d’incertitudes, personne ne savait ce qui allait se passer. La seule chose que nous savions était que nous ne pouvions pas voyager, nous ne pouvions pas jouer, nous ne pouvions rien faire, pas même répéter ou nous retrouver. Nous avons dû trouver de nouvelles façons de faire vivre le groupe et SepulQuarta est l’idée que nous avons eue pour rester actifs. Ça a permis au groupe de continuer à se parler, de rester focalisé, d’avoir un objectif et un but. Le groupe a passé beaucoup de temps en backstage, dans le tour bus, à discuter, à créer des idées et à se battre – à faire tout ce qu’un groupe fait – mais tout d’un coup, nous avons tout perdu. Non seulement les concerts mais aussi la communication et tout ce dont nous avions l’habitude. SepulQuarta a été créé pour ça. Nous avons aussi suivi le concept de Quadra avec la numérologie et la géométrie. Quarta veut dire mercredi en portugais, qui est le quatrième jour de la semaine. Et nous commencions l’événement à quatre heures de l’après-midi, avec quatre sous-événements : l’introduction, les questions-réponses avec les fans, l’interprétation d’une chanson de Sepultura et la narration.

C’était fantastique pour nous parce que nous étions actifs, nous continuions à nous parler, à faire des projets, à inviter nos amis et des gens, mais nous n’avions jamais l’intention d’en faire un album. Nous ne pensions qu’à chaque mercredi séparément. L’idée était de jouer des chansons de Sepultura que nous ne jouons généralement pas en live et aussi des classiques, c’était un mélange de tout. Fin 2020, nous avons repensé à ça et nous avons réalisé que nous avions de la superbe matière à notre disposition. C’est une situation vraiment unique parce que chaque invité et membre du groupe a travaillé de chez lui. Parfois le chant a été enregistré dans la salle de bain, la batterie dans le jardin avec un iPhone… C’était du fait maison et c’était fantastique parce que nous avons maintenant un album très spécial que personne d’autre n’aurait pu faire. On ne voit pas ça dans d’autres genres musicaux. Il s’est créé tout seul, nous n’avions pas prévu d’en faire un album. L’idée de l’album nous est venue une fois que nous avons vu le nombre d’invités et d’amis qui ont été impliqués dans ce projet. Ça dépeint la musique de Sepultura de manière vraiment unique et spéciale. Ça n’allait pas se reproduire. En l’occurrence, dans « Ratamahatta », nous avons trois batteurs. Comment fait-on ça en studio ou sur scène ? Evidemment, c’est faisable, mais ça requiert beaucoup de travail et d’effort. Cette fois, nous avions un batteur qui a enregistré dans son jardin avec son iPhone et c’est sur l’album ! C’est une manière fantastique de montrer que si on utilise sa créativité, des choses extraordinaires peuvent arriver. Ça a vraiment maintenu le groupe en vie et en plus, nous nous retrouvons avec un album.

Ça paraît très DIY, un peu comme à vos tout débuts…

C’est vrai, car cette pandémie nous a connectés à la technologie. Ça donnait même la possibilité d’écrire un album sans rencontrer les gens. Ça fait un peu peur mais à la fois, c’est très artistique. L’année dernière, notre webmaster Bruno Leandro a fait un boulot extraordinaire à éditer les vidéos, parler aux invités, expliquer comment envoyer les fichiers dans le bon format, et créer le logo de SepulQuarta. C’était une expérience extraordinaire et seule la technologie a pu offrir cette possibilité. C’est quelque chose qui pourrait rester. Evidemment, on ne va jamais arrêter d’aller en studio, d’avoir une salle de répétition et de faire les choses comme il faut, mais il y a aussi cette possibilité. Je suis très content que nous ayons fait ce qu’il faut pour que ça se fasse. C’est un album très spécial, c’est très différent de tout ce qui a été fait précédemment, surtout de la part de Sepultura.

« Tous ceux qui font partie ou ont fait partie de ce groupe jouent un rôle. Ils sont d’égale importance et ils ne seront jamais oubliés. »

Tu as été très critique envers la technologie et la manière dont elle déshumanise la société. N’est-ce pas ironique que la technologie ait été votre salut – et notre salut en tant qu’êtres humains – pour rester en contact et faire ce genre de projet durant cette période ?

Quand on critique quelque chose, ça ne veut pas dire qu’on veut l’exterminer. Cette critique c’est pour faire prendre conscience qu’on perd le contact avec la réalité, la vie et la nature. Les fake news et le concept même de la politique sont très dangereux. Surtout si tu ne te concentres pas et si tu ne comptes pas sur d’autres sources d’information telles que les livres et les interactions avec d’autres êtres humains. Les gens vont parfois trop loin avec la technologie et oublient leur humanité. Mais ça ne veut pas dire que nous voulons exterminer la technologie, Google ou YouTube. Bien sûr, les algorithmes essayent de nous faire prendre une certaine direction sur la base de nos goûts et de nos choix. Mais on a aussi la possibilité de choisir d’autres directions et d’autres parcours si on le souhaite. Il faut exercer cette liberté et poser des questions : pourquoi est-ce que je pense ainsi ? D’où vient cette information ? C’est de ça aussi que parle Quadra. Machine Messiah et Quadra se complètent, musicalement et sur le plan des paroles. C’est notre vision de la chose. Evidemment, la technologie peut être un salut, comme tu l’as dit, mais il faut la manier avec précaution. C’est dangereux de croire que la technologie et l’intelligence artificielle vont tout résoudre, au contraire.

La liste des artistes qui ont prêté leur talent et leur énergie pour enregistrer ces versions des chansons est assez impressionnante…

C’est très émouvant, car tous ceux qui ont été invités ont été très contents, honorés et excités d’en faire partie. Nous avons invité de bons amis et des gens que nous admirons, comme Mark Holocomb de Periphery et trois musiciennes brésiliennes, Angélica Burns, Mayara Puertas et Fernanda Lira… C’était fantastique. Phil Campbell de Motörhead a joué avec nous. Nos bons amis et dieux du thrash metal Scott Ian et Alex Skolnick ont également été de la partie. Ils adorent tous Sepultura, nous avons tourné ensemble, nous nous connaissons. Nous nous sommes bien amusés parce que nous affrontons tous la même situation pour la première fois dans l’histoire de l’humanité. Nous étions tous confinés chez nous. C’était super de pouvoir nous connecter au travers de la musique de Sepultura et avoir la possibilité de présenter une version différente de notre musique, c’est très spécial. Comme je l’ai dit, je ne pense pas que nous aurons la possibilité de refaire ça. Et je n’ai pas envie de le refaire, parce que je veux retourner sur la route et en studio. Je veux redevenir un musicien qui tourne. Mais à la fois, c’est super de voir tout le respect que Sepultura a de la part de tous ces gens – qu’ils soient plus vieux ou plus jeunes que Sepultura. C’est quelque chose de très puissant qui nous motive encore plus à être qui nous sommes. Je suis très reconnaissant de ressentir ça. Nous n’avons pas eu le moindre problème d’égo, de papiers à signer ou de vidéos en retard. Tout le monde a été très professionnel et à la fois, il y avait ce côté « garage ». C’était très rafraîchissant pour tout le monde.

C’est un panel très varié de musiciens et d’artistes, mais selon toi, qu’est-ce qu’ils ont tous en commun ?

L’amour de la musique. C’est ce qui nous unit. Je suis allé en backstage pour essayer de rencontrer mes idoles à cause de la musique. Evidemment, la rencontre n’est pas toujours plaisante [petits rires]. Scott Ian fait le podcast Never Meet Your Heroes justement pour cette raison. Parfois, on peut être déçu quand on rencontre les gens derrière la musique ou l’art. Mais je n’en ai jamais eu peur, je cherche toujours à rencontrer mes idoles. Je n’ai jamais rien attendu d’eux car j’ai déjà tout d’eux, c’est-à-dire leur musique et leur influence.

« Peut-être que ce serait ennuyeux d’avoir tout le temps le même line-up et les mêmes discussions [rires]. Je pense que les séparations apportent vraiment quelque chose. Quand tu fermes une porte, tu en ouvres dix autres. »

Il y a un certain nombre de prestations qui manquent sur l’album SepulQuarta : « Capital Enslavement » avec Kadu Fernandes, « Desperate Cry » avec Jason Bittner et Felipe Roa, « Biotech Is Godzilla & Policia » avec Shavo Odadjian et Tony Bellotto, ainsi que « Meaningless Moments » avec Roman Ibramkhalilov. Pourquoi ne pas les avoir incluses ?

Nous pensions que l’album serait trop long. Nous avions déjà quinze chansons là-dedans. C’est de la musique que nous pourrions utiliser dans le futur. Comme je l’ai dit, nous l’avons enregistré, c’est une occasion spéciale et nous n’allons jamais pouvoir le refaire. C’est cool d’avoir des trucs en plus que nous pourrions utiliser plus tard pour différents packagings ou dans différentes situations. Nous avons déjà quinze morceaux et certains ont trois ou quatre invités. Il y avait beaucoup de monde impliqué et il y a aussi eu beaucoup de boulot avec les maisons de disques, les manageurs et tout, pour la sortie de l’album. Tout le monde était impliqué et très professionnel, et je suis très reconnaissant pour ça.

D’un autre côté, David Ellefson qui a contribué à « Territory » a récemment été viré de Megadeth : avez-vous envisagé de retirer la chanson sur laquelle il apparaît pour les mêmes raisons ? Comprends-tu la décision de Dave Mustaine de l’exclure ?

J’imagine que je comprends. Je n’ai pas la moindre information pour juger un tel acte. Ce serait ridicule de ma part de juger l’attitude de Dave ou celle d’Ellefson. Tout ce que je peux dire, c’est qu’Ellefson est un bon ami que je connais depuis de nombreuses années, il est très professionnel et créatif. J’ai fait plein de projets avec lui, comme Metal Allegiance et Hail!. Nous avons souvent tourné ensemble. Je ne peux pas non plus juger ce qui se passe parce que je n’ai pas d’information. Aujourd’hui, les gens lisent un pour cent des choses et croient connaître la vérité. Tout ce que nous devons faire, c’est respecter. Nous n’avons aucune raison de le retirer de l’album parce que c’était déjà fait. Tout est arrivé une fois que l’album était prêt. Même si ça s’était passé avant, c’est quelque chose qui n’a rien à voir avec nous. Nous n’avons pas le lien professionnel avec Ellefson que Megadeth avait. L’idée n’était pas de juger ou de donner une opinion là-dessus. Notre truc, c’est la musique et nous ferons de la musique avec David Ellefson n’importe quand. C’est un ami cher et on traverse tous des problèmes très différents dans notre carrière et dans notre vie professionnelle. Je lui souhaite seulement le meilleur pour gérer ça. Il a toujours été professionnel et très respectueux à tous les niveaux.

Durant ces événements, vous avez joué des chansons issues des nombreuses phases de votre carrière. Quand tu penses à une chanson aussi ancienne qu’« Inner Self » qui cohabite avec « Ratamahatta » et, disons, « Fear, Pain, Chaos, Suffering », qu’est-ce qui te vient en tête ?

Rien [rires]. C’est quelque chose auquel nous n’avons jamais réfléchi. Je vois Sepultura comme un tout. Comme tu peux le voir dans notre setlist sur n’importe quelle tournée, nous jouons des chansons de tous les albums. Peu importe le line-up, la maison de disques ou le management que nous avions à l’époque. Les gens n’ont pas besoin d’être impliqués dans les batailles idiotes du business que tous les groupes connaissent. Ils veulent y aller, profiter de la musique et passer un moment agréable, comme nous. Nous traitons Sepultura comme un tout. Tous ceux qui font partie ou ont fait partie de ce groupe jouent un rôle. Ils sont d’égale importance et ils ne seront jamais oubliés. Nous jouons ce que nous jouons. Je n’essaye jamais de classer nos albums du meilleur au pire, parce que chaque album a été essentiel pour le suivant, avec les tournées et la musique expérimentale que nous avons faite de Arise à Chaos A.D., à Roots, à Against et Nation, en travaillant avec différents producteurs, en ayant différents line-up, etc. C’est fantastique. Peut-être que ce serait ennuyeux d’avoir tout le temps le même line-up et les mêmes discussions [rires]. Je pense que les séparations apportent vraiment quelque chose. Quand tu fermes une porte, tu en ouvres dix autres. Tu explores de nouvelles situations et c’est ce que fait Sepultura. Nous vivons dans le présent, ici et maintenant. Nous ne nous cramponnons pas au passé et nous ne sommes pas anxieux en pensant à l’avenir.

« L’art est un risque. Si on ne prend aucun risque, on ne fait pas de l’art, on ne fait que se copier ou copier quelqu’un d’autre. »

Ça doit être très épanouissant d’avoir une setlist avec autant de diversité et de variations.

C’est super parce que ça représente ce qu’est Sepultura. Sepultura c’est de la guitare acoustique et des bongos, et à la fois, c’est de la double pédale, du chant, de la guitare et de la basse agressifs. Nous avons tout. Nous essayons de créer différents éléments et sons parce que le Brésil est très riche, on y trouve plein d’instruments, de rythmes et de mélodies. Nous explorons ceci naturellement. Nous sommes brésiliens. Même si nous ne voulons pas l’explorer, nous le faisons inconsciemment parce que c’est là que nous vivons et de là que nous venons. Même Derrick qui ne vient pas du Brésil y a vécu pendant plus de vingt ans. Il connaît la langue, la culture… C’est une combinaison très étrange que nous aimons respecter, suivant le type de concept que nous avons sur l’album. Nous y allons à fond, nous n’avons jamais eu peur d’essayer de nouvelles choses ou de prendre des risques. L’art est un risque. Si on ne prend aucun risque, on ne fait pas de l’art, on ne fait que se copier ou copier quelqu’un d’autre. Il faut prendre un risque ou essayer de faire quelque chose de différent, autrement on reste statique.

La culture, l’art et le divertissement sont largement restés sur le carreau durant la pandémie, mais quelle a été, selon toi, l’importance de la musique durant cette période ? Penses-tu que ça a donné aux gens un moyen de voyager avec l’esprit quand ils ne pouvaient pas le faire physiquement ?

Toujours. Je pense que la musique est liée à nos sentiments et nos moments spéciaux. On entend une chanson et on n’oublie jamais ce moment. La musique est liée à la vie. La musique est la vie. La vie est la musique. En tout cas, ça représente tout pour moi. J’apprends énormément avec la musique, aujourd’hui et à tout jamais. La musique m’a montré le monde. Elle a un puissant effet, c’est certain. C’est super de voir que les ventes d’instruments ont augmenté, surtout durant la pandémie. Les gens ont enfin voulu apprendre à jouer d’un instrument, ils ont voulu acheter une guitare, une basse, un kit de batterie ou un clavier, et ils l’ont vraiment fait. La musique m’a également sauvé durant la pandémie. Ne plus pouvoir tourner, ce n’est pas rien pour nous. Je n’avais pas arrêté depuis 1989, en gros, et tout d’un coup, je ne pouvais plus monter sur scène. Je me suis vraiment plongé dans l’étude musicale, surtout de la guitare classique. J’ai aussi acheté un nouvel instrument, une guitare classique sept cordes, ce qui a ouvert plein de possibilités pour moi et pour la musique, pas seulement pour Sepultura, mais pour n’importe quel projet dans lequel je m’implique. C’est super parce que tu utilises le fait d’être confiné au même endroit pendant une longue période de temps pour créer une nouvelle routine et trouver des attitudes et des choses saines qui feront que tu te sentiras mieux. J’ai arrêté de boire il y a presque un an et demi. J’ai commencé à faire plus d’exercice, à plus étudier la musique et à avoir une relation avec ma famille. Je n’avais pas ça avant parce que j’étais toujours parti, en train d’enregistrer ou de tourner. Il y a plein de choses positives qui découlent de cette situation quand on est capable d’ouvrir des portes, et c’est ce que nous avons fait.

Dans quelle mesure la musique a joué un rôle pour t’ouvrir et te libérer l’esprit quand tu étais jeune ?

Mon foyer était toujours plein de musique. Mon père adore la country brésilienne et un tas d’albums de musique classique, surtout Mozart, Beethoven, etc. Ma mère a une collection très variée de vinyles. Elle a l’album Help! Des Beatles, les Bee Gees et un tas de disques de samba brésilienne. On a aussi ces compilations de soap-opéras, on y trouve plein de groupes différents. J’ai entendu Genesis pour la première fois sur l’une de ces compilations. La musique faisait vraiment partie de notre vie. Ma grand-mère jouait de la guitare acoustique et ma mère jouait un petit peu d’accordéon ; à un niveau très amateur, elles n’avaient pas un niveau professionnel, mais nous avions des instruments de musique autour de nous et la musique faisait partie de tout, même du football, qui est ma première passion. J’ai un album avec tous les hymnes de tous les clubs de foot brésiliens. J’ai appris les hymnes des clubs de foot avant d’apprendre Kiss, Queen et Iron Maiden [rires]. J’ai beaucoup écouté ça parce que j’adorais le football quand j’étais gamin – et j’adore toujours – ma première passion était le football. Et le Brésil est un pays très musical. Tu vas à un match de foot, il y a de la musique. Tu vas à une fête ou à un carnaval, il y a de la musique. Tout ici est musique. C’est quelque chose de très naturel pour nous, je suppose.

« J’ai un album avec tous les hymnes de tous les clubs de foot brésiliens. J’ai appris les hymnes des clubs de foot avant d’apprendre Kiss, Queen et Iron Maiden [rires]. »

Penses-tu que la passion autour du football est comparable à la passion autour de la musique ?

Oh oui ! Nous plaisantions en disant qu’Iron Maiden n’a pas des fans, ils ont des supporters, c’est presque comme une équipe de foot ! Nous avons l’impression que c’est pareil pour Sepultura, c’est comme un culte. La passion est la même, en tout cas pour moi. Comme je l’ai dit, le football et la musique étaient très présents dans ma jeunesse et je conserve ces passions.

La plus ancienne chanson présente sur SepulQuarta est « Orgasmatron » de Motörhead, que vous aviez déjà enregistrée il y a trente ans, en bonus sur Arise, mais la chanson originale est sortie en 1986 ; tu ne faisais même pas encore partie de Sepultura à l’époque. Qu’est-ce que Motörhead représentait pour toi dans ta jeunesse et représente encore aujourd’hui ?

Motörhead est l’un des principaux groupes pour moi, avec Black Sabbath et même avant Metallica. Je pense que Motörhead avait le pouvoir de connecter les garçons et les filles qui écoutaient le heavy metal et le punk. Quand j’étais jeune, il y avait un grand fossé : les gens qui écoutaient du heavy metal n’écoutaient pas de punk, il y avait d’énormes bagarres et même des gens qui mouraient à cause de ça, ce qui était stupide. Motörhead était un peu le lien qui a vraiment connecté ces deux mondes, grâce à leur allure et à leur manière de représenter la musique et le rock n’ roll. No sleep ‘til Hammersmith est mon album préféré de Motörhead, c’est l’album que j’ai le plus écouté. Même le nom de Sepultura vient d’une chanson de Motörhead, « Dancing On Your Grave », sur Another Perfect Day. Ensuite, nous les avons rencontrés, nous avons eu le même manageur pendant un moment et plus ou moins la même équipe. Ils nous ont volé notre équipe brésilienne [rires]. C’était super.

Motörhead sont devenus nos frangins. Lemmy nous a beaucoup soutenus quand Derrick est arrivé dans le groupe. Lemmy a été le premier à dire : « Les mecs, vous avez trouvé le bon gars. Ce gars est une star. » C’était très motivant. Nous avions besoin de ça à l’époque. Nous étions très fragiles à ce moment-là, par rapport au maintien du nom et au fait que nous commencions une nouvelle carrière avec Sepultura. Lemmy et Motörhead ont joué un rôle crucial pour nous aider à traverser ça. Pareil pour Jason Newsted ; nous avons enregistré une chanson ensemble. Nous avons un lien puissant avec Motörhead. Evidemment, plein de gens et notamment de jeunes qui ont entendu cette chanson pour la première fois croient qu’« Orgasmatron » est un morceau de Sepultura. Surtout ici au Brésil, parce qu’« Orgasmatron » a été diffusé régulièrement à la radio. Le fait d’avoir un morceau de Sepultura à la radio ici a été notre premier exploit ! Nous avons aussi gagné le prix du meilleur clip sur MTV pour « Orgasmaton ». Il y a plein de symboles derrière le fait que nous fassions maintenant cette chanson avec Phil Campbell pour clore l’album. C’est la seule chanson qui n’est pas de Sepultura mais c’est presque une chanson de Sepultura. Nous sommes privilégiés d’avoir cette amitié avec ces gens qui sont à la fois nos dieux et nos amis. Phil Campbell est un ami cher et c’est extraordinaire de l’avoir sur l’album.

« Motörhead sont devenus nos frangins. Lemmy nous a beaucoup soutenus quand Derrick est arrivé dans le groupe. Lemmy a été le premier à dire : « Les mecs, vous avez trouvé le bon gars. Ce gars est une star. » »

L’illustration de SepulQuarta signée Eduardo Recife montre des fleurs poussant sur le corps d’un oiseau mort. Est-ce une métaphore exprimant la résilience de Sepultura et la manière dont le groupe est toujours parvenu à se réinventer, peu importe les épreuves ?

Clairement. En fait, c’est un jeune gars de Belo Horizonte que notre batteur Eloy a trouvé. Il a proposé de travailler avec lui et nous avons adoré ses œuvres. Je lui ai expliqué toute l’idée de SepulQuarta, c’est-à-dire créer de la vie à partir de la mort, en gros, car le groupe a arrêté de tourner, nous ne pouvions plus rien faire et nous avons créé SepulQuarta. SepulQuarta a maintenu le groupe en vie. Ça a créé une nouvelle vie, un nouveau but et une nouvelle manière d’être Sepultura. Il a trouvé ce concept avec l’oiseau et les fleurs, et nous adorons ! Dès que nous avons dévoilé l’illustration, nous avons eu d’incroyables retours, c’était très positif parce que c’est aussi très différent de tout ce que Sepultura a fait avant. Nous cherchons toujours quelque chose comme ça, de nouveaux artistes qui peuvent apporter une nouvelle interprétation de ce que nous faisons aujourd’hui. Nous sommes très contents de son travail.

La dernière fois qu’on s’est parlé, en septembre l’année dernière, je t’ai questionné sur l’industrie et tu m’as dit que vous étiez « en train de lentement construire quelque chose de nouveau » et que « Sepultura apport[ait] sa contribution pour tout réorganiser, en continuant les sessions SepulQuarta, en ouvrant de nouvelles portes en tant que Sepultura, musiciens et artistes. » A ton avis, qu’est-ce que Sepultura conservera à l’avenir de l’expérience SepulQuarta et de cette étrange époque ?

Nous allons garder éternellement toutes les expériences que nous avons vécues en mettant ceci en place, en interagissant différemment avec les gens, en interagissant différemment en tant que groupe avec nos fans, etc. Il y a des possibilités qui pourront être utilisées dans le futur de plein de manières différentes. Evidemment, j’ai envie de retourner en studio, de travailler en tant que groupe, d’être dans les loges, en salle de répétition et dans le tour bus, etc. mais nous avons aussi ceci. Nous avons appris à gérer une situation différente et nous en avons fait un album, alors que ce n’était pas notre intention. Notre intention était juste de faire SepulQuarta tous les mercredis pour continuer avec le groupe, et au final, nous en avons fait un album, ce qui est fantastique. C’est très agréable d’avoir ça maintenant, mais nous avons vraiment hâte de remonter sur scène, j’espère que c’est pour bientôt.

De nombreux groupes ont fait des live streams sous diverses formes, mais vous avez choisi une autre voie avec SepulQuarta. Penses-tu que les live streams – c’est-à-dire faire un concert sans public – ne soient pas faits pour un groupe comme Sepultura ?

Nous ne l’avons pas fait parce que Derrick est aux Etats-Unis, donc nous ne pouvions pas réunir le groupe. Nous avions prévu d’en faire un mais ça ne s’est pas fait. C’est une possibilité pour le futur. C’est quelque chose qui fonctionne, ça peut être fait avec des effets spéciaux. Nightwish, Death Angel et plein d’autres groupes ont fait un boulot extraordinaire.

As-tu commencé à penser au successeur de Quadra ?

Non, pas vraiment. Nous voulons jouer Quadra. Nous n’avons pas eu l’occasion de jouer quoi que ce soit de Quadra. Nous voulons jouer les chansons et prendre notre temps. Nous ne sommes pas pressés, surtout parce que le concept de temps a beaucoup changé durant la pandémie. Profitons de ce qu’on a maintenant. Nous verrons ce que nous pourrons faire l’an prochain.

Interview réalisée par téléphone le 25 juin 2021 par Nicolas Gricourt.
Retranscription : Emilie Bardalou.
Traduction : Nicolas Gricourt.

Site officiel de Sepultura : www.sepultura.com.br

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