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Chronique   

Shining – International Blackjazz Society


Shining - International Blackjazz SocietyIl y a deux ans, le chanteur-guitariste-saxophoniste Jørgen Munkeby, l’homme derrière ce monstre musical qu’est Shining (le groupe norvégien), nous confiait voir dans les opus Blackjazz (2010), Live Blackjazz (2011) et One One One (2013) une trilogie. Mais il faut se rendre à l’évidence, Munkeby a ouvert en 2010 une brèche dans son propre esprit bien plus profonde qu’il ne l’avait imaginée. International Blackjazz Society, comme son nom l’indique, s’insère dans la continuité directe du concept musical novateur et rafraîchissant de Blackjazz, et dont il poursuit aujourd’hui le développement. Plus encore, comme semblait déjà le suggérer la chanson « Blackjazz Rebels » sur One One One, Blackjazz devient plus qu’un concept, plus qu’un pseudo-style musical, mais une communauté, voire carrément une rébellion contre les conformismes de toutes sortes, qui se retrouve sous la bannière déjantée de Shining.

Car Shining ne ressemble à rien d’autre, et ne pense comme personne d’autre. Quand Munkeby explique que c’est en tant que jeune metalleux qui ne connaissait encore rien au jazz qu’il a décidé de se mettre au saxophone, plutôt qu’à la guitare, il y a en effet déjà de quoi trouver la démarche originale. Ce saxophone – actuellement le plus prisé du monde du metal -, indissociable de l’identité du groupe, qui nous raconte des histoires, et même souvent s’emporte, comme sur la complainte instrumentale « House Of Warship », doublé d’une batterie en freestyle (exercice dans lequel le batteur Tobias Ørnes Andersen s’était déjà illustré sur le « Tacit II » d’Ihsahn), ou l’amorce d’album « Admittance ». Une introduction qui enchaîne directement sur le single « The Last Stand ». Efficace et direct, ce dernier offre une accroche immédiate à l’album, renvoyant comme un parfum de Nine Inch Nails, dans cette batterie simili-disco qui donne un irrésistible entrain au refrain ou ce chant débridé à la Trent Reznor. Idem pour les sons de synthé très « nineties » qui parsèment les chansons, comme sur le mi-rampant mi-tapageur « Burn It All » ou le rock n’ roll déglingué de « Last Day ». Car, en plus du sax et des riffs à se fracasser le crâne contre les murs, c’est aussi ça le « son » Blackjazz : ce grain indus, jusque dans les guitares et la saturation de la voix, qui l’inscrit un peu plus dans un univers étrange et désaxé.

Mais, au-delà des caractéristiques et dénominateurs communs qui font depuis cinq ans la marque de fabrique de Shining, très vite on se rend compte qu’International Blackjazz Society opère une synthèse entre les albums Blackjazz et One One One, entre la folie expérimentale sans bornes du premier et la concision du second. Avec International Blackjazz Society, les liaisons entre les pistes, à l’image de l’ensemble que forme « House Of Warship », « House Of Control » et « Church Of Endurance », offrent à l’album l’allure d’un « tout » sans pour autant compromettre l’individualité des chansons. De One One One, l’album hérite l’immédiateté via des refrains grisants et des structures semi-conventionnelles. « Semi » car non-rigides, laissant de la place à toutes sortes de rebondissements, de divagations, de changements de rythmes soudains et ravageurs. « Burn It All » monte en puissance jusqu’à « bugger » au sommet de son intensité, de façon semblable à l’interminable et insoutenable blast de « The Madness And The Damage Done » sur l’album Blackjazz. « Thousand Eyes » nous fait perdre la tête avec les incessants retournements de sa seconde moitié, où les riffs foisonnent et réveillent nos instincts sauvages, et une prestation démente de Munkeby. La plus grande surprise de l’opus reste « House Of Control ». Première tentative de Shining à porter la musique de Blackjazz au format « ballade ». Terme entre guillemets, car celle-ci n’a d’une ballade que son caractère plus posé et son refrain plaintif. Munkeby, qui d’album en album prend ses aises en tant que chanteur, y délivre sa prestation la plus émotionnelle à ce jour, sous une névrose mal contenue qui finit, inévitablement, par déborder et faire tourner au vinaigre l’atmosphère tantôt inquiétante, tantôt mélancolique du titre.

International Blackjazz Society montre que Jørgen Munkeby et Shining n’en n’ont pas terminé avec Blackjazz, que le concept musical peut encore s’affiner, se développer, se ramifier, peut-être même à l’infini, dans l’esprit insondable de son créateur. En tout cas, la synthèse opérée sur International Blackjazz Society se montre redoutable, attirant et scotchant l’auditeur pour mieux le prendre à revers et lui brutaliser les méninges.

Voir le clip de « The Last Stand » et écouter la chanson « Last Day » :

Album International Blackjazz Society, sortie le 16 octobre 2015 via Spinefarm Records.



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