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Metalanalyse   

Soil réunit ses forces et tire dans le mille


C’est fou comme certains chanteurs ont cette propension à envahir de leur personnalité tout ce sur quoi ils chantent. Lorsque Ryan McCombs est parti de Soil pour intégrer le combo néo metal Drowning Pool, le chanteur a comme pris possession de la musique qui lui a été présentée. Le premier album qui en est ressorti, Full Circle, sonnait presque comme la continuation logique du Re.De.Fi.Ne avec lequel il a quitté Soil. Un néo metal / heavy rock mêlé d’une composante grunge qui petit à petit commençait à s’inviter dans le tableau et dont on peut dire qu’elle a pris de l’envergure sur ce premier album en compagnie de Drowning Pool. Une composante grunge que Drowning Pool a hérité de l’évolution vocale de McCombs initiée chez Soil et l’apport de ses intonations parfois très proches du regretté Layne Staley d’Alice In Chains. Alors, c’est certain, les musiciens ne peuvent pas n’y être pour rien (on pouvait déjà deviner quelques petites influences venues de Seattle dans le Desensitized de Drowning Pool avant que McCombs n’arrive) et, de toute façon, les deux groupes tendaient naturellement vers des univers proches, mais la manière dont il a pu être capable de relier musicalement deux formations en dit long sur le poids de sa personnalité vocale – et même de sa personnalité tout court.

Dans le temps du séjour de McCombs chez Drowning Pool, Soil ne s’est pas tourné les pousses, produisant deux albums accompagné d’AJ Cavalier au micro. Et même si ce dernier n’a pas démérité dans son rôle, la musique, elle, s’est légèrement arrondie, perdant en tranchant et nervosité, là où elle a gagné un côté plus foncièrement rock, surtout avec l’album Picture Perfect. Mais voilà, McCombs est de retour et le constat frappe immédiatement dès « Loaded Gun » en ouverture du nouvel album, intitulé Whole : en le comparant à son prédécesseur, c’est comme si les deux avaient en fait été réalisés par deux groupes bien distincts, tellement les intentions qui en ressortent semblent différer. Avec Whole, Soil reprend clairement là où McCombs les avaient laissés. D’ailleurs, on imagine mal un album plus rock comme l’était, en grande partie, Picture Perfect rendre justice à un tel chanteur sans provoquer une sorte de déséquilibre. Pas que McCombs ne saurait s’adapter à des chansons rock (il l’a démontré par le passé), mais ce chanteur est comme un lion : il lui faut son quota de viande à se mettre sous la dent et à déchiqueter. Et c’est ce qu’il fait sur une bonne partie de Whole qui contient parmi les parties vocales les plus agressives de sa part.

Il fallait donc bien que la partie instrumentale de ce nouveau Soil reprenne de l’épaisseur, de la hargne, de la nervosité, pour gagner en consistance, sous peine de se faire avaler en une seule bouchée par le frontman. Ils n’ont pas eu à chercher bien loin l’inspiration : Whole fait directement écho aux albums de 2001 (Scar) et 2004 (Re.De.Fi.Ne.), assurément les deux références des fans du groupe. Les riffs se font lourds et agressifs, ils reprennent même leurs intonations néo metal de manière plus appuyée encore qu’auparavant, avec ces rythmes aux grooves à la fois énergiques et écrasants. La puissante batterie de l’intérimaire Will Hunt (qui a travaillé avec Black Label Society, Evanescence, Bloodsimple ou encore Device) y est pour quelque chose mais aussi la basse profonde de Tim King qui alourdit sérieusement les impacts. Mais néo metal, Soil ne l’est pas jusqu’au bout des doigts, puisque la plupart des riffs de guitare lorgnent davantage du côté d’un heavy rock viril et du power metal à l’américaine. Un groupe comme Corrosion Of Conformity, époque Wiseblood, n’est même parfois pas loin sur une chanson telle que « My Time ».

Résultat, c’est comme si rien ne s’était passé entre le départ du chanteur et son retour. Tout juste Soil accentue-t-il une approche plus directe et accrocheuse de sa musique, mais il n’est pas certain que ce soit tant un héritage de l’époque AJ Cavalier qu’une volonté du groupe de tout envoyer dans la face de l’auditeur avec la plus grande efficacité. Après presque dix ans de perte de vitesse, il n’y a pas de place aux tergiversations, il faut aller droit au but et mettre tout de suite ses atouts sur la table. Ironiquement, on est là pas loin des motivations qui ont mené Drowning Pool à faire un album tel que son dernier, Resilience, retour aux sources et misant avant tout sur l’immédiateté, sauf que Soil joue davantage la carte de l’agressivité metallique, à la limite parfois du punk/hardcore (« Psychopath »).

Quand bien même, Whole n’est pas exempt d’accalmies, ces passages plus posés où le grain de voix de McCombs montre ses capacités de modulations. Même si on sent bien que ce n’est pas là où le groupe a voulu s’étendre, c’est là où Soil retrouve les quelques intonations grungy (« Way Gone », le début de « Shine On » ou « One Love » dont les couplets ne sont pas sans rappeler Life Of Agony) dont il avait commencé à saupoudrer sa musique, lui faisant gagner quelques notes de mélancolie et dynamisant son propos. Soil sort même une surprise de son chapeau, sur « Wake Up » (avec Mike Mushok de Staind qui se fend d’un solo) où un refrain très « sautillant » est alterné avec un couplet plus gothique dans l’esprit, avec un chant qu’on pourrait rapprocher de David Bowie ou Nick Holmes (Paradise Lost). On pourra également noter l’exercice de style que constituent les paroles de « Amalgamation », puisque le chanteur s’amuse avec des noms de chansons issues de son passé avec Soil mais aussi Drowning Pool.

Soil a faim et il le fait savoir via cet album qui mise beaucoup sur l’énergie. Une énergie issue des retrouvailles entre des musiciens et un chanteur qui se nourrissent mutuellement. Mais aussi d’une envie de reconquérir le cœur des fans en exploitant les atouts qui ont fait sa réputation. Et avec le succès des recettes heavy rock alliant pêche et accroche (Stone Sour, Five Finger Death Punch ou même Hellyeah), Soil a clairement un trône à reconquérir.

Album Whole, sortie le 20 août 2013 chez Pavement Entertainment



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