Si son chanteur Bjorn « Speed » Strid a déclaré sur la scène du CCO que le dernier concert de Soilwork à Lyon devait remonter à « quelque chose comme huit ans », c’est pourtant bien en 2003 que le combo suédois a foulé les planches de notre chère Cité des Gaules pour la dernière fois lors d’un concert mémorable avec Children Of Bodom qui avait été donné dans un Ninkasi Kao plein à craquer.
Treize ans plus tard, et avec cinq albums supplémentaires dans la besace, Soilwork est donc de retour pour présenter son nouvel opus, The Ride Majestic, qui célèbre le vingtième anniversaire de cette formation qui respire le talent dans toutes ces composantes comme l’aura rappelé à nouveau (mais en était-il vraiment besoin ?) cette prestation du 19 décembre dernier avec HateSphere et T.A.N.K en guise d’ouverture.
Artistes : Soilwork – HateSphere – T.A.N.K.
Date : 19 décembre 2015
Salle : CCO
Ville : Lyon [69]
T.A.N.K. entre dans la salle sous l’acclamation de la foule ce qui est plutôt bon signe pour le reste de la soirée. Le combo français a une cohésion qui montre une véritable expérience scénique. Notamment grâce à son chanteur Raf Pener qui en impose et dont la présence éclipse presque les autres musiciens. Pour célébrer la dernière date de cette tournée, le frontman sortira une GoPro histoire d’immortaliser l’instant avec un public qui aura su mettre l’ambiance dans le pit. Après un set court mais intense, T.A.N.K. quitte la scène sur la musique du générique de Game Of Thrones pour laisser place à HateSphere.
A peine arrivés sur les planches, les Danois annoncent la couleur avec leurs riffs acérés. Le frontman n’a peut-être pas autant de présence que son homologue du groupe précédent, mais il a en sa faveur un certain humour et une bonne humeur sur scène qui fait plaisir à voir. Le style tend plus vers le hardcore, mais n’empêche pas le groupe de maintenir l’ambiance dans la fosse où les pogos et autres wall of death s’en donnent à cœur joie. Le fantasque Esse (chant) s’amusera de son côté à imiter le « mouvement de scène » du chanteur de The Black Dahlia Murder – le groupe a enregistré le titre « Iconoclast » présent sur l’album Murderlust (2013) avec le chanteur de TBDM Trevor Strnad – en parodiant son attitude scénique. Original de voir un chanteur se moquer publiquement d’un autre ! L’audience rigole et le public très réceptif le suit dans son délire, si bien que le chanteur adoptera cette gestuelle tout au long du morceau, en étant suivi par quasiment tout le public pour une bonne tranche de rire !
Après huit dates données en France au cours du mois de décembre – « On s’est battu pour faire cette tournée en France et putain on est content du résultat ! » dira à ce sujet le batteur belge Dirk Verbeuren au cours du set – Soilwork clôture sa tournée européenne avec ce concert de Lyon. Remontés à bloc, le sextet démarre par « The Ride Majestic », le morceau-titre qui ouvre son dernier disque sorti en août chez Nuclear Blast. Un opus qui sera bien mis en valeur ce soir puisqu’il composera presque un tiers de la setlist. Concernant cette dernière, difficile évidemment de contenter tous les fans losqu’on a comme Soiwork une discographie riche de dix albums ! Déjà qu’à la base il faudrait bien 2H30 de set pour entendre tous les hits du combo, vous imaginez comme cela peut être compliqué d’être complètement satisfait d’une setlist où au final la formation suédoise doit sélectionner, outre les morceaux de The Ride Majestic, seulement douze titres dans neuf albums aussi efficaces les uns que les autres…
Mais ne boudons pas notre plaisir en jouant aux grincheux de services, Soilwork a délivré ce soir une prestation de haute volée devant un public très actif qui n’aura pas cessé de slammer et de faire des circle-pits dans un CCO devenu une petite boule de feu vivante. Le set sera d’ailleurs vraiment monté en intensité au fur et à mesure que les minutes passaient. Pas tant grâce à la performance des musiciens dont l’investissement et la dépense d’énergie furent réguliers car placés sur le curseur maximal tout au long du set, mais surtout de par la manière dont le public est rentré dans le show. En effet il aura bien fallu trois ou quatre morceaux à l’audience lyonnaise pour se mettre en branle. Ainsi Bjorn « Speed » Strid avait beau tenter de lancer des circle-pits avec la main, l’audience était plus contemplatrice qu’actrice au début du show mais finira tout de même par se lâcher… et à bien se lâcher même !
Il faut dire que rester amorphe et juste spectateur à un concert de Soilwork doit vraiment être considéré comme un exploit ! Tout d’abord car la musique proposée par les Suédois est taillée pour l’intensité du live avec ses couplets hyper brutaux et ses passages mélodiques plus posés. Des changements de rythmes et une variété de compos dont la nervosité se ressent au sein du public qui sait bien (fans obligent) à l’écoute de ce maelstrom musical quand il va se faire dynamiter les fesses à coups de riffs assassins ou lorsqu’il va pouvoir hurler avec passion les refrains fédérateurs des Suédois. Et puis, sincèrement, comment rester insensibles à la prestation de chaque musicien de Soilwork ? Tous apportent leurs personnalités au sein de cette machine de guerre scénique dont on sent bien qu’elle a vingt ans d’expertise derrière elle. Figure de proue du combo, Speed est impérial derrière son micro en maniant à la perfection chant hurlé/growls et voix claire. Si rien que par sa carrure le frontman en impose (Speed est un grand costaud tatoué et rasé), c’est surtout sa capacité à changer de registre vocal en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire au cours des chansons du groupe qui impressionne le spectateur. Il est d’ailleurs saisissant de voir à quel point Bjorn Strid a progressé depuis les années 2000 pour arriver aujourd’hui à ce niveau vocal. Néanmoins, et sur un autre sujet, nous conseillerons tout de même au chanteur de moins cracher sur scène (par respect pour l’équipe de nettoyage de la salle) car parfois l’audience a vraiment l’impression d’avoir en face d’elle un Lama !
Mais si le frontman attire naturellement le regard de par son charisme, les autres musiciens ne sont pas en reste. Les deux guitaristes Sylvain Coudret et David Andersson sont à ce titre particulièrement impressionnants. Grâce à leurs capacités techniques évidemment – les deux zicos donnent le sentiment de jouer des parties faciles alors que toutes les parties de guitare du groupe sont diablement techniques ! – mais aussi grâce à leur présence scénique très énergique. Le profond plaisir des deux musiciens d’être là peut se constater sur ses deux visages complètement habités qui adoptent beaucoup de mimiques expressives (sourires continuels, yeux fermés pour ressentir au plus près le plaisir de jouer et partager sa musique, langue tirée etc.). Des attitudes parfois même surprenantes comme le fait de jouer tête contre avec leur bassiste Markus Wibom ! Véritable chien fou, ce dernier n’est pas en reste question dépense d’énergie avec ses cheveux longs et sa barbe qui apporte ce quotient poil qui fait défaut à Bjorn ! Mais surtout le grand Markus court partout et se démène sans cesse comme un beau diable en transpirant à grosse goutte. C’est le cas aussi du fabuleux Dirk Verbeuren derrière ses fûts qui martyrise ce qui l’entoure à coup de frappes précises et là encore techniques. Le batteur polyvalent ayant cette capacité à s’adapter à tous les registres présents dans les compos de Soilwork dont les rythmes peuvent aussi bien être heavy, groovy que black. Situé sur la gauche de Dirk Verbeuren, Sven Karlsson aux claviers est lui un peu plus en retrait au propre comme au figuré mais fait quand même le boulot en headbanguant frénétiquement quand c’est le moment.
Symbolisé par le magistral « Stabbing The Drama » où le public se déchaînera d’autant plus que Speed l’avait annoncé comme le dernier morceau du set, ce concert de Soilwork restera dans les mémoires pour sa chaleur et son dynamisme. Le groupe n’hésitant pas à ouvrir une bouteille de champagne pendant les rappels, pour célébrer dignement cette ultime date de la tournée, et à demander à l’audience d’ovationner HateSphere et T.A.N.K qui les ont suivi durant cette tournée, le crew de Soilwork… et même le groupe lui-même comme le demandera un spectateur ! Injonction à laquelle Bjorn répondra sur le ton de l’humour « Oui c’est vrai tu as raison car quand même c’est pas mal ce que l’on fait ! ». Le chanteur aura d’ailleurs communiqué avec son public tout au long du set avec une jovialité qui fait plaisir à voir.
Pas surprenant car Soilwork c’est avant tout ça : un groupe hyper charismatique, plein de tubes, dont les membres respirent aussi bien l’humilité que le talent et qui prend un pied incroyable sur scène. Un plaisir palpable, communicatif et donc partagé.
Setlist :
The Ride Majestic
Nerve
Bastard Chain
The Crestfallen
Death In General
Alight In The Aftermath
Tongue
Follow The Hollow
Petrichor By Sulphur
This Momentary Bliss
The Chainheart Machine
Stabbing The Drama
Rappels :
Let This River Flow
Late For The Kill, Early For The Slaughter
Rejection Role
Whirl Of Pain
Spectrum Of Eternity
Live report Soilwork : Amaury Blanc.
Live report T.A.N.K et HateSphere : Hub’.
Photos : Nicolas Gricourt.
A voir également :
Galerie photos Soilwork.
Galerie photos Hatesphere.
Galerie photos T.A.N.K..