En dépit de la morbidité récurrente de ses thèmes, Sylosis est ce qu’on peut appeler un arbre plein de vie. Forte de racines thrash profondément ancrées et de branches en pleine expansion, la formation britannique originaire de Reading a su grandir dans l’humilité, gagner en maturité pour désormais se distinguer du reste de la forêt. La métaphore n’a rien d’impromptue tant le groupe ne s’est jamais reposé sur ses lauriers, et a toujours su parfaitement où il allait, y compris dans l’indifférence de ses pairs. D’abord placardé de l’étiquette ‘thrash progressif’, le combo a depuis démontré son aisance à s’accommoder d’influences plus larges, notamment dans les veines death mélodique voire black pour certaines ambiances. Inéluctablement complexe mais savamment tempéré, ce patchwork musical aboutit à un style progressif, atmosphérique, teinté concurremment de mélancolie et d’énergie intense.
Sylosis a su oser, prendre en main sa destinée, éviter l’écueil de trop réitérer ce qui a déjà été, et donc insuffler un air de renouveau salvateur, à l’opposé de ce que le thème de Dormant Heart dénonce. Son concept central vise en effet les personnes dont les désirs de vie sont restés inassouvis, dont les cœurs sont restés endormis – d’où son titre – et qui se réconfortent à suivre sans contradiction la direction prise par le troupeau d’individus. De ce postulat se dégage une frustration et une colère refoulée. Ce sentiment fort se déverse tout le long de cet opus et transparaît allègrement dans la voix de Josh Middleton, guitariste, chanteur, compositeur et désormais producteur, qui une nouvelle fois donne tout ce qu’il a, que le registre de sa gouaille soit clair ou saturé. En outre, les morceaux, qui s’imbriquent de manière assez cohérente, entre frénésie thrash et ralentissements ambiancés travaillés, font de Dormant Heart l’album le plus riche en péripéties et ainsi le plus profond à ce jour de Sylosis.
Le combo partage ici sa force intérieure et se renouvelle sans douleur, parvenant même à rendre sa musique plus accessible qu’elle ne le fût sur un Monolith (2012) de haute volée, mais dispersé et coriace à digérer sur la longueur. Dormant Heart partage plutôt une atmosphère voisine de Edge Of The Earth (2011), lourde, dépressive (« Victims & Pawns »), à fleur de peau (les poignants « Undoctrinated » et « Mercy »), voire même ésotérique (« Dormant Heart », « Callous Souls »). Sylosis pousse le bouchon jusqu’à clore le disque avec « Quiescent », une longue chanson progressive et atmosphérique, consistant en de lancinants arpèges et lignes de guitare et une montée en intensité où Middleton lâche ses derniers cris de désespoir, le tout laissant place à un clavecin angoissant – que n’auraient pas boudé un maître du suspense comme John Carpenter. Les derniers instants peuvent coïncider avec le voyage somatique sans fin d’un individu plongé dans le coma, errant dans son inconscient et arpentant sans répit tous les couloirs de son labyrinthe mental à la recherche d’une sortie. Cette ultime séquence empreinte de mystère marque la conclusion d’une histoire et celle d’un opus captivant qui a fortiori ne devrait pas passer inaperçu en ce début d’année.
Visionner les clips des chansons « Mercy » et « Leech » :
Album Dormant Heart sortie le 12 janvier 2015 chez Nuclear Blast.
C’est vrais que le morceau Leech est vraiment cool!
Et puis ce clip… Juste excellent!
[Reply]
Merci de m’avoir fait découvrir le groupe, une vraie claque. Le morceau « Leech » est bien vite devenu un morceau que j’écoute en boucle…
[Reply]