Artistes : Tarot – The Man-Eating Tree
Lieu : Paris
Salle : Nouveau Casino
Date : 04/11/2010
Public : environ 150 personnes
C’est un set intimiste, pour ne pas dire complètement confidentiel, que les vétérans finlandais du heavy metal, Tarot, ont donné au Nouveau Casino de Paris en ce 5 novembre : salle minuscule, public extrêmement réduit… Mais là où d’autres auraient joué les stars et tout annulé à la dernière seconde (suivez mon regard – et les articles publiés récemment dans ces colonnes), nos amis de Kuopio, eux, se sont donnés avec autant d’énergie que s’ils s’étaient trouvés face à un Zénith plein à craquer.
Pour comprendre certaines expressions de la langue française, il faut parfois en faire l’expérience en direct. Ainsi, « une poignée de personnes » ne prend pleinement son sens que lorsque l’on pénètre pour la première fois dans un Nouveau Casino à moitié plein. Ce soir, les Finlandais de Tarot ne joueront en effet que devant cent cinquante personnes. Mais comme le dit le proverbe, la qualité prime sur la quantité, et le public de la soirée est composé de connaisseurs.
La première partie du concert est assurée par The Man-Eating Tree, groupe également originaire du pays des mille lacs et officiant dans le metal gothique et atmosphérique. Tuomas Tuominen, au chant, est un bon meneur de troupe et un chauffeur de salle plus que décent qui semble avoir parfaitement compris que, pour plaire aux Français, quelques mots dans la langue de Molière sont de rigueur. La musique proposée par les Finlandais ne brille pas par son originalité, mais la qualité est au rendez-vous, et le public ne s’y trompe pas : pour un groupe de première partie, l’accueil est chaleureux et certains spectateurs se montrent même particulièrement enthousiastes.
Pour son premier concert à Paris, The Man-Eating Tree est venu défendre son dernier opus, Vine. C’est avec une bonne dose d’humour que Tuomas incitera le public à se rendre au stand de merchandising pour acquérir ce nouvel album et ainsi venir en aide à de « pauvres musiciens ». À l’issue du set, le verdict est positif : à défaut de s’être constitué une fanbase solide, les cinq Finlandais auront au moins eu le mérite de chauffer agréablement le public avant la prestation de leurs aînés.
De l’aveu même des frères Hietala, Tarot est un groupe maudit : contrats en bois, arnaques, albums plus populaires au Japon que dans leur pays d’origine… Leur dernier concert à Paris, aux côtés d’After Forever et Die Apokalyptischen Reiter, avait même été annulé à la dernière minute par la faute d’un promoteur apparemment incapable de faire son travail. Autant dire que pour ce show-ci, il aura fallu croiser les doigts, toucher du bois et éviter de passer sous des échelles. Heureusement, cette fois, ni problème ni annulation à l’horizon !
Le show commence sous les acclamations d’un public toujours aussi restreint, mais dont l’énergie et l’implication ne se démentiront pas tout au long du set. Mais après un « Sleep In The Dark » à la patate idéale pour ouvrir un concert, la poisse légendaire des Finlandais revient frapper à la porte : les claviers de Janne Tolsa sont à cours de jus ! Heureusement, ce petit incident est rapidement résolu et le groupe enchaîne sur plusieurs titres particulièrement pêchus, dont « Satan Is Dead », titre d’ouverture du dernier opus, Gravity Of Light, et « Crows Fly Back », issu de l’album éponyme.
Mais à un concert de Tarot, la setlist est moins intéressante que les musiciens eux-mêmes. Les Savoniens sont réputés chaleureux et bavards. Marco Hietala en est l’illustration parfaite : l’homme remercie le public à la moindre opportunité et introduit chaque chanson par d’interminables discours qui font paraître relativement long un set qui, sans eux, aurait été trop bref. Et il se lâche : entre plaisanteries graveleuses, speeches politico-religieux et délires SF, le bassiste/chanteur à la barbe bifide semble trouver un formidable exutoire dans ce difficile exercice de style. Le public suit, répondant aux sollicitations et riant aux moments appropriés. Mission communication accomplie !
Réduire Tarot à Marco Hietala serait facile, mais ses quatre compères ne semblent pas l’entendre de cette oreille. À la guitare, Zach Hietala fait le show, marque le rythme et foule au pied toutes les lois anti-tabac françaises en grillant cigarette sur cigarette. Pecu Cinnari, quant à lui, se démène derrière ses fûts et s’autorise même un petit solo. Mais c’est Tommi Salmela qui, en tant que sampler et deuxième chanteur du combo, attire principalement l’attention. L’homme interprétera même à lui seul deux titres, dont un excellent « Calling Down The Rain », introduit par un discours que le plus jeune des Hietala aurait pu l’aider à composer.
Le groupe ne retrouve son sérieux que le temps d’un superbe « Tides », dont l’introduction au clavier pose immédiatement l’ambiance. Le titre tranche furieusement avec les chansons plus pêchues qui composent le reste de la setlist mais le rythme infernal imposé par le groupe n’en est pas rompu pour autant. Ledit rythme repart d’ailleurs bien vite, avec notamment un « Pyre Of Gods » électrique repris en chœur par le public. Lorsque arrive l’heure de « Crawlspace », Marco reprend les rênes et le micro pour critiquer tous ces artistes, évoluant dans le metal comme dans d’autres styles, qui n’annoncent la « dernière chanson » de leur concert que pour mieux se faire mousser pendant cinq minutes et revenir le temps de quelques rappels. Mais comme c’est une tradition, Tarot n’y dérogera pas.
Il est surprenant de constater combien cent cinquante personnes hurlant, sifflant et tapant sur la scène peuvent être bruyantes. Nos Finlandais ne s’y trompent pas et, comme promis, reviennent gratifier leur public de deux chansons supplémentaires, après une présentation du groupe drolatique assurée par Marco. Le concert se conclut ainsi avec « Warhead » et « Traitor », deux titres percutants qui font regretter que l’on doive s’en tenir là. Avant les saluts, Marco, pas rancunier d’avoir joué devant une salle à moitié vide, complimentera le public pour son énergie et son enthousiasme tout au long de la soirée.
En quittant les lieux, ledit public, à commencer par votre servante, s’interroge quelque peu sur l’absence curieuse de certains titres lors de ce concert. Un petit « Ashes To The Stars », par exemple, aurait fait merveille lors des rappels. Mais à cheval donné, on ne regarde pas les dents – en d’autres termes, considérant la qualité du show proposé ce soir par nos cinq amis finlandais, il serait malvenu de nous plaindre par rapport à la setlist !
Vous aviez cru que c’était terminé ? Eh bien non ! Les concerts, voyez-vous, c’est parfois comme les films : il faut toujours rester jusqu’à la fin du générique pour s’assurer que l’on n’a rien manqué. Ainsi les spectateurs partis sitôt les lumières rallumées ont-ils manqué un grand moment de convivialité : cinq minutes après leur sortie de scène, les Finlandais sont de retour, mais dans la fosse, cette fois, pour une rencontre avec leurs fans. Autographes, poignées de main, photos… Rien ne leur sera épargné, mais tous, les frères Hietala en tête, semblent y prendre un malin plaisir.
C’est donc une soirée particulièrement chaleureuse que Tarot aura offerte à ses fans. Comme quoi, il suffisait d’avoir la chance de leur côté, pour une fois !
Setlist de Tarot :
Sleep In The Dark
I Walk Forever
Satan Is Dead
Crows Fly Back
Tides
Calling Down The Rain
Hell Knows
Veteran Of The Psychic Wars
Pyre Of Gods
Rider Of The Last Day
Crawlspace
Rappels :
Warhead
Traitor
Photos : Julien Pérez
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