Mine de rien, le premier album des plus gothiques des Finlandais est sorti il y a plus de vingt ans. Que le temps passe ! Sauf peut-être lorsque vous êtes un vampire et que le rapport au temps est différent.
Pourquoi parler vampires ici ? Parce que les 69 Eyes, puisque ce sont d’eux qu’il s’agit, sont aussi connus pour être les vampires d’Helsinki. Des vampires dans la plus romantique des villes ? Que de frissons en perspective ! Alors sortez votre rimmel, vos teints blafards, vos cuirs et vos lunettes de soleil, et, lugubres et bossus, abandonnez vos gousses d’ail pour un rendez-vous non pas dans les marécages si chers à Higelin mais au Nouveau Casino de Paris pour voir comment les 69 Eyes célèbrent leur dixième album studio, simplement intitulé X, un « X » qui correspond au chiffre romain dix.
Dix, ce n’est pas rien surtout lorsque vous rappelez sur votre site qu’en guise de dixième album, les Rolling Stones sortirent Exile On Main Street, reconnus par beaucoup comme un chef-d’œuvre. En termes de référence, assurément, les Finlandais placent la barre haut. Audacieux. Périlleux ? Ils sont là ce soir, profitez en pour vous faire votre propre opinion.
Mais avant de goûter au goth’n’roll acidulé venu du froid et répondre à cette épineuse question, testons le Shock-Rock des Français d’Undercover Slut qui ouvrent le bal ce soir.
Artistes : The 69 Eyes – Undercover Slut
Date : 11 février 2013
Salle : Nouveau Casino
Ville : Paris
Deux crucifix ornent chaque côté de la scène, artifices où l’on sent le côté fait main, bon marché. Dès le début du concert d’Undercover Slut, lumière est faite sur leur utilité : deux filles vêtues d’une simple cagoule et d’une culotte y prennent position, les bras en croix, et y resteront pendant toute la prestation amenant un côté choc et sexe à cette première partie. L’effet est grossier, franchement pas très réussi et sans vouloir manquer de respect aux filles ni paraître misogyne, ce que le groupe nous montre est particulièrement banal, les corps exposés n’ayant pas une plastique si agréable que cela à regarder. Manque de budget pour avoir mieux ? Volonté assumée d’afficher du cul le plus cru, le plus banal possible, le cul de monsieur (madame) tout le monde ? Le commentaire peut vous faire hurler mais il questionne le rôle de ces deux filles et le but du groupe.
Pendant la prestation, Fotze, a priori dans un état second dès le début du concert, arrachera la culotte de la fille côté droit de la scène, s’allongera sous elle pour qu’elle s’abaisse, jambes élégamment écartées, jusqu’à ce son sexe soit à deux doigts du visage du bassiste. Odeur de soufre ? Pétard mouillé plutôt. Le délire pornographique du groupe est trop outré pour susciter l’intérêt d’un public venu saluer une tête d’affiche œuvrant dans un registre bien plus policé, loin de tout attentat à la pudeur.
Par ailleurs, la prestation du groupe est chaotique, marquée par un bassiste manifestement déchiré qui tombera sur scène, l’équilibre mal assuré. O, chanteur de ce chaos, fera comme à son habitude son petit tour dans la fosse histoire de secouer son monde mais rien n’y fera, cette prestation des Parisiens ne restera pas dans les annales. Au bout de trente minutes, la caricature de concert se termine et le groupe quitte la scène, sauf Fotze qui se dandine encore un instant, plus à une bouffonnerie près. Et la musique dans tout ça ? Passée au second plan. Dommage car les Parisiens ont pu montrer par le passé qu’ils pouvaient donner des concerts de bien meilleure tenue, vraiment intéressant, comme en première partie des Murderdolls à l’Élysée Montmartre en janvier 2011, par exemple. Espérons retrouver ce mordant dans un futur proche.
Le public très féminin de ce soir – et étonnamment international comme en témoignent les différentes langues parlées dans le Nouveau Casino – trouve assurément plus son compte quand Jyrki 69 et sa clique déboule avec le très enlevé « Love Runs Away » issu de leur dernier opus. Ray Ban miroitantes et tout de cuir vêtu, le chanteur assure au niveau look et sa voix chaude donne la teinte gothique à l’ensemble. Archzie à la basse et Timo-Timo portent eux aussi des lunettes de soleil. Tout de même, cet excès de lunettes noires donne un côté star distante un peu bizarre au combo.
L’animation et la communication avec le public passeront par le chanteur, Archzie et Timo-Timo restants discrets, dans leur rôle de musiciens, et Bazie décochant ses solos en bon guitar-hero mais sans trop d’exubérance. Par contre, ils ont la bonne idée de changer de côté de scène afin que chaque fan puisse voir tout le monde de près. Le plus excentrique reste Jussi 69 qui ne se contente pas de rester caché derrière ses fûts mais sort souvent sa tête hérissée pour haranguer les fans.
Côté fan, l’ambiance est plutôt sage même si les applaudissements sont très chaleureux et le public présent. Pas de mouvement de fosse dans laquelle on se tient sans souci, à son aise, aucunement tassé comme de belles sardines en boîte ; les vampires d’Helsinki n’ont pas fait le plein ce soir.
Le groupe déroule ses titres et « Betty Blue » ou « Dead Girls Are Easy » récoltent de chaudes réactions, le public applaudissant et chantant.
Jyrki 69, commerçant, n’oublie pas de rappeler la présence du stand de merchandising et y donne rendez-vous aux fans cinq minutes après la fin du concert… particulièrement si vous êtes une fille, précisera-t-il. Le joli « Borderline » issu de X que le groupe joue ensuite serait-il le coup de grâce pour faire craquer lesdites filles ?
Le concert continue son bonhomme de chemin à un bon rythme et le chanteur remerciera Undercover Slut avant de lancer le remuant « Dance d’Amour », applaudi par un public où les filles donnent de plus en plus de voix. Avec le très enlevé « Never Say Die », on sent l’excitation monter d’un cran et « Feel Berlin » avec son introduction où le chanteur se poste devant la batterie, dos au public, remporte les suffrages de la foule. Le solo arrache même des cris presque « patrick-brueliens » à quelques fans de la gent féminine, gent féminine venue nombreuse ce soir (vous l’aurez compris) témoignant de leur attrait pour le charmeur Jyrki 69 et son rock gothique et accessible. Le passage calme du morceau est salué par la foule, la reprise toute guitare dehors applaudie et les paroles chantées. Le groupe insèrera à l’occasion un peu du « Knockin on Heaven’s Door » de Bob Dylan.
Les Finlandais tirent finalement leur épingle du jeu même si l’on peut clairement arguer que leur musique est assez facile d’accès, que leur look bad boys donne une impression de surfait. Et même si la prestation reste très standard, elle est de qualité avec des lumières qui donnent parfois de très beaux effets et un son très propre.
Il est 22h05 quand la traditionnelle pause intervient. L’occasion une nouvelle fois pour le public de se manifester en jouant le jeu des rappels. Le retour du chanteur est salué et l’homme dit se sentir chez lui à Paris. Pourquoi ne pas le croire ? « The Chair » entame les rappels suivi de « Brandon Lee » lui aussi tiré de l’album Blessed Be. « Do you wanna rock ? » demande Jirky 69 avant que le groupe ne conclue cette setlist par « Lost Boys », setlist assez riche qui aura ciblé les années 2000 du groupe en mettant raisonnablement en avant le dernier album.
Finalement, ils auront offert un concert assez plaisant, sans grande surprise toutefois, à l’image de leur musique en quelque sorte, et qui aura tout de même eu le grand mérite d’avoir satisfait les fans présents. Mission accomplie donc.
Mais rentrons sans tarder car les vampires rodent et les gousses d’ail sont restées accrochées à mon portail.
Setlist de The 69 Eyes :
Love Runs Away
Perfect Skin
Tonight
Gothic Girl
I Love The Darkness In You
I Know What You Did Last Summer
Betty Blue
Dead Girls Are Easy
Black
Dance d’Amour
Never Say Die
Red
Feel Berlin
Devils
Rappel :
The Chair
Brandon Lee
Lost Boys
Photos : Lost
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