Maynard James Keenan est un dingue de travail, c’est un fait établi. Garder en vie trois groupes (Tool, Puscifer, A Perfect Circle) qui connaissent toujours un succès international conséquent et mener de front la vie d’un père de famille ainsi que celle d’un producteur de vin en pleine expansion n’est pas chose aisée. Mais Maynard est un homme de défi. Le prochain ne sera pas le plus simple non plus puisqu’il consistera à revenir sur ce qui l’a amené à être ce qu’il est aujourd’hui, à travers une autobiographie.
Mais c’est un challenge à la hauteur de l’homme. Finalement, ce qui est le plus difficile aujourd’hui pour lui, c’est d’évoquer et de faire avancer le projet qui l’a pourtant porté au firmament des icônes alternatives américaines, celui qui a rendu Maynard identifiable et infiniment respectable aux yeux de tant de personnes à travers le monde : Tool.
Dans une interview accordée au Phoenix New Times, journal local de la ville où il est désormais installé, Jerome, en Arizona, titrant « Keenan préfèrerait parler de ses autres groupes », il parle de tous ses projets, personnels et professionnels, comme son récent job d’éditorialiste dans ce même journal. Mais pas un mot sur le sujet qui intéresse le plus le public, ce qui apparaît finalement comme relativement évident, quand on connait un peu le personnage, qui aime constamment tromper son auditoire, apparaitre dissimulé par toutes sortes d’artifices sur scène, ou chanter tout un concert sans se retourner vers le public. Mais ce public justement est impatient. Il en veut plus de ce groupe qui a délivré sa dernière offrande, 10 000 Days, en 2006. Une éternité, en somme. Alors que tout ce que James Maynard Keenan veut mettre en avant pour le moment musicalement, c’est le prochain EP de Puscifer qui sort le 19 février prochain et une tournée sud-américaine et australienne en ce début d’année de Puscifer et A Perfect Circle, un groupe avec lequel il n’a rien enregistré de neuf depuis 2004 et un album de reprises, certes très riche, mais de reprises quand même.
Mais finalement ces projets sont moins au centre des préoccupations que ce fameux nouvel album qui, aux dernières nouvelles, selon le tenancier du site officiel, serait à moitié terminé. Mais restent à faire les fameuses parties de voix de Maynard, et c’est là que le bât blesse. Pourtant, le bougre s’est aménagé un studio dans l’endroit même où il fabrique son vin en Arizona : « Nous pouvons conserver notre côté irresponsable – le côté Rock Star – mais quand il est temps d’être responsables, nous pouvons l’être. Nous pouvons faire ce qui doit être fait. » Une manière donc de concilier ses activités dites « sérieuses » de producteur de vin et le côté plus fantasque d’artiste.
Et le prochain EP de Puscifer, Donkey Push The Night, s’annonce pour le moins croustillant : une reprise du mythique « Bohemian Rhapsody » de Queen, une autre reprise du « Balls To The Wall » d’Accept et deux titres inédits. Lui qui a choisi le mode de fonctionnement de l’EP avec Puscifer s’en explique aujourd’hui : « L’approche générale du projet a toujours été de faire quelques titres d’un coup et de les sortir. […] J’aime cette idée […] de se concentrer sur une ou deux idées et de sortir (sur disque, Ndlr) cette idée. » Alors tous les deux ans arrive aux oreilles du public un nouvel EP ou album, selon les envies du moment, le dernier en date étant l’album Conditions Of My Parole, sorti en 2010.
Ceci dit, quid du nouveau Tool ? Pour ce futur cinquième opus du groupe, la stratégie de communication du groupe est un peu la même que pour les précédents, à savoir proche du néant. Ou est plutôt une stratégie par le néant. En janvier 2001, alors que le groupe s’apprêtait à sortir son album le plus vendu à ce jour, le troisième, il répand lui-même sur le net la rumeur que l’album allait s’appeller Sistema Encéphale et comportera des titres comme « Riverchrist », « Musick » ou « Coelacius ». Finalement, l’album s’appelle Lateralus, ne comporte aucun de ces titres et sera n°1 dans les charts du Billboard américain lors de sa semaine de sortie. Il en fut de même pour 10,000 Days, ou presque rien ne filtrera avant les tout derniers jours qui ont précédé la sortie de l’album. L’aura particulière du groupe auprès du public résonne tout particulièrement notamment à travers cette absence volontaire de divulgation d’information. Le public, finalement, réclame quelque chose qu’il admire par ailleurs.