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Interview   

Tungs10 carbure


Tungs10, groupe originaire de Morlaix, dans le Finistère, n’a que quelques années d’existence et est pourtant déjà très actif et prolifique, avec deux albums sous le coude et n’ayant pas attendu longtemps – seulement quelques mois – avant de monter sur les planches. A l’occasion de la sortie du nouvel album, nous avons pu revenir sur cet intense démarrage et sur le maintien de ce rythme.

Ayant toujours un coup d’avance sur sa carrière, la formation bretonne se verrait bien continuer sur la voie qu’a entrouverte ce concept album, sur le thème grave du deuil, qu’est The Lost Manuscript, tant l’expérience s’est montrée inspirante.

Entretien avec Cédric, guitariste/chanteur et élément central de la formation.

« Nous avons toujours des projets en cours. L’idée est aussi de toujours avoir un truc prévu derrière le projet que nous venons d’achever. »

Radio Metal : Le groupe a été créé en 2015 et compte déjà deux albums à son actif. Les choses se sont finalement très vite enchaînées pour vous. Dirais-tu que c’est le résultat d’un concours de circonstances, ou y avait-il dès le départ une volonté d’aller vite et d’enchaîner ?

Cédric Andreolli (guitare & chant) : Il y avait en effet dès le départ une volonté d’aller vite. Pour te donner un peu la timeline, ça a commencé mi-2015 aux alentours de juillet-août, et nous voulions partir sur des concerts tout de suite. Donc nous avions monté un set de quarante-cinq minutes de compo pour le mois d’octobre, et nous avons commencé à faire des concerts dès le mois d’octobre pour prendre un peu d’expérience ensemble sur scène. Nous avions tous fait de la musique avant, mais c’était pour déjà roder le truc. Et puis nous avons voulu très vite aller sur un premier clip, pour avoir aussi l’aspect visuel, pour commencer à travailler l’image qui allait avec, donc ça s’est enchaîné assez vite. Et ça a enchaîné derrière sur le premier album.

Dirais-tu que cette activité très dense vous a permis de très vite vous faire une place sur la scène metal ?

En tout cas, en Bretagne, oui, nous avons réussi à nous faire une place assez vite. Le projet que nous avons monté, nous avons essayé de le monter de manière assez complète. Nous voulions faire de la scène assez vite, mais nous avons aussi très vite pu investir dans des jeux de lumière avec des trucs qui étaient cadencés sur ce que nous jouons. Nous avons aussi essayé de travailler notre style vestimentaire. Nous avons essayé de monter un projet qui n’était pas professionnel, mais qui avait une tronche un peu professionnelle assez vite, qui nous a déjà permis de nous faire remarquer par les assos locales qui organisent des concerts, et donc de nous faire une place – je sais pas si nous avons une « place » en Bretagne, mais en tout cas, je pense que si tu parles de Tungs10, déjà dans le Finistère, c’est sûr, mais en Bretagne aussi, les gens connaissent.

Ressentez-vous le besoin de vous poser un petit peu, ou au contraire voulez-vous battre le fer tant qu’il est chaud et continuer à ce rythme-là ?

Nous avons toujours des projets en cours. L’idée est aussi de toujours avoir un truc prévu derrière le projet que nous venons d’achever. Donc là, nous sommes sur la phase de promo de l’album, nous allons enchaîner avec des dates, et je pense que dès cet été, nous allons nous mettre à travailler sur les prochains clips. Nous avons prévu d’en sortir encore deux autres sur cet album-là. Nous allons aussi faire des covers, des choses comme ça, donc ce ne sera pas forcément sous le format d’un autre album, peut-être même pas dans les deux ans à venir, mais en tout cas il y aura d’autres choses. Nous allons alimenter les réseaux sociaux, mais aussi les concerts, pour proposer des choses nouvelles au fur et à mesure.

Souvent, lorsque l’on est en flux tendu comme ça, que ce soit dans la musique ou dans d’autres activités professionnelles, on ne ressent pas forcément la fatigue sur le moment, ni la lassitude. Mais au moment où l’on s’arrête, il y a une fatigue intense qui nous tombe dessus d’un coup, du fait de la descente en pression. Est-ce que c’est quelque chose que vous avez déjà vécu, ou bien c’est quelque chose que vous appréhendez pour le moment où vous allez relâcher un peu ?

Ce sont des choses que nous avons appris à gérer aussi. J’ai fait toute la partie enregistrement, mixage, mastering de l’album, et effectivement, j’ai passé deux mois un peu compliqués, où je faisais des nuits de quatre heures, des trucs comme ça. Après, je récupère assez vite, donc je n’ai pas forcément des phases de déprime ou des choses comme ça après un gros projet de ce genre. Et puis le fait que nous l’alimentions toujours d’autres projets, ça permet de toujours avoir un objectif à venir, et de ne pas tomber dans une phase où l’on ne sait plus trop quoi faire. Nous nous adaptons aussi aux impératifs. Par exemple, Madeleine, la chanteuse, était partie l’an dernier pour faire un petit voyage qui durait un an, et c’est ça qui a déclenché le deuxième album. Nous aurions peut-être attendu quelques mois de plus, mais le fait que nous ayons un an sans concert, nous nous sommes dit que c’était le moment pour travailler sur le deuxième album, plutôt que de laisser tomber et de laisser le truc en pause pendant quelques mois.

Concernant l’album, le fil rouge est une histoire à propos d’un homme qui se lance dans la quête de ressusciter sa femme, et l’inspiration est Frankenstein. Peux-tu nous parler de comment est venue cette idée d’histoire ?

Nous avons commencé à parler de l’album il y a un peu plus d’un an, et nous voulions marquer le coup sur le côté post-apocalyptique. Puis en discutant, nous faisions le point sur les différents thèmes que nous pouvions évoquer, puis ce thème-là est apparu, et tout de suite, nous avons réussi à développer une sorte d’histoire qui nous paraissait sympa là-dessus, et c’est comme ça que c’est parti. C’est assez simple.

Même si la résurrection est le fil rouge de l’histoire, sans trop spoiler la fin, la vraie réflexion de l’album, c’est le désespoir lié au deuil. Quel est le message que tu as voulu faire passer sur ce thème-là ?

Déjà, ce n’est pas basé sur une expérience personnelle, mais effectivement, c’est tout le cheminement du personnage qui passe par une phase de déprime, qui essaye de comprendre pourquoi ça s’est passé, et qui va essayer de trouver comment ramener sa femme à la vie. Et nous trouvions rigolo de détailler chacune de ces étapes, et puis il fallait de toute façon prendre un peu son temps dans le développement de l’histoire. Nous voulions faire entre dix et douze morceaux, donc nous avons un peu réfléchi ; avant de commencer à écrire les morceaux, nous avions déjà un peu partitionné le truc, en nous disant que ça serait bien que tel morceau parle de ça, qu’il faudrait que tel morceau permette de faire avancer l’histoire, etc. Donc effectivement, c’est comme ça que ça s’est fait, de façon très naturelle.

« C’était la première fois que je participais à un projet comme ça, et au final, […] au lieu de rendre la chose complexe, ça a plutôt rendu l’écriture un peu plus simple. »

Musicalement, il y a un côté épique, fantastique, héroïque. Est-ce que le fait d’avoir une histoire en fil rouge est une étape obligatoire pour écrire une telle musique et créer une telle atmosphère ? Penses-tu que ça soit impossible d’écrire une musique pareille sans qu’il y ait d’histoire derrière ?

Je ne pense pas, en tout cas pour la partie composition, étant donné qu’il y avait deux morceaux où l’idée était déjà posée avant que nous ne commencions à parler de tout ça. Par contre, c’est vrai que ça permet aussi d’avoir une sorte de cohérence, ou en tout cas d’essayer de créer une cohérence et de donner un petit côté épique, fantastique un peu plus important, et ça a certainement influencé certains arrangements, parce que du coup, ce que nous avons fait, c’est que les morceaux ont été composés sur à peu près deux ou trois mois, puis nous avons fait six mois d’arrangement, nous les avons décortiqués intégralement, nous les avons passés à la moulinette pour travailler les synthés, retravailler les riffs, essayer de faire quelque chose qui soit le plus abouti possible. Donc là, quand nous avons fait entre autres les choix de synthés, le fait de rajouter des chœurs d’opéra, des choses comme ça, tout ça a certainement été influencé par le fait que nous avions cette histoire, pour renforcer comme tu dis le côté fantastique.

Dirais-tu que le fait que vous ayez à gérer un storytelling rende votre travail de musicien plus difficile ? Dans la mesure où en plus de ce qu’il faut faire sur la musique, c’est-à-dire la musique, les textes, tous les aspects liés au métier, il faut en plus de ça gérer le storytelling…

Oui et non. C’était la première fois que je participais à un projet comme ça, et au final, ça a rendu l’écriture des textes presque plus facile parce que nous avions défini les sujets avant même de composer les morceaux. Du coup, nous nous sommes ensuite adaptés à l’histoire que nous voulions raconter, donc nous avions déjà les thèmes pour chaque morceau. Donc ça a plutôt été l’inverse : au lieu de rendre la chose complexe, ça a plutôt rendu l’écriture un peu plus simple, en tout cas pour les thèmes des morceaux. Parce que sinon, ce n’est pas forcément simple quand tu n’as pas de fil rouge sur ton album, comme c’était le cas sur le premier album. Tu as assez vite fait de retomber dans les mêmes sujets, et ce n’est pas facile, je trouve, d’avoir de l’inspiration sur des sujets différents et qui ne sont pas liés les uns aux autres.

Penses-tu que vous allez renouveler cette formule-là sur les prochains disques ?

Nous n’en avons pas encore parlé, mais certainement, oui. Le fait de l’avoir fait, ça a aussi influencé le design de la pochette, les clips aussi. Sur les trois clips que nous allons faire – enfin, il y en a déjà un qui est sorti – , nous allons aussi raconter l’histoire, donc nous allons a priori trouver les mêmes personnages qui vont évoluer sur les différents clips. Donc ça permet d’avoir un projet un peu plus abouti.

En termes d’influences sur les groupes qui mélangent la musique et une histoire racontée sur un album, quels seraient les groupes qui ont le mieux réussi la combinaison des deux ?

Je vais te répondre, mais ça sera un avis personnel, c’est Systematic Chaos de Dream Theater, qui était déjà un peu dans ce truc-là, et que j’avais trouvé sympa. Sinon, il y a aussi Lacuna Coil, qui est beaucoup plus dans le style de musique que nous faisons, et qui a dans son dernier album une sorte d’histoire, qu’ils essayent d’ailleurs de transcrire dans certains clips, et qui évolue comme ça.

À propos de toi, tu es multi-instrumentiste, et ça t’aide beaucoup à écrire la musique du groupe. Dirais-tu que le fait de toucher un peu à tout est un gage de recul et te donne une meilleure vision d’ensemble ?

Je ne sais pas si c’est un gage de recul. Après, je nuancerais le côté multi-instrumentiste. Je peux faire de la guitare, un peu de basse, etc., mais je ne suis clairement pas bassiste, par exemple. J’ai juste des connaissances suffisantes pour être capable d’avoir déjà une première version du morceau avec batterie, basse, et des choses comme ça. Mais pour revenir à la question, je ne sais pas si ça donne du recul. Ça donne probablement une certaine vision du truc, et le fait d’aller trop loin tout seul dans le morceau, ça peut justement être un problème, parce qu’on est trop impliqué dans le truc. Donc c’est pour ça que nous avons passé six mois à faire les arrangements, où nous étions vraiment tous ensemble, et où nous avons vraiment explosé les morceaux, et nous les avons retravaillés, nous avons changé les structures, nous avons changé les synthés, nous avons changé plein de choses, parce que je pensais justement que je n’avais pas le recul nécessaire.

Dirais-tu que sur le groupe, tu as une position de leadership, vu que tu écris la majeure partie des choses ?

Nous avons tous des rôles différents. Sur toute la partie organisation, c’est vrai que je suis pas mal impliqué, mais c’est aussi le cas de Madeleine, de Pierre-Yves, de Charles, nous avons tous des choses assez différentes, être présents sur les concerts, essayer de communiquer, de participer à la vie du groupe, de l’association, mais nous sommes tous impliqués sous des formes différentes.

Interview réalisée par téléphone le 14 juin 2019 par Philippe Sliwa.
Transcription : Robin Collas.

Facebook officiel de Tungs10 : www.facebook.com/pg/tungs10theband.



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