Sur le papier, Ultraphonix a de quoi allécher. Enième projet de l’inarrêtable Georges Lynch (Dokken, Lynch Mob, KXM), la formation réunit le guitariste associé au chanteur de Living Colour Corey Glover, ainsi que le batteur Chris Moore (Cry Wolf, Damage, DeathRiders) et le bassiste Pancho Tomaselli (War, Philm). Un groupe éclectique en somme. Georges Lynch a d’ailleurs déclaré à propos de l’album, intitulé Original Human Music, qu’il « ressemble à une fusion des premiers Red Hot Chili Peppers qui rencontrent King Crimson et Judas Priest ». Un menu varié et insolite en somme.
George Lynch n’a pas menti. Ultraphonix part dans tous les sens, guidé par un Corey Glover qui n’a rien perdu de sa superbe. La production, coréalisée par Bob Daspit (Sammy Hagar) est à ce titre remarquable de polyvalence. Original Human Music s’ouvre par un hard rock classique via « Baptism » qui va puiser dans un feeling très King’s X (Doug Pinnick et Corey Glover entretiennent des similarités de timbre flagrantes). Pour ce qui est de créer des chansons efficaces sans ambages, George Lynch n’a rien a prouver à personne. « Baptism » est une entrée parfaitement balisée pour l’auditeur qui laisse entrevoir les points forts de la formation, à savoir le jeu épuré de Chris Moore et le talent mélodique du bassiste Pancho Tomaselli, à qui le guitariste laisse beaucoup d’espace. Tomaselli s’illustre davantage sur le groove d’ « Another Day », effectivement très proche des morceaux plus relax des Red Hot Chili Peppers où Corey Glover oscille entre le Mike Patton crooner et Anthony Kiedis. On appréciera le jeu de guitare sur les couplets, idée géniale faite d’arpèges aux doigts pseudo-hispanisants. Ultraphonix joue avec les formules, puisque de tonalités flamenco ultra-mélodiques, il arpente des terres plus rudes avec « Walk Run Crawl », sorte de fusion entre un refrain très heavy metal contemporain (on peut penser aux morceaux plus modernes de Judas Priest, pour reprendre une référence citée par Lynch), avec une guitare qui renvoie légèrement au nu-metal tel que le pratiquait Korn avec ce son sous-accordé et très creusé. Le premier single du groupe (qui laissait croire, à tort, à un projet dans la veine de KXM) a toute l’accroche que son statut doit avoir. Corey Glover se fiche bien de savoir dans quel registre s’illustrent les musiciens : il sait tout faire sans difficulté. Frustrant pour les apprentis-chanteurs, ô combien appréciable pour l’auditeur. Y compris lorsqu’Ultraphonix prend des virages pop-folk tels que « Heart Full Of Rain » (où la basse joue le rôle de fil mélodique pendant que Glover s’adonne à quelques acrobaties) ou progressifs tels que « Free » et ce riff saccadé qui renvoi des airs du « Kashmir » de Led Zeppelin.
« Free » symbolise l’étendue de la réussite d’Ultraphonix : l’absence de limite liée aux genres et l’une des plus grandes diversités qu’il ait été donné de voir sur un album de rock. Du rock-psyché-jazzy de « Free » précédé par du heavy et de la soul/funk, on transite par un « Wasteland » qui est un récital d’effets de la part de George Lynch avec un pont aux airs d’électro (qui pourtant ne l’est pas) qui remémore l’audace de Tomahawk. Les multiples arrangements de voix qui s’enchevêtrent surviennent comme si de rien n’était et transforme un titre aux accents rock évidents en véritable transe. Il ne faut pourtant pas trop se laisser entrainer, car Ultraphonix apprécie les ruptures radicales : « Take A Stand » revient à une sorte de funk « crimsonien » porté par un duo basse/batterie comme on en fait plus depuis les années 90. De quoi faire sourire ceux qui se sont essayés à la quatre cordes en s’abreuvant de Les Claypool, de Marcus Miller et de Victor Wooten. Original Human Music peut même se permettre un petit interlude fusion-stoner grâce à « Ain’t Too Late », sorte de Living Colour revisité avec une basse bien grasse (penser « Deeper Underground » de Jamiroquai avec moins d’overdrive) et un son de guitare des premières heures de Kyuss, le crunch et la folie de George Lynch en plus. Encore une fois, les arpèges de basse de Pancho Tomaselli font mouche et tiennent le couplet à eux-seuls.
Original Human Music est une véritable mine d’or. Chaque titre illustre une idée marquante et malgré l’extrême diversité que prône Ultraphonix, le tout est consolidé par Corey Glover qui fait office de pilier, gage de cohérence. Certes, Ultraphonix renvoie à la fusion des années 90 et à tous ces croisements de genres débridés à la Infectious Grooves, Living Colour et consorts. La subtilité réside dans la qualité d’écriture des chansons, qui ne se perd jamais malgré l’arsenal d’artifices déployé. Original Human Music est certes un peu « fou », il ne déstabilisera qu’un temps avant de révéler toute sa valeur. À vouloir tout faire, parfois on y arrive.
Lyric video de la chanson « Free » :
Clip vidéo de la chanson « Another Day » :
Clip vidéo de la chanson « Walk Run Crawl » :
Album Original Human Music, sorti le 3 août 2018 via earMUSIC. Disponible à l’achat ici
excellent original une réussite en tout point .je confirme tout ce qui a été dit dans le commentaire plus haut . Néanmoins George Lynch reste un maitre en matière de six cordes il peut jouer tout les registres et reste très prolifique pour notre plus grand bonheur auditif .
Ceux qui aiment penchez vous sur les deux kxm vous serez pas déçus .
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En découverte en ce moment même. Je sens que ça va me plaire…
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très très bon…
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