« Déjà-vu » : voilà une expression qui parlera très certainement à Michael Poulsen, tout adepte de la culture américaine qu’il est et qui caractérisera l’esprit général de ce sixième album de Volbeat. Tourner en rond dans une carrière discographique avec une recette qui marche est propre à de nombreux groupes de rock sans que cela ne pose de problème majeur à leur public, tant que la continuité qualitative est présente : AC/DC ou Slayer, pour ne citer qu’eux le prouvent depuis des décennies. Poulsen montre avec le temps qu’il veut vouer Volbeat à devenir une de ces entités, lui qui pourtant interpellait la scène metal internationale avec les excellents Rock The Rebel/Metal The Devil (2007) ou surtout Guitar Gangsters & Cadillac Blood (2008) où même les metalleux les plus straight prenaient un malin plaisir à fredonner des ritournelles gentillettes encadrées de riffs thrash musclés. Trois albums plus tard, la surprise n’est plus là et ce sombre sentiment d’être déjà passé par là en écoutant cette nouvelle offrande laisse forcément sur sa faim.
« Seal The Deal » (Scellons l’affaire), première partie du titre de l’album est en fait un non-sens : l’affaire, Volbeat l’a déjà bouclée dans son style caractéristique avec la complicité d’un Rob Caggiano qui fait désormais partie intégrante du projet et dont on se demande ce qu’il pense de cette multiplication de refrains pour chansonnettes façon Sum 41 ou Blink 182 lors d’au moins les neuf premiers titres de ce nouvel album. Michael Poulsen a toujours utilisé cette façon de chanter sur un bon nombre des titres de la discographie de Volbeat ; pourtant, cette fois-ci, il l’utilise jusqu’à l’écœurement. L’impression franche est que ce bon vieux Rob, tout droit sorti d’une grosse dizaine d’année avec Anthrax, lui aurait jeté à la figure en plein studio : « Hey, Michael et si on se sortait les doigts pour faire un vrai titre qui rentre dedans ? » Et à cela Michael aurait répondu : « OK, j’en ai encore des comme ça dans ma panoplie, tu sais ? ».
Et avec « Battleships Chains » on retrouvera le groove caractéristique, la dynamique éclatante de Volbeat, celle qui fédérait le peuple metal et faisait remuer la tête comme sur l’« Hallelujah Goat » de Guitar Gangsters. Du power rock certes peu agressif, mais avec une mélodie formidablement accrocheuse et une vraie qualité de composition. Le sentiment de « retrouver » Volbeat se confirmera avec un « The Loa’s Crossroad » enfin plus costaud, où l’on verra Caggiano s’exprimer un peu plus dans les riffs et une vraie originalité dans ce gros couplet de basse saturée qui tâche. Et avant ça, on se sera peut-être laissé emporter par le hit simple mais efficace « Seal The Deal » aux allures parfois du « Fuel » de Metallica.
Trois titres et puis c’est quasiment tout. Pour les dix autres, la voix de Poulsen prendra toujours le pli sur le reste, faisant presque oublier ce couple basse-batterie qui tourne sans anicroche et une production dénuée de défauts majeurs. Le chant « gentillet » de Poulsen vampirise presque tous les titres ; en témoigne ce « The Gates Of Babylon » qui démarrait sous les meilleurs auspices avec son ambiance orientale et ses riffs acérés, mais qui chute dès le refrain dans une sorte de niaiserie vocale anéantissant toute forme d’effort metal ou l’introducteur « The Devil’s Bleeding Crown » et sa lourdeur sudiste initiale qui laissait pourtant présager du meilleur.
Il n’est pas question de chercher systématiquement des traces de metal dans tous les titres et attendre désespérément que les débats deviennent plus vifs : Volbeat a le droit de pratiquer le rock qu’il souhaite même si celui-ci est très édulcoré. Cependant, il s’agit bien d’une écriture en deçà de tout ce qu’on a connu de Volbeat jusque-là dont on parle malheureusement ici. Quand Poulsen donnait une ambiance western spaghetti à l’univers du groupe avec Outlaw Gentlemen & Shady Ladies, Volbeat ne sonnait pas forcément plus metal mais développait un concept avec un grain caractéristique et des ambitions réelles dans l’écriture.
Et c’est bien le souci majeur de ce Seal The Deal & Let’s Boogie : on cherche au gré des quatorze titres l’ambition du disque, au-delà d’une soupe répétitive pour midinettes des 90’s. Cet aspect du groupe, à savoir des morceaux rock avec un chant typé punk californien, existait avant, mais on a la désagréable impression qu’il a été érigé cette fois-ci au centre de l’univers Volbeat en saupoudrant quelques artefacts autour : le chant danois de Johan Olsen en guest et le banjo qui donne un aspect folklorique à « For Evigt », la cornemuse de « The Loa’s Crossroad », les chœurs souls qui donnent un peu d’envol à « Goodbye Forever » ou le sale gosse Danko Jones qui vient apporter son grain de sel à « Black Rose », mais tout ceci se fait sans grande cohérence, arrivant souvent comme un cheveu sur la soupe, contrairement aux tentatives précédentes (le banjo avait, par exemple, plus de sens sur Outlaw Gentlemen & Shady Ladies).
En dix ans d’existence, Michael Poulsen aurait-il déjà usé le concept de Volbeat et se réfugierait-il dans une simplicité déconcertante de l’écriture ? Plus les espoirs dans un groupe sont grands, plus dure est la chute quand il déçoit. Et soyons clairs : on a déjà, hélas, rapidement hâte de voir à quoi ressemblera la suite.
La lyric vidéo pour la nouvelle chanson « Seal The Deal » :
Le clip vidéo de la chanson « The Devil’s Bleeding Crown » :
La lyric vidéo de la chanson « For Evigt » (feat. Johan Olsen) :
La lyric vidéo de la chanson « The Bliss » :
Album Seal The Deal & Let’s Boogie, sorti le 3 juin 2016 via Republic Records.
Quelqu’un pourrait-il m’ expliquer comment et pourquoi Volbeat peut être tête d’ affiche des plus gros fest européens?
Un article à charge. Comment reprocher à Volbeat de ressasser la formule jusqu’à plus soif puisque vous reconnaissez vous même qu’il y a un certain nombre de groupes qui s’inscrivent dans cette démarche ?
Je trouve cet album meilleur que le précédent. Oui ils n’évoluent pas. Et alors ? Ce que j’aimais avant est toujours valable. Ca fait un peu hater tout ca : chanteur à midinettes, pas assez metal…
Franchement on s’en fout de tourner en rond tant que c’est bon
en accord avec la critique. Ici , Poulsen , que j’aime beaucoup, en fait des tonnes.
trop de titres , trop de titres pop , trop d’accent Hetfieldien (ou alors c’est l’inverse : c’est Poulsen qui aurait influencé James sur sa façon de chanter actuelle ? et pourquoi pas?) trop de lignes de chant . faut laisser un peu de place aux collègues . Caggiano fait bizarre dans le tableau . il ne correspond pas du tout à l’image du combo danois.
Au bout de quelques écoutes, l’ album est bon mais tout est du déjà vu/déjà entendu.Plus d’effet de surprise . Maintenant , ce mélange Metal/Rock/Boogie a aussi ses limites et justement nous y sommes avec ce nouvel opus.
comme disait le grand Bernard Blier: « on tourne en rond , merde ; on tourne en rond,merde ; on tourne en rond ,merde … »
je reste optimiste sur le fait que Poulsen remettra tout le monde d’accord sur le prochain coup en studio . Par pitié , pas de live ou autre dvd inutiles pour faire passer la pilule.
Super article qui résume exactement le sentiment que j’ai eu à l’écoute de cet album…très déçu car grand fan de Volbeat depuis les débuts du groupe.
De même j’ai regardé le concert au Rock Am Ring diffusé sur Arte, et j’ai eu le même sentiment de manque de pêche et d’envie …. c’est dommage. Surtout que j’ai usé le DVD de 2007 « Live, Sold, Out » et quel plaisir de voir ce groupe avec une telle envie d’en découdre, une joie, un réel plaisir de jouer et un vent nouveau et frais dans le monde du Metal…c’est dommage…