Il ne faudrait pas se laisser tromper par un nom aux allures assez stupides (non, mais qui irait sérieusement s’appeler « Nous beurrons le pain avec du beurre » ?!), We Butter The Bread With Butter masque cette particularité patronymique sous une belle couche de compos sans gras ajouté. Et ce ne sont pas non plus leurs mèches de coreux qui doivent vous faire croire que ces Allemands n’ont à offrir qu’une énième version d’un mouvement en vogue et que rien ne les distingue. Il y a déjà un sens de l’humour qui explique ce nom qui voulait d’abord tourner en ridicule les groupes aux intitulés à rallonge apparus ces dernières années ; puis une certaine audace en mêlant l’électronique au metal, à une époque où de telles expérimentations se prennent fréquemment des volées de bois verts de la part d’une frange conservatrice de la communauté metal. Mais qu’importe la réaction, tant qu’il y a une réaction.
Et finalement, plus qu’à la branche metalcore actuelle, c’est presque à la suite d’une certaine tradition de musiciens metal d’outre-Rhin qu’il faudrait les inscrire : l’électro-metal/indus de formations telles que Rammstein ou Oomph! avec lesquels ils partagent un autre choix artistique : ne pas sacrifier sa langue natale à l’Anglais souverain du monde du rock. Chez WBTBWB, l’Allemand est un instrument en soi.
On en parle avec Maximilian Pauly Saux, le bassiste de la bande qui nous avoue, en effet, bien aimer le pain beurré au petit-déjeuner…
Radio Metal : Comme je l’ai lu dans la biographie du groupe, le groupe était à la base supposé être une blague mais est devenu un duo musical plus sérieux. Avez-vous pensé à changer le nom du groupe, qui est plutôt marrant et étrange ?
Maximilian Pauly Saux (Basse) : Ouais, en fait Marcel [Neumann, guitariste] a fondé le groupe, et à l’époque, il y a à peu près cinq ans, c’était une sorte de mode d’avoir des noms de groupes très longs et qui ne voulaient absolument rien dire. La plupart du temps c’était quelque chose de brutal, de très mauvais, et nous, nous étions juste des mecs normaux alors nous nous sommes dit : « OK, choisissons quelque chose de normal, une chose à laquelle on pourrait s’identifier » et c’est ce long nom We Butter The Bread With Butter [NDT : nous beurrons le pain avec du beurre]. [Rires]
Vous jouez un mélange de metalcore, de deathcore et de musique électronique. On sait que les fans de metal peuvent être très conservateurs. Avez-vous déjà eu des réactions très mauvaises de la part de ces derniers pour avoir mélangé du metal avec des sons électroniques ?
Toutes les réactions ont été très mitigées. Nous avons toujours eu des opinions de gens qui adorent le mélange de différents genres de musique, mais évidemment beaucoup de gens sont très irrités et choqués par le fait que nous essayons de jouer un peu avec ces différents genres. Mais je dois dire que nous sommes plutôt contents que les réactions soient telles jusqu’à présent, parce que dans le fond, tout le monde a une opinion sur le sujet et ça veut dire qu’ils ne vont pas l’oublier de sitôt. [Rires] Et en fait on aime beaucoup, car peu importe ta réaction à notre album, tu as une réaction.
Tu as rejoint We Butter The Bread With Butter alors qu’il s’agissait seulement d’un duo avec Marcel et Tobias comme uniques compositeurs. Tobias a désormais quitté le groupe et il ne s’agit plus d’un duo mais d’un vrai groupe alors peux-tu nous dire comment a évolué votre façon de travailler au cours des années?
Eh bien, ça a beaucoup changé, et pas uniquement parce que nous sommes un groupe complet maintenant. En tant que groupe, nous avons vécu beaucoup de choses ensemble, comme en faisant des tournées pendant de longues années. Et quand je dis de longues années, je veux dire trois ou quatre ans. Et nous avons été inspirés par beaucoup de supers groupes avec qui nous avons eu la chance de partir en tournée, par exemple Slipknot ou Trivium, et avec tous ces trucs, notre amitié s’est approfondie et ça nous a donné l’opportunité de trouver notre propre motivation. Nous faisons tous partie de ce procédé qui a fait évoluer notre musique, et je pense que ce que nous faisons à présent est différent du type de musique que les gars faisaient à l’époque où ils étaient encore un duo. Parce qu’il y a plus d’opinions dans le groupe, évidemment, mais aussi parce que nous pesons toujours le pour et le contre des choses avant de nous plonger dedans.
Kenneth a quitté le groupe, et pourtant vous n’avez toujours pas annoncé de remplaçant. Ne voulez-vous pas prendre un nouveau guitariste ?
Non. [Rires] Quand on a viré notre dernier guitariste rythmique nous étions – il faut le dire – très heureux de n’être plus que quatre dans le groupe parce que maintenant nous avons une meilleure présence scénique, de notre point de vue, sans une deuxième guitare. Au niveau du son, ça marche plutôt bien, les instruments se complètent vraiment les uns les autres, d’après nous. Tout du moins c’est ce que l’ingénieur du son nous raconte ; peut-être qu’il nous ment ! [Rires]
Vous allez bientôt faire une tournée américaine, c’est plutôt énorme pour un jeune groupe comme le vôtre. Comment avez-vous réussi à en arriver là ?
Je ne sais pas ! Je veux dire que c’est un peu le résultat de ce qu’a fait le dernier album pour nous. Il y a toujours eu une grosse réaction et beaucoup de gens qui écoutent notre musique aux États-Unis. Nous aurions pu tourner là-bas il y a quelques années mais nous avions décidé de ne pas le faire parce que nous étions toujours en plein dans le développement du groupe en lui-même et de son concept. Alors quand nous avons finalement eu la chance d’y aller, je crois que c’était enfin possible car nous avons maintenant cette confiance qui nous permet de le faire, principalement parce que nous venons de sortir un album en tant que quatuor et ça fonctionne bien.
Les paroles sont écrites en Allemand, est-ce important pour vous de montrer d’où vous venez ?
Oui, c’est très important pour nous. Pas seulement pour montrer d’où nous venons mais parce que la langue allemande est un outil comme un instrument que nous utilisons dans notre musique. Nous aimons vraiment l’idée de souligner nos morceaux heavy avec la langue allemande. Nous avons essayé de faire une chanson en Anglais une fois, mais ça a donné un truc totalement différent alors nous allons toujours rester sur la langue allemande parce qu’elle fait partie du concept. Nous voyons vraiment l’Allemand comme un instrument pour notre musique.
L’album s’appelle Goldkinder, peux-tu nous en dire plus sur le thème et le concept derrière cet album ?
Bien sûr, en gros nous avions l’idée de créer des histoires à propos des chansons. Nous avons toujours la partie instrumentale des morceaux avant d’écrire les paroles et nous écrivons les paroles ensemble, quand nous nous enfermons en studio. En gros, nous écoutons les morceaux instrumentaux et nous essayons de comprendre le genre d’émotion et de sentiments qu’ils nous évoquent. Une fois que nous avons trouvé où ça nous mène, nous discutons entre nous de ce que ça devrait donner, et nous commençons à créer une histoire. Ça doit toujours être sur le thème d’un conte de fée sombre, quelque chose avec le même personnage que dans les anciennes chansons avec cet aspect de conte de fée, mais en le rendant plus sombre. C’est une histoire de personnalité, il y a toujours un protagoniste différent qui vit à travers une histoire qui se rapporte à la musique, en gros. Nous adorons renforcer ça avec des parties au synthé, avec des violons et des arrangements de guitare pour mettre en avant la musique, pour appuyer les paroles qui sont enfin écrites.
L’album est en deux parties et dans la deuxième nous pouvons entendre des reprises ou des remixes des morceaux de l’album. Pourquoi cela ?
Nous aimons beaucoup faire écouter nos morceaux et inclure d’autres artistes, et souvent ça se termine avec des remixes électroniques. Nous aimons voir comment un artiste réagit à notre musique, comment il va la ressentir et ce qu’il va en tirer. Alors nous avons demandé à un ami qui est DJ de faire ces remixes et ça nous a vraiment amusé qu’il fasse ces versions de nos chansons. [Rires] Pour ce qui est des versions instrumentales sur l’édition spéciale, c’est aussi sur le CD, en gros nous avons l’idée de vouloir transmettre notre propre musique, en retirant les paroles, et d’écouter seulement la musique en elle-même, afin de pouvoir se concentrer davantage sur les arrangements auxquels nous avons pensé quand nous écrivions les morceaux. Alors c’est sympa pour nous de dévoiler ces morceaux sans les paroles et sans la langue allemande, qui comme je te le disais a un très gros impact sur notre musique. Et dans le mix de Goldkinder, quand on le compare aux deux premiers albums, le chant est beaucoup plus en avant par rapport à la musique et aux chœurs, et c’est pourquoi nous avons préféré proposer ces morceaux sans le chant, afin d’obtenir un aperçu distinct.
OK, celle-ci va être ma dernière question et c’est la question un peu stupide de l’interview : puisque vous vous appelez We Butter The Bread With Butter je dois demander, qu’est-ce que vous prenez au petit-déjeuner ?
Euh [pause] C’est une bonne question ! Ça dépend, quand nous sommes en tournée nous ne prenons pas vraiment de petit-déjeuner mais à la maison, la plupart du temps, je prends des céréales avec des fruits et du pain au beurre, évidemment ! [Rires] Euh et… je ne sais pas, j’adore manger des trucs chauds, comme des soupes, le matin. [Rires]
Interview réalisée par téléphone le 1er octobre 2013 par Metal’O Phil
Retranscription et traduction : Natacha
Introduction : Animal
Site internet officiel de We Butter The Bread With Butter : www.wbtbwb.com
Album Goldkinder, sorti le 9 août 2013 chez BMG / Relativity