Gérer l’héritage d’un artiste iconique comme Ronnie James Dio est à la fois une bénédiction et une lourde responsabilité avec son lot de préoccupations. A commencer par les critiques qui fusent à la moindre décision, avec les remises en cause de la légitimité et les doutes sur la pureté des intentions. Les débats sur l’hologramme de feu l’ex-chanteur de Black Sabbath et Heaven And Hell développé à l’initiative de son ex-épouse et manageuse Wendy Dio en sont l’exemple le plus flagrant.
Aujourd’hui – le 21 février prochain –, c’est une nouvelle salve de rééditions que lance Wendy en collaboration avec le label BMG, celle des quatre derniers albums de Dio : Angry Machines, Magica, Killing The Dragon et Master Of The Moon. L’occasion de redécouvrir ces disques peut-être moins connus que les trois premiers mais qui n’en offrent pas moins leur lot de pépites et dévoilent d’autres facettes de la musique et de la carrière de Ronnie.
L’occasion également pour nous d’échanger avec Wendy sur ces disques, mais aussi et surtout sur la personnalité de Ronnie et sur son propre travail en tant que manageuse et gardienne de l’héritage et de la mémoire de l’artiste.
« [L’hologramme] coûte plus de deux millions de dollars à développer et à chaque fois, ça coûtera probablement un autre million de dollars pour développer le suivant. Nous ne le faisons pas pour l’argent, c’est certain. Nous le faisons par amour. »
Radio Metal : Les quatre derniers albums de Dio – Angry Machines, Magica, Killing The Dragon et Master Of The Moon – ressortent ce mois-ci. Penses-tu que ce soit l’occasion pour les gens de découvrir et redécouvrir que l’héritage de Dio ne s’arrête pas à Holy Diver et Last In Line ?
Wendy Dio : Je pense que tous les albums sont importants. Ils font partie de la vie de Ronnie, de ce qu’il traversait à l’époque, et comment il écrivait à l’époque. Je trouve qu’il est important que les gosses les entendent. Les quatre albums qui sortent maintenant sont épuisés depuis environ dix ans. Personne n’a pu les acheter pendant dix ans.
Est-ce que les autres albums de Dio recevront le même traitement ?
Ils sont sur des labels différents, donc il faut que j’en parle à Warner Bros.
Angry Machine est le troisième album de Dio sorti dans les années 90. C’est l’un des albums les plus dénigrés de Dio et, plus généralement, les années 90 ont été difficiles pour de nombreux artistes des années 70 et 80. Comment Ronnie a-t-il vécu les années 90 ?
Je pense que c’était parce qu’il avait un nouveau guitariste, Tracy Grijalva. Il était plus jeune et il a dit à Ronnie : « Peut-être qu’on devrait essayer de faire de la musique un peu plus industrielle. » Donc Ronnie a effectivement essayé d’être un peu industriel, mais malheureusement, les fans n’ont semble-t-il pas apprécié son changement, même s’il y a de très bonnes chansons là-dedans. « This Is Your Life » est l’une de mes chansons préférées, d’ailleurs ! Mais je pense que c’était pour ça. C’était un album expérimental pour Ronnie. Mais tout le monde a souffert dans les années 90 à cause de l’arrivée du Grunge et du fait que le metal qui n’était plus trop à la mode, mais nous avons survécu. La communauté de fans de Ronnie a toujours été là quoi qu’il arrive. Je veux dire, que ça fait presque dix ans qu’il nous a quittés et nous avons encore deux millions et demi de fans sur sa page Facebook. Ronnie était très fidèle à ses fans et je pense que ses fans, vice versa, lui étaient très fidèles.
En revanche, quatre ans plus tard, Magica était un album très ambitieux et était considéré comme une résurrection pour Dio…
Ronnie a toujours voulu faire un album conceptuel qui raconte une sorte d’histoire. Comme vous le savez, il était toujours emballé par l’histoire, l’époque médiévale et ce genre de chose. Il a toujours voulu faire cet album. En fait, c’était censé être trois albums ; il devait y avoir Magica I, Magica II et Magica III. Malheureusement, ça n’a pas pu se faire. Il a commencé à écrire pour Magica II, dont nous avons une chanson qui apparaît sur la réédition de Magica, il s’agit d’« Electra ». Donc il a effectivement commencé l’écriture de la suite et j’ai aussi quelques chansons inachevées qu’il était en train d’écrire. Donc peut-être que plus tard nous fouillerons là-dedans et que ça sortira. Mais je sais que c’était son rêve de finir les albums Magica. Ça lui a pris énormément de temps parce qu’il y a une histoire derrière, il fallait qu’il développe cette histoire, et les chansons doivent coller à chaque personnage de l’histoire. Pendant ce temps-là, il devait partir en tournée, et pour partir en tournée, il faut avoir un album à promouvoir, donc il a écrit Master Of The Moon pour la tournée, tout en continuant à écrire la suite de Magica à la maison.
Il existe encore beaucoup de morceaux inédits de Dio ? Je sais par exemple que Doug Aldrich a mentionné qu’il possédait lui-même une chanson inédite…
Nous avons beaucoup de trucs dans les tiroirs. Plein de live, d’enregistrements de concerts. Nous avons des morceaux à moitié composés, plein de trucs que nous pouvons assembler, peut-être. Je crois que Doug Aldrich écrivait quelque chose avec Ronnie et je sais que Jimmy Bain écrivait quelque chose avec Ronnie, et Craig [Goldy] écrivait probablement des trucs avec Ronnie. Donc il y a des choses, oui. Il faut que nous les écoutions, parce que parfois… Tant qu’il y a du chant dessus, le groupe pourrait finir les chansons, mais je ne sais pas ce qui était terminé dessus ou si c’était du chant que Ronnie aurait validé. Je suis toujours très inquiète que des choses sortent sans que je sois sûre que Ronnie les aurait approuvées, car c’était un perfectionniste. Donc pour tout ce qui sort, il faut que je sois convaincue que Ronnie l’aurait approuvé, et pas juste le sortir pour le sortir. De même, la façon dont Ronnie écrivait une chanson, c’est qu’il se posait devant la télé avec sa guitare et il notait des choses sur papier, et ensuite il allait au studio et enregistrait une démo avec une boîte à rythme, sa guitare et de la basse. Ensuite, il allait au vrai studio pour enregistrer l’album, mais toutes ces démos que j’ai, il y en a des centaines, peut-être qu’un jour nous en ferons quelque chose. Mais sur ces nouvelles éditions qui sortent maintenant, elles ont toutes la version studio de l’album et un album live qui va avec et que personne n’a jamais entendu. Ces enregistrements live proviennent des tournées que Ronnie a faites à l’époque des albums respectifs, donc c’est assez intéressant.
« Ronnie a toujours écrit des chansons sur le fait de croire en ses rêves : si tu crois en tes rêves, tu peux faire quelque chose de ta vie. Si tu es trop gros, trop petit, trop moche, peu importe ce que tu es, c’est ce qu’il y a à l’intérieur qui compte. »
Killing The Dragon et Master Of The Moon sont les deux derniers albums de Dio, confirmant le retour en forme du groupe. Quel est ton sentiment sur ces albums en tant que conclusion de l’héritage de Dio, le groupe ?
C’était deux albums différents. Sur Killing The Dragon, nous avons Doug Aldrich, tandis que sur Master Of The Moon, Craig Goldy est revenu, donc deux guitaristes différents, ce qui est assez excitant aussi. C’était de très bons musiciens et de bons amis de Ronnie, et je pense qu’il a apprécié travailler avec les deux. C’était les deux derniers albums, mais ce n’était pas vraiment une conclusion. C’était juste des albums de plus que Ronnie a faits et a appréciés faire. Si Ronnie avait survécu, il est clair que ça n’aurait pas été une conclusion. En fait, le dernier album que Ronnie a fait, c’était avec son cousin David « Rock » Feinstein. Il a fait deux chansons avec lui, dans la ville d’origine de Ronnie au studio de David. Et puis bien sûr, il s’était remis avec Black Sabbath.
A propos de Killing The Dragon, Ronnie avait déclaré que le dragon faisait référence à la technologie, et il avait exprimé ses inquiétudes sur la menace qu’elle pouvait faire peser sur l’avenir de la société. Angry Machine avait également ce thème technologique, mais on peut même remonter à « Computer God » de Black Sabbath en 1992, avant même l’apparition d’internet dans les foyers. Penses-tu que des décennies plus tard, l’état du monde lui donne raison ?
Oui, il se souciait toujours de l’état du monde en général. Ses chansons sont écrites de manière à ce que les gens puissent y déchiffrer ce qu’ils veulent, mais souvent, oui, il écrivait à propos de choses qui se passaient dans le monde. En fait, quand on lui a diagnostiqué un cancer, quand il allait à l’hôpital pour recevoir son traitement, il s’y référait toujours comme au dragon et disait que nous étions en train de tuer le dragon. Mais Ronnie s’est toujours beaucoup intéressé à la technologie. C’est pourquoi nous avons essayé de développer un hologramme quand Ronnie était encore en vie. Certains ont peut-être vu le show de 1986 avec un dragon et tout, nous avions une boule de cristal dans laquelle Ronnie parlait. C’était une projection, mais nous essayions de développer un hologramme à l’époque. Donc Ronnie s’est toujours intéressé à la technologie, à ce que l’avenir nous réservait, et à différentes choses liées aux technologies d’enregistrement, qui changent constamment, à l’hologramme que nous développons aujourd’hui et qui change presque chaque jour. La technologie évolue tellement vite, je pense qu’elle va nous dépasser !
Tu viens de mentionner l’hologramme, qui fait beaucoup débat. Comprends-tu les questions éthiques que ceci soulève, comme de nombreuses avancées technologiques ?
Oui, mais je pense que Ronnie l’aurait approuvé, car comme je l’ai dit, il a toujours voulu développer un hologramme, il était fasciné par les hologrammes de Disneyland, etc. C’est quelque chose qui, parce que c’est nouveau et que nous étions le seul groupe – le groupe live de Ronnie – à avoir jamais tourné avec un hologramme… Et c’était un show spectaculaire ! Celui avec lequel nous sommes venus en Europe était le premier, et j’en étais un peu déçue, mais le second que nous avons fait aux Etats-Unis était fantastique. Nous sommes en train d’en développer un nouveau maintenant, qui sera encore meilleur, car la technologie change de jour en jour. Je pense que beaucoup de gens étaient dubitatifs par rapport à l’hologramme, mais tous ceux qui sont venus le voir, y compris ceux qui avaient des avis négatifs avant, ont été épatés. Ils ont tous dit que c’était un concert merveilleux, que ça entretenait le souvenir de Ronnie, que ça faisait vivre sa musique et que c’était fait avec bon goût, respect et amour.
Est-ce quoi toi-même tu as réfléchi à ces questions éthiques ou même hésité à un moment donné ?
Oui. Je me posais beaucoup de questions et il a fallu qu’ils me convainquent au début. Je n’étais pas sûre si c’était quelque chose que Ronnie aurait voulu ou aimé, et j’avais un tas de questions. Mais ensuite, je me suis dit : « Bon, tu sais, ça va dans le sens des évolutions technologiques et du maintien de la mémoire de Ronnie. » J’ai parlé avec le groupe, les musiciens avec qui il a joué durant les dix-sept dernières années, et ils disaient : « Ouais, allons-y, faisons-le. » C’est fait avec bon goût et avec amour, donc… Evidemment, ça n’a pas été fait pour l’argent car ça coûte une fortune. Je veux dire que nous sommes encore en train de le payer ! Ça coûte plus de deux millions de dollars à développer et à chaque fois, ça coûtera probablement un autre million de dollars pour développer le suivant. Nous ne le faisons pas pour l’argent, c’est certain. Nous le faisons par amour, y compris concernant le groupe, et pour rendre hommage à Ronnie.
« Il commence à se disputer avec moi et je lui dit : ‘Ecoute, tu sais quoi ? Je n’ai pas le temps de me battre avec toi. Pourquoi est-ce que tu me fais toujours subir ça ?!’ Il me répond : « Parce que, je dois souffrir, tu dois souffrir » [rires]. Donc souvent, c’était juste pour me rendre folle, je pense, pour me faire enrager ! »
C’est évidemment délicat de gérer et perpétuer l’héritage d’un artiste comme Ronnie James Dio. Comment fais-tu face à cette responsabilité, avec les décisions que tu dois prendre, mais aussi les attentes des fans et les critiques que tu reçois parfois ? N’as-tu pas parfois l’impression d’un poids sur tes épaules ?
Non, pas du tout. Je ne dirais jamais ça. Ronnie et moi avons travaillé ensemble sur sa carrière tout du long depuis… Je veux dire que j’ai connu Ronnie en 1975. Nous avons travaillé très dur. J’ai travaillé très dur sur son business, il a travaillé très dur sur sa musique, et nous n’interférions jamais sur le domaine de l’autre. Tu sais, les critiques seront toujours là. Qu’il ait été encore en vie ou qu’il soit décédé, il y a toujours des critiques. Mais tu sais, les critiques sont bonnes ! Car parfois, elles te donnent une perspective sur quelque chose que tu devrais faire ou que tu n’as pas fait. Les fans sont toujours là parce qu’ils adoraient Ronnie et Ronnie adorait ses fans. Donc, en gros, nous faisons tout pour les fans. Nous nous fichons des critiques, nous faisons ça pour les fans. Les fans qui sont venus voir l’hologramme l’ont adoré. Ceux-là sont les gens à qui nous voulons faire plaisir. Ceux-là sont ceux à qui Ronnie aurait voulu faire plaisir. Ronnie n’a jamais oublié ses fans et eux ne l’ont jamais oublié. J’ai juste envie de faire perdurer la musique et la légende de Ronnie, et je suis bénie à cet égard. Je trouve que parfois il a été très sous-estimé par des gens. Il avait la voix la plus extraordinaire qui soit, c’était un être humain incroyable ; c’était une star sur scène mais c’était un magnifique être humain et il n’oubliait jamais d’où il venait quand il était hors scène. Et nous faisons plein de choses aujourd’hui pour des œuvres de charité, pour au moins essayer de sauver la vie d’autres personnes ou éduquer les gens sur les détections préventives de cancer afin de sauver des vies, ce genre de chose.
Tu soutiens Dio Disciples, mais deux autres groupes ont été formés revendiquant leurs racines dans le groupe Dio : Dream Child avec Craig Goldy et Last In Line avec Vivian Campbell et Vinny Appice. Trouves-tu que ces deux groupes incarnent en partie l’héritage de Dio ?
Non, tu sais… Ils portent la musique de Ronnie, il n’y a pas de problème. Tout ce que quiconque fait, ça fait perdurer la musique de Ronnie. Enfin, parfois… Non, il n’y a pas de problème. Tout va bien.
Le 16 mai prochain, ça fera dix ans depuis que nous avons perdu Ronnie. Crains-tu parfois que la plus jeune génération – ceux qui étaient trop jeunes ou même n’étaient pas nés de son vivant – oublie Ronnie James Dio ?
Je ne crois pas, car le quatrième volet du film Thor qui sort tout juste contient de la musique de Ronnie ; je crois que « Rainbow In The Dark » est utilisé dedans. Il y a une série télé ici qui s’appelle Stranger Things, que tous les jeunes regardent tout le temps, et ils viennent de me demander la permission d’utiliser des T-shirts et posters de Dio pour la série. Je pense que la jeune génération écoute une grande partie des innovateurs, car il n’y a personne pour prendre la relève des Innovateurs, comme Judas Priest, Black Sabbath, Ronnie, Deep Purple… Eux étaient les innovateurs. Il n’y a rien pour prendre leur relève. Je crois qu’on ne se souviendra d’aucune musique d’aujourd’hui dans trente ans de la façon dont on se souvient de ces groupes qui étaient des innovateurs. Et je pense que les jeunes d’aujourd’hui se tournent vers les innovateurs pour eux-mêmes créer. Peut-être parce que… Combien de fois peut-on réinventer la roue ?
La dernière chanson sur Master Of The Moon s’intitule « In Dreams », et l’idée du rêve est récurrente dans l’œuvre de Dio. Dirais-tu que plus qu’un grand artiste, Ronnie était avant tout un grand rêveur ?
Absolument ! Ronnie a toujours écrit des chansons sur le fait de croire en ses rêves : si tu crois en tes rêves, tu peux faire quelque chose de ta vie. Si tu es trop gros, trop petit, trop moche, peu importe ce que tu es, c’est ce qu’il y a à l’intérieur qui compte, pas l’apparence extérieure. Si tu suis tes rêves et essayes de les accomplir et d’être le meilleur que tu puisses être, tu peux y arriver. Ronnie a toujours un message très positif. Même si tu remontes à « Holy Diver », tu vois un prêtre se faire noyer par un monstre, mais vraiment, si tu regardes bien, comment sais-tu que l’un est une bonne personne et l’autre une mauvaise personne ? Comment sais-tu que le prêtre n’est pas une mauvaise personne et l’autre une bonne personne ? Ne pas juger selon les apparences, il faut voir ce qu’il y a à l’intérieur de la personne.
Est-ce que parfois il écrivait dans ses rêves ?
[Rires] Peut-être ! Je ne sais pas ! Parfois il se réveillait en pleine nuit pour écrire quelque chose, donc peut-être bien, oui ! [Rires] Mais la plupart du temps, il écrivait en regardant du sport à la télé, tout type de sport. C’était un grand fan de sport.
Un documentaire sur Ronnie est en cours de travail. A ce sujet, tu as déclaré que tu voulais que ça parle « du vrai, authentique Ronnie ». Mais qui est le vrai Ronnie ?
Ronnie était une grande star sur scène et hors scène, c’était un être humain. Il adorait ses animaux, il adorait être avec ses fans… Il adorait être à la maison, il ne sortait pas beaucoup après les tournées, il faisait tout le temps venir ses amis à la maison. C’était un être humain très humble. Il adorait les gens, leur parler, écouter ce qu’ils avaient à dire, et souvent, il retenait des idées à partir de ce qu’ils lui disaient, il y réfléchissait et en faisait des choses. C’était quelqu’un de très différent. Je pense que ça a ébranlé les gens quand il est mort, justement parce que c’était une très bonne personne. C’est pourquoi il est facile de demander à des gens de jouer ou faire des choses pour lui, car ils ont tous toujours adoré Ronnie.
« Il y a plein de manageuses maintenant, et je pense qu’elles sont plus compréhensives. Elles font en grande partie du baby-sitting en plus d’endosser les autres responsabilités, parce que les groupes, c’est comme des enfants. »
Peux-tu nous en dire plus sur le documentaire qui est prévu ?
Nous sommes en train de travailler dessus en ce moment même avec BMG. Il ne sortira probablement pas avant l’an prochain, mais nous avons bel et bien commencé à faire le documentaire sur la vie de Ronnie. On y retrouvera plein d’interviews de gens qui faisaient partie de la vie de Ronnie, plein de photos et vidéos inédites que nous avons, plein de choses très intéressantes que les gens n’ont jamais vues avant. Je travaille aussi avec Mick Wall pour finir le livre de Ronnie. Ronnie écrivait un libre et il en était arrivé à la moitié, et nous, nous le finissons. Le livre et le documentaire sortiront l’année prochaine.
Qu’est-ce qui était le plus compliqué pour toi quand tu manageais Ronnie ?
[Rires] Probablement d’être mariée à lui ! Nous étions très proches, donc nous nous disputions souvent sur des choses, mais nous les accomplissions quand même ! Ronnie était quelqu’un de têtu, et je suis moi-même très têtue. Nous sommes tous les deux des maniaques du contrôle. Du coup, souvent, l’un voulait aller dans un sens et l’autre dans l’autre sens, donc nous nous disputions sur ces choses. Par exemple, parfois Ronnie était occupé et je lui calais un tas d’interviews, et il était là : « Aaah, je ne veux pas faire ces interviews ! » Et il se disputait avec moi au téléphone à ce sujet, car j’étais au bureau, et je lui disais qu’il avait ces interviews à faire. Un jour, j’étais très occupée et je lui ai dit : « Tu as ces interviews à faire, tu dois les faire, j’ai besoin que tu les fasses aujourd’hui, etc. » Il commence à se disputer avec moi et je lui dis : « Ecoute, tu sais quoi ? Je n’ai pas le temps de me battre avec toi. Pourquoi est-ce que tu me fais toujours subir ça ?! Et tu sais que tu vas les faire ! » Il me répond : « Parce que, je dois souffrir, tu dois souffrir » [rires]. Donc souvent, c’était juste pour me rendre folle, je pense, pour me faire enrager !
Et qu’est-ce qui était le plus compliqué dans le fait d’être son épouse ?
Tu sais, le business et être sa femme, être sa femme et le business, tout était mélangé ! Je ne sais pas, ça semblait tout s’entremêler. Car toute ma vie tournait autour de Ronnie. Toute ma vie consistait à m’occuper de Ronnie, que ce soit en tant qu’épouse et lui mon mari, ou en tant que manageuse. Donc Ronnie était toute ma vie. Tout tournait autour de ce que Ronnie faisait ce jour-là. Donc être manageuse et être une épouse, c’était la même chose.
Quand tu as commencé à manager Ronnie, toi et Sharon Osbourne étiez les seules manageuses. A quel point c’était difficile d’être manageuse dans ce monde très masculin ?
C’était très dur au début, car plein de manageurs hommes essayaient de me voler Ronnie. Ils disaient : « Tu ne sais pas ce que tu fais. » Ils étaient dégradants, mais tu sais quoi ? J’avais ma manière de gérer ça et Sharon avait la sienne, et nous avons toutes les deux survécu. Ma manière était plus douce. Quand quelqu’un me disait des choses, du genre « je vais te donner un conseil, il faut que tu fasses ci, il faut que tu fasses ça… », je me contentais d’écouter et de dire : « Oh, merci beaucoup » en étant polie. Je pense que Sharon disait plutôt : « Va te faire foutre. » Mais nous avons toutes les deux survécu, différemment, à notre façon.
Est-ce que malgré tout il y avait un avantage à être une femme quand on faisait ce boulot ?
Il y a plein de manageuses maintenant, et je pense qu’elles sont plus compréhensives. Elles font en grande partie du baby-sitting en plus d’endosser les autres responsabilités, parce que les groupes, c’est comme des enfants. Souvent, ils ont besoin de certaines choses que parfois les hommes estiment ne pas être leur boulot. J’étais toujours à l’écoute de ce qu’ils voulaient, de ce qu’ils voulaient faire ou de leurs sentiments. Je pense que beaucoup de femmes sont plus attentives aux sentiments de l’artiste. Parfois, s’ils ne se sentent pas de faire quelque chose ou s’ils ne se sentent pas bien, il faut expliquer et comprendre pourquoi ils ne veulent pas faire ça ou pourquoi ils se sentent comme ça. Certains musiciens sont très introvertis, ils sont en fait très timides quand ils ne sont pas sur scène. Donc, souvent, il faut leur parler et les convaincre de faire quelque chose qu’ils n’ont peut-être pas envie de faire, mais en leur expliquant pourquoi il faut qu’ils le fassent, au lieu de juste crier, en disant : « Tu dois faire ça ! » Je pense que les femmes ont tendance à être plus maternelles.
As-tu été en contact avec Sharon au fil des années, pour partager vos expériences respectives ?
Je croise Sharon de temps en temps, mais nous évoluons dans des cercles différents. Je ne sors pas beaucoup. J’ai mon cercle d’amis et tout, et elle a son cercle d’amis, et elle est très occupée avec tous les acteurs, les célébrités, les gens… Ce n’est pas ce que je fais.
Quels auraient été les derniers mots de Ronnie pour cette interview si j’étais en train de lui parler là maintenant ?
Il dirait : « S’il te plaît, salue tous les merveilleux fans français », car il adorait se rendre en France. C’était un merveilleux pays avec de merveilleux fans pour lui. Il dirait : « Que Dieu bénisse tous les fans en France. »
Merci pour cette interview, Wendy.
Je t’en prie, vraiment ! Merci pour le soutien que vous nous offrez. Nous apprécions et nous ne pourrions pas faire ce que nous faisons sans vous, donc merci.
Interview réalisée par téléphone le 5 février 2020 par Nicolas Gricourt.
Retranscription & traduction : Nicolas Gricourt.
Facebook officiel de Ronnie James Dio: www.facebook.com/OfficialRonnieJamesDio.
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Très intéressant d’avoir le point de vue de Wendy sur cette histoire d’hologramme. Malgré toute la bonne foi dont elle peut faire preuve, et je ne la connais pas personnellement après tout, je persiste à trouver ces concerts en hologramme carrément sordides.
Je suis fan de Dio depuis des années, j’ai commencé à écouter du metal en partie grâce à lui. Je suis admiratif de tout ce qu’il a pu accomplir, et je déplore qu’il ne soit plus là, et que les plus jeunes ne puissent pas le voir en concert. Mais c’est comme ça, je pense qu’il faut le laisser où il est, et pour moi, ce n’est pas honorer sa mémoire que de regarder des mecs jouer avec une image d’un mort. D’un point de vue éthique, je ne peux pas, les morts sont à respecter, ce ne sont pas des produits qu’on peut exploiter, quand bien même l’intention de départ ne serait pas l’argent.
Le groupe de reprises a son sens, et ça a toujours été. Mais c’est le même problème que j’ai avec les groupes de reprises qui sont dans le mimétisme total, comme ceux de Queen, Led Zep, les Beatles… et qui remplissent des salles, là où les plus jeunes groupes galèrent à trouver des dates. Si on aime Dio, c’est un meilleur hommage de continuer à vivre sa passion pour le metal, en allant voir des groupes qu’il a inspirés, et qui eux sont bien vivants. Il faut accepter que le temps passe, et dans 10 ans, on ne pourra pas avoir les mêmes têtes d’affiche qu’en 86, et c’est normal. D’autant plus que si c’est pour voir des comédiens en copier coller, non merci.
Et l’hologramme, c’est le summum de cette dérive technologique, que Ronnie n’aurait certainement pas approuvé, s’il s’inquiétait déjà de ses effets pervers il y a 30 ans…
NB : Malgré tout, je n’ai rien contre Wendy, et ce qui ressort le plus de l’interview est une personne honnête qui parle de l’homme qu’elle aimait
[Reply]
« Les quatre albums qui sortent maintenant sont épuisés depuis environ dix ans. Personne n’a pu les acheter pendant dix ans. » => Faudra qu’on m’explique comment j’ai fait alors =D
[Reply]
Certainement pas depuis 10 ans, en effet, Mais « Killing the Dragon » a vu sont prix flamber en neuf, et Magica n’est plus dispo. Par contre, ces 4 albums sont très facilement trouvable à pas cher d’occasion.
Peut être parle-t-elle de la disponibilité US.
Personnellement, j’ai trouvé Angy Machines neuf à la FNAC il y a 7-8 ans.
Magica a été réédité il y a quelques années seulement dans une édition deluxe que j’ai aussi acheté neuf.
Pour les deux autres, j’avoue les avoir trouvé dans des stands de festivals.
Les quatre achetés à prix corrects