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Chronique Focus   

Zeal And Ardor – Devil Is Fine


À tous les égards, 2016 aura apporté son lot de surprises. Dans le microcosme du metal extrême, l’une d’entre elles s’appelle Zeal And Ardor, projet hybride et atypique du musicien américano-suisse Manuel Gagneux. Né dans les tréfonds d’internet – d’un thread 4chan pour être exact – et propulsé quasi instantanément sous les projecteurs, non seulement son unique album, Devil Is Fine, s’est retrouvé classé dans bien des tops de fin d’année et a été rapidement signé sur un label international (NVKA/Caroline), chez qui il ressort prochainement, mais le groupe a même été mis à l’affiche d’événements live prestigieux comme le Roadburn ou le Psycho Las Vegas. Pas mal pour un projet qui se propose, sur la suggestion d’usagers de 4chan donc, de mêler musique d’esclaves afro-américains et black metal ! Le concept avait de quoi défriser les puristes de tout poil, qui ne manquent ni quand on parle de black metal ni quand on manipule des sujets politiquement chargés, mais pourtant il suscite jusqu’à maintenant un enthousiasme à peu près unanime. Alors, buzz ou révolution musicale ?

Alors que Devil Is Fine nous promet des spirituals et du black metal, on a en effet un peu des deux certes, mais en réalité surtout ni l’un ni l’autre : les voix, plus vraies que nature au point qu’on les ait souvent prises pour des samples d’époque, sont les seules à évoquer la préhistoire du blues et les champs de coton, et à l’exception du tout début de « In Ashes » et de quelques hurlements dans « Come On Down », on serait bien en peine de trouver du black metal dans ces neuf titres courts et bien ficelés. En revanche, en moins d’une demi-heure (!), on entend une multiplicité de styles stupéfiante, des passages orientalisants de « Sacrilegium » aux breakdowns du même « Come On Down », en passant par des beats hip hop, pas mal d’électro et une ritournelle enfantine sur « Sacrilegium II ». Bref, en dépit de sa brièveté et d’une production – très artisanale on l’imagine – qui manque un peu de définition et aurait pu bénéficier de plus de mordant, Devil Is Fine est un album extrêmement varié où les rencontres les plus improbables sont arrangées avec beaucoup d’intelligence et une efficacité très pop : on en retrouve le format (des chansons courtes de deux ou trois minutes) et les mélodies accrocheuses dont Gagneux a pu peaufiner l’art dans un autre de ses projets, Birdmask, plutôt orienté électro-pop.

Mais là où ce zapping un peu frénétique peut être éblouissant, il semble aussi tourner à vide, et l’exercice de style manque de substance : oui, on nous explique que l’album est une sorte de fiction historique qui postule que les esclaves auraient rejeté le dieu des Blancs comme une fameuse bande d’adolescents norvégiens l’a fait au début des années 90. Mais enfin les Afro-Américains n’ont pas attendu Varg et consorts pour faire de la musique démoniaque – on peut penser aux Negro Sinful Songs de Leadbelly, à Robert Johnson surtout qui aurait vendu son âme à Satan en échange de son talent, et même à l’intégralité des débuts du rock’n’roll, la musique du diable s’il fallait le rappeler ! –, et si le concept aurait pu être un retournement de situation et un pied de nez intéressant envers le fond très nationalisto-blanc du black metal, ou la revendication politique, très black metal pour le coup, d’un folklore et d’un héritage bafoués par le christianisme, Gagneux rappelle que ses intentions sont plus légères et visent à fédérer plus que diviser, un parti-pris certes tout à fait défendable mais qui a tendance à donner une musique manquant un peu (et c’est un comble vu les styles convoqués) de tripes et d’âme.

Bref, et même s’il peut sembler paradoxal de voir présenté comme extrême ou avant-gardiste ce qui relève (sans même prétendre être autre chose) d’un collage pop virtuose, décomplexé et post-moderne à souhait, Zeal And Ardor livre avec Devil Is Fine un exercice de style bien ficelé et bien plus malicieux que démoniaque, très contemporain dans son approche hyperactive et complètement décloisonnée de la musique. Les plus formalistes d’entre vous y trouveront une bouffée d’air frais, mais ceux qui recherchent plus de substance risquent bien de rester sur leur faim. À Manuel Gagneux de convertir les derniers sceptiques lors des performances live à venir.

Clip vidéo de la chanson « Devil Is Fine » :

Album Devil Is Fine, sortie le 24 février 2017 via MVKA/Caroline. Disponible à l’achat ici.



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  • bon allez, restons calme : j’ai visionné le clip . mon impression et ceci n’engage que moi bien sûr : c’est de la merde . définitivement pas ma came .
    faut dire aussi que l’article m’a mis dans une colère …noire . ce discours tenant du mélange malsain de Black Metal qui devrait s’appeler White Metal , de par son coté nationaliste frontalement opposé aux esclaves afro-américains, rien que ça. Les seconds ayant l’ouverture d’esprit de mélanger le genre pré-cité avec leur propre racines musicales, sous-entendu , les méchants black metalleux sont des gros bourrins ( bon , ok , certains peut être ) Quand on sait d’où vient Alcest ou quand on écoute Sojourner .
    L’ horrible oppresseur blanc face à ses victimes noires . rien que coté adjectif , on fait pas plus manichéen. Ras le bol de ces discours .
    Par conséquent , du fait du passé – et du passif- on se doit d’aimer voire de tolérer ce truc .
    je juge uniquement la musique pas le concept ni les revendications . Bref , soyons donc aussi provoc’ , je préfère ô combien Burzum à ce machin. désolé , on ne peut pas tout aimer .
    Pffff, Quelle époque !!

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