L’évolution de Muse fait débat depuis que le troisième album Absolution a définitivement popularisé le groupe. Car, au-delà d’un succès commercial qui fait toujours grincer des dents, c’est aussi à ce moment-là que les guitares et la voix de Matthew Bellamy se sont faites moins nerveuses et que le groupe a commencé à expérimenter diverses choses. Le point culminant de cette démarche était jusqu’à présent le titre en trois parties, écrit avec un orchestre symphonique, sur l’album The Resistance sorti en 2009.

Alors que le groupe s’apprête à sortir The Second Law le 28 septembre prochain, un nouvel album pour lequel on a eu tous les sons de cloche possibles et imaginables, présageant donc à nouveau une œuvre diversifiée (Matthew Bellamy déclarait même dans Spin qu’il y aurait un titre « d’odyssée rap-jazz gangsta chrétien alliant le flamenco et la musique de cowboy psychédélique »), le groupe publie la vidéo du titre « Unsustainable », où le groupe expérimente dans un registre on-ne-peut-plus à la mode, donc aussi risqué que dans l’air du temps. Car lorsqu’on s’inspire de ce qui marche le mieux, on prend forcément le risque d’être taxé de suiveur.

Passons sur le clip, véhiculant une triste impression de déjà-vu de clip engagé contre la société capitaliste et rappelant soit que l’homme est un loup pour l’homme ; soit qu’il devrait se précipiter vers un mode de vie plus naturel, avec ses traditionnels plans accélérés sur la frénésie de la bourse, des extraits de journaux télévisés, ses tanks, etc., et intéressons nous plutôt à ce titre déroutant. Sa structure est inhabituelle et très éloignée, si ce n’est son minutage, de celle d’un single, le chant y est quasi absent, tout comme les guitares acérées de Muse. Et, c’est ce qui fera certainement le plus débat, il y a une importante part de dubstep.

Bien que le morceau soit intéressant par son mélange entre les orchestrations dramatiques et des parties dubstep, mélange plutôt bien adapté à l’univers de Muse, un léger malaise subsiste, tant l’exercice de style paraît téléphoné, voire opportuniste. Il y a bien entendu une part d’injustice à reprocher cela à un artiste, sachant que l’on ne l’aurait pas fait si cela n’avait pas été un style populaire.

Mais, comme un artiste ayant fait un habile plagiat, simplement en modifiant quelques notes afin d’être légalement à l’abri de toute accusation, la ficelle est tellement grosse qu’on ne parvient pas à se défaire de ce malaise. Parce que Muse ne donne pas l’impression de s’être particulièrement donné sur ce titre. On a reproché au Death Magnetic d’être un exercice de style un peu facile au moment où c’est ce qui leur était le plus demandé : avec son savoir-faire, Metallica n’a pas besoin de faire trop d’efforts pour faire un album de thrash « potable ». Bien que Muse n’ait jamais fait de dubstep, on a cette même impression à l’écoute de ce « Unsustainable », qui est un morceau efficace et cohérent, mais qui ne transpire pas d’un effort créatif épuisant et qui par conséquent sonne plus opportuniste qu’autre chose.