Sebastian Bach, non content d’être un des chanteurs les plus doués et réputé de sa génération de rockers, est un sacré personnage. On en avait déjà fait l’expérience en août 2011 à l’occasion de la sortie de Kicking & Screaming, son dernier album solo en date. Sa venue sur le sol français pour sa prestation au Hellfest était une bonne occasion de le rencontrer en face à face avec – bonus non négligeable – sa très charmante petite amie, Minnie Gupta, qui l’accompagnait. Lorsqu’on lui remémore notre précédente rencontre où il avait tenté de nous passer Minnie au téléphone, il répond du tac-au-tac : « Ha ! C’était une de ces interviews que j’ai fait lorsque nous étions au lit ! » Autant dire que le personnage est toujours plein d’humour et c’est un régal de discuter avec lui !
Au sujet du Hellfest, Sebastian Bach se produisait le même jour que Guns N’ Roses. Connaissant l’amitié qui unit le chanteur à Axl Rose, le public clissonnais aurait pu s’attendre à un duo entre les deux frontmans. Ça n’est malheureusement pas arrivé. En revanche, Bach nous explique : « Il voulait sortir hier soir, mais je suis trop vieux pour ça, maintenant ! Il voulait aller à Nantes – c’est bien comme ça qu’on dit ? Avant, je disais ‘Nantèz’, on dirait une prononciation espagnole ! Aujourd’hui, j’ai balancé : ’Merci pour veinte años’, mais c’est de l’espagnol ! Je voulais dire : ‘Merci pour 25 ans de rock’n’roll’. » C’est ça aussi la vie de musicien : on traverse les pays jour après jour et on finit par mélanger les langues ! Et, pour le dédouaner, la fatigue n’est pas là pour aider, comme il nous l’avoue : « On devait passer assez tôt et on est arrivés à la bourre. Je n’ai rien pu manger, donc j’étais un peu à côté de mes pompes. » Mais fort heureusement « C’était fun ! » s’exclame-t-il. Il poursuit : « Le public a putain d’adoré. Très bonne réponse. Je crois qu’on a eu le droit au public le plus important jusqu’ici. »
« Les gens adorent les chansons, ils adorent le nouvel album Kicking & Screaming » affirme-t-il avec fierté. Pourtant, et malgré le fait que ses concerts en tête d’affiche en présentent davantage, seul le titre éponyme de son dernier opus s’est frayé un chemin sur la setlist du Hellfest. Le reste étant une reprise de PainmuseuM et pas moins de huit titres empruntés à Skid Row. Mais on comprend que ce répertoire ayant passé l’épreuve du temps soit davantage adapté à un public de festival qui, en majorité, connaît Sebastian Bach surtout pour son histoire avec le groupe californien.
Ce qui nous amène naturellement vers cette récente déclaration via Twitter stipulant que Bach et une majorité de ses anciens collègues étaient prêts pour une reformation. Bach nous confirme d’ailleurs que « quatre des membres sur cinq étaient prêt à le faire. Un seul ne voulait pas. » Il renchérit : « Moi, je le ferais, c’est vraiment simple ». Une déclaration allant à l’encontre des précédentes, que ce soit de la part de Bach – y compris lors de notre précédent entretien – que de Skid Row. C’est avec son franc-parler, et non sans une pointe de provocation, que Bach éclairci la situation : « Je ne leur avais pas parlé depuis très longtemps. On nous a proposé de faire un festival en Angleterre, le Sonisphere : deux shows pour un paquet d’argent. Il faut croire que ces gars n’aiment pas l’argent, c’est la seule explication. Tout ce qu’on avait à se faire, c’était se pointer et ramasser le fric. Du genre : ‘Nous voilà, lalala, filez-nous l’argent’ ! C’est totalement con, mais que voulez-vous. »
D’autant plus étonnés étions-nous de ce potentiel retour que la carrière de Sebastian Bach en solo est clairement sur la pente montante alors que Skid Row est petit à petit en train de se faire oublier. Pour quelle raison – hormis l’argent, certes – aurait-il voulu tenter de réanimer une ancienne gloire avec son ancien groupe, alors qu’il se débrouille déjà très bien en solo ? « C’est effectivement une belle carrière. Mais il arrive que des promoteurs nous proposent d’énormes contrats. Je ne sais pas pourquoi, je ne contrôle pas les gens. Je ne comprends pas pourquoi on nous dit : ‘Hey, si tu joues avec ce batteur qui n’a pas joué une note de rock depuis 20 putains d’années…’ Ils nous paieraient pour ça. Ça n’a aucun sens. Mais si c’est ce qu’ils veulent, très bien pour eux. Désolé, je ne veux pas qu’on pense que je suis en colère, c’est seulement que j’en ai vraiment marre qu’on me pose la question. C’est la seule raison pour laquelle je le ferais : pour que tout le monde la ferme enfin. »
Au moins, comme ça, c’est clair ! D’ailleurs Bach confirme ce que nous avions retenu de notre précédente rencontre, à savoir que, sur le plan personnel, il n’a aucun désir particulier de remettre le couvert : « Je m’en tape complètement. C’est pour vous, pas pour moi. […] Je n’en ai toujours rien à foutre ! Mais c’est franchement simple de monter sur scène et de chanter les chansons. Je le fais tous les putains de jours ! Je m’en tape complètement, je le fais pour vous. Pour que tout le monde la ferme à propos de cette histoire de réunion, voilà pourquoi je le ferais. Je me fous de le faire. J’aime mon groupe actuel, j’aime mon album. Mais où que j’aille, les gens me demandent la même chose et ça me fatigue. Ça me fatigue et ça me tue. »
Il est clair que Bach est victime de cette lubie, cette obsession qu’ont une majorité de gens en ce qui concerne les formations d’origine, à l’instar de celles de Kiss ou de Guns N’ Roses. Or les musiciens – sauf peut-être ceux dont la carrière s’est effondrée avec le temps et qui bénéficieraient bien d’un coup de projecteur – généralement s’en fichent. Tout ce qu’ils souhaitent c’est continuer à jouer et créer leur musique comme ils l’entendent. Sebastian Bach acquiesce sur cette analyse et renchérit : « Tout ce qui m’importe, à moi, c’est de faire de nouveaux CD. Parce que la musique sera encore là bien longtemps après notre mort. C’est une forme d’immortalité, ça dure pour toujours. Voilà ce qui m’intéresse, ce qui me fascine. Je peux faire un nouvel album, et vous pouvez l’écouter sur votre iPod en France et prendre un putain de pied avec. Le son est parfait, vous pouvez lire les paroles et la regarder sur la couverture (NDLR : il pointe du doigt sa compagne qui apparaît sur la couverture de son dernier album et dans le clip) et vous masturber ! C’est ça qui m’intéresse. Monter sur scène pour chanter de vieilles chansons, c’est un truc temporaire. On ne peut pas s’y raccrocher pour toujours. » A noter, à côté de lui, le regard furibond de Minnie lorsqu’il évoque sa participation à la couverture de l’album et un Sebastian Bach qui tente, avec le sourire du gamin qui sait qu’il a dit une connerie, de l’apaiser comme il peut avec des yeux doux.
Mais ce n’est pas en mentionnant le cas Steel Panther que notre blondinet parviendra à se faire pardonner. Puisque lorsque nous lui faisons part de notre étonnement de voir autant de jeunes femmes apprécier de se faire traiter d’objet sexuels et autres termes synonymes de filles de joie, il affirme sur le ton de l’humour : « Il n’y a pas pénurie de ‘salopes’ (NDLR: en français dans le texte) dans le rock, c’est sûr ! (rires) » Il enchaîne au sujet du groupe parodique : « Je pense qu’ils sont très drôles. Ils sont très bons dans leur domaine, c’est-à-dire le comique. Et ils ont des chansons qui tuent, aussi. Comment s’appelle cette chanson, ’17 Girls In A Row’ ? Mais dans le refrain, ce n’est pas ‘girls’, si ? Merde, ils ont changé ! Avant, c’était ’17 holes’ ! C’est très marrant ! […] Je monte souvent sur scène avec eux. Ils jouent tous les lundis soirs au House Of Blues, à Hollywood. C’est à deux pâtés de maison de chez nous. Minnie et moi y sommes allés très souvent pour nous amuser sur scène. »
Ne clôturons pas cet entretien sans faire le point sur ce que le public peut attendre de la part de Sebastian Bach dans un futur proche. Un nouvel album ? « Frontier [ndlr : sa maison de disques] veut un nouvel album, mais ça prend du temps. Je ne pense pas que le public comprenne combien d’efforts, d’argent et de temps ça prend pour faire un vrai bon CD. C’est très, très long. » Bach informe également qu’il prévoit un DVD live pour bientôt. Il se dit en revanche pas intéressé par un album live car « tout le monde a un système stéréo, aujourd’hui, alors faire simplement un album live… Autant filmer le truc. » Pourtant des albums live sont bel et bien devenus des références, dont le Alive de son groupe préféré, Kiss… « Oui, je comprends ce que tu veux dire. » répond-t-il. « Je suis simplement plus intéressé par la nouveauté. C’est ça que je trouve fun. Comme quand Nick et moi avons écrit le titre ‘Kicking & Screaming’. J’adore cette chanson. Quand je l’écoute, je me prends un coup de pied au cul. »
Mais avant de penser à sortir de nouveaux disques et autre DVD, une tournée attend Sebastian Bach : « On va aller jouer dans des festivals en Europe, en tête d’affiche. Puis on part cinq jours à Amsterdam et dix jours en Inde. Je n’y suis jamais allé » nous apprend-t-il au sujet de ce dernier pays. Il conclut d’ailleurs en nous parlant de ce roi indien, fan de rock qu’il connait et qui lui a offert cette opportunité : « Le roi de Shillong, en Inde, est le plus grand fan de rock au monde. Il est venu à L.A. pour rencontrer des rock stars, je l’ai rencontré au Rainbow. Il nous fait venir chez lui pour aller voir le Taj Mahal et tous ces coins géniaux. Je vais passer en mode George Harrison et à la spiritualité ! »
Interview réalisée en face-à-face lors du Hellfest (Clisson, France) le samedi 16 juin 2012
Questions : Spaceman et Metal’O Phil
Retranscription et traduction : Saff
Site internet officiel de Sebastian Bach : www.sebastianbach.com
J’ai eu la chance de le voir au Graspop cette année. Sa voix est encore plus impressionnante en live, mais il a chanté pas mal de chansons de Skid Row, il a beau jouer en solo depuis une dizaine d’année, son nom restera toujours lié à celui de son ancien groupe.
Quoi qu’il en soit, il a un super sens de l’humour!
Sympathique interview! Pour l’avoir rencontré, Sebastian est un sacré personnage!
Pour info, « American Metalhead » (qu’il a joué au Hellfest) est certes un morceau de Pain Museum à la base (groupe parallèle de Mike Chlasciak et Bobby Jarzombek à l’époque), mais on le retrouve aussi sur le premier album solo de Sebastian : « Angel Down » (sur lequel jouait Mike et Bobby).