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Interview   

The Soft Moon : créer pour Exister


Depuis son premier album en 2011, The Soft Moon a parcouru du chemin : avec son post-punk teinté de cold wave, le projet de Luis Vasquez s’est imposé comme l’un des fers de lance de ce revival 80s au côté de groupes comme Lebanon Hanover, Drab Majesty ou She Past Away. Plus de dix ans et quatre albums plus tard, Vasquez a joué sur les scènes du monde entier lors de performances intenses et électriques, notamment en première partie de Depeche Mode et Nine Inch Nails, et élargi sa palette à des tonalités plus variées, mais toujours froides et volontiers industrielles. De quoi lui ouvrir les portes du Roadburn et même celle du Hellfest, à l’affiche duquel il était cette année.

C’est au Roadburn justement, quelques heures avant son concert sur la scène principale, que nous avons retrouvé le multi-instrumentiste pour parler d’Exister, son dernier album en date. À la fois dansant et introspectif, on y retrouve les paroles aux allures de confessions de Vasquez, qui y explore les replis douloureux et les conséquences d’une enfance difficile. Fidèle à sa musique, aussi sincère que réservé, le musicien, église enflammée tatouée sur une main et menotte attachée à l’autre, est revenu avec nous sur ses débuts et les transformations traversées par lui-même et le projet, de la culpabilité et l’auto-détestation à la prise de confiance.

« Avec The Soft Moon, au fil des années, la raison pour laquelle j’avais commencé à faire de la musique a fini par me manquer : au départ, c’était pour le fun, purement pour m’amuser, alors que par la suite c’est devenu une sorte de psychothérapie. »

Radio Metal : L’année dernière, tu avais déjà fait pas mal de dates pour défendre Exister, ton dernier album. Comment ça s’est passé ?

Luis Vasquez : Oui, nous avons officiellement commencé en septembre dernier, nous avons fait une quarantaine de dates en Europe puis, après une petite pause, une trentaine ou une quarantaine de dates aux États-Unis. Nous nous sommes arrêté pendant les fêtes et maintenant, nous reprenons avec cette tournée, une autre arrive en mai, puis en juin, il y a quelques festivals qui seront bientôt annoncé – j’ai des choses calées jusqu’à octobre, je crois.

C’est comment de chanter ces nouvelles chansons ? Elles sont très variées, et ton chant aussi est plus varié que par le passé…

J’aime le challenge que ça représente. Je repousse toujours mes limites, même au moment de l’écriture. Sur scène, une chanson comme « Become The Lies » me demande beaucoup d’efforts, notamment au niveau du chant, mais ça me plaît, ce genre de défi. C’est fun, je trouve ça cool de s’astreindre à ce genre de challenge après tant d’années. C’est excitant, ça me permet de rester enthousiaste.

Il y a eu quatre ans entre Criminal et Exister. Leurs pochettes semblent suggérer qu’il y a un lien entre ces deux albums. Est-ce que tu les vois de cette manière ?

J’ai remarqué ça après coup, oui. Je n’aurais probablement pas utilisé ce genre d’image si j’y avais réfléchi ou si j’avais remarqué, mais spontanément, je n’ai pas pu m’empêcher d’utiliser cette photo de moi enfant car l’album parle de revenir à mon enfance, de choses comme ça. Ce qui est intéressant, c’est qu’à ce moment-là, j’étais dans une période compliquée par rapport à ma mère : il y a quelques morceaux de l’album qui parlent justement de la relation entre un enfant, plus précisément un fils, et sa mère. Nous ne nous entendions pas très bien à l’époque, mais elle m’a envoyé une enveloppe que dans un premier temps je n’ai pas ouverte – il m’a fallu quelque chose comme quatre mois avant de le faire. À ce moment-là, je galérais à trouver une pochette pour l’album que j’étais en train de finaliser. Lorsque j’ai ouvert l’enveloppe, j’y ai trouvé quelques photos de moi et je me suis dit : « Mon dieu, c’est ça qu’il me faut ». C’est bizarre que ça se soit passé comme ça, je n’en ai parlé à personne. J’ai donc fini par utiliser l’une de ces photos, ça m’a semblé être la chose à faire. Comme je suis authentique et honnête dans ma manière de m’exprimer, comme je partage tant de choses dans ces chansons, j’ai voulu aller encore plus loin en mettant cette photo de moi enfant sur la pochette.

À l’époque de Criminal, tu vivais à Berlin, et pour celui-ci, tu es retourné d’où tu viens, dans le désert des Mojaves aux États-Unis. Est-ce que ça a changé quelque chose dans ton approche de la musique ?

Oui, à la fois en raison de problèmes familiaux qui, je m’en suis rendu compte à ce moment-là, n’avaient jamais changé, et du fait d’être dans le désert, isolé. Là-dessus s’est évidemment ajouté la pandémie de Covid-19 [petits rires]… C’était une période intéressante. Ça m’a forcé à me regarder en face un peu plus, ce qui a été difficile. La genèse de cet album a été vraiment douloureuse – c’est souvent le cas, Criminal était aussi un album torturé à sa façon, plus chaotique, plus rebelle. Pour Exister, il a surtout été question de devoir accepter certaines choses qui font partie de ma famille, de mes gènes, des choses comme ça. Cette question d’acceptation est centrale.

Ça semble cohérent avec ce fait d’avoir mis cette photo de toi enfant sur la pochette de l’album : est-ce que tu as l’impression d’avoir bouclé la boucle, d’une certaine façon ?

C’est heureusement ce qu’il s’est passé avec cet album – heureusement, c’est enfin arrivé ! Pendant toutes ces années, il a toujours été question de me découvrir, de comprendre pourquoi je ressens ce que je ressens. Et je crois que retourner chez moi et être proche de ma mère à nouveau – même si ça ne s’est pas bien passé –, ça a vraiment été une manière de boucler la boucle à tous les niveaux.

Entre les deux derniers albums de The Soft Moon, tu as sorti sous ton propre nom A Body Of Errors, un disque plus expérimental, plus cinématographique peut-être, plutôt sombre aussi. Comment as-tu travaillé dessus ? À quel point c’était différent de ton travail pour The Soft Moon ?

C’était juste une façon pour moi d’explorer le son. Ça m’a aussi permis de faire une pause dans le processus émotionnel très lourd qui est impliqué lorsque j’écris pour The Soft Moon. Je voulais juste écrire de la musique pour écrire de la musique. Avec The Soft Moon, au fil des années, la raison pour laquelle j’avais commencé à faire de la musique a fini par me manquer : au départ, c’était pour le fun, purement pour m’amuser, alors que par la suite c’est devenu une sorte de psychothérapie. Cette façon de faire ressortir toutes ces choses merdiques et d’apprendre des choses sur moi-même de cette façon bizarre est douloureuse. Donc A Body Of Errors, c’était une manière fun de revenir à cette façon de faire de la musique pour m’amuser du début de ma carrière.

« L’une des raisons pour lesquelles je l’ai appelé Exister, c’est que c’est ça, exister. En tant qu’humains, nous ressentons des émotions multiples, différentes, nous ne sommes pas bloqués sur une seule, nous ressentons des choses très variées. Cet album, c’est presque une façon d’exprimer ce que c’est qu’être un humain avec des émotions. »

Tu penses que c’est nécessaire de t’infliger ça pour The Soft Moon ? Il faut que ce soit douloureux ?

Il faut que ce soit extrêmement authentique, il faut que ce soit sincère. C’est surtout pour moi : j’aspire vraiment à trouver une forme de paix, et pour y parvenir, il faut que je passe par ce processus lourd et extrêmement douloureux, hélas. J’aimerais qu’écrire quelque chose soit plus fun, mais ce n’est pas du tout le cas ! Mais en fin de compte, c’est très enrichissant.

C’est une forme de catharsis ?

Exactement.

Est-ce que cette petite pause entre les deux albums a influencé ta manière de faire de la musique pour The Soft Moon ? Est-ce que c’était fun à nouveau ?

Non, ça a été très difficile : c’était comme repartir de zéro. J’ai vraiment galéré, après tout ce temps, j’ai eu l’impression d’avoir perdu ma capacité à écrire de la musique. En plus, avec la pandémie et le fait de ne pas pouvoir faire de concert, je me sentais vraiment déconnecté. C’était comme si ça avait été une autre vie – je pensais à tout ce que j’avais fait par le passé, les endroits où j’avais voyagé, et c’était comme un rêve. Je me suis senti complètement déconnecté pendant une courte période, donc quand j’ai dû m’y remettre pour cet album, j’ai vraiment galéré. C’était frustrant.

Tu es revenu aux États-Unis avant la pandémie ?

Oui, en août 2019, donc juste avant.

Et c’est là que tu as fait A Body Of Errors ?

J’ai en fait travaillé dessus à plusieurs endroits : j’ai commencé à Berlin, puis j’en ai écrit une partie à La Havane à Cuba où j’ai passé quelques semaines, et j’ai terminé quand je suis revenu aux États-Unis en août. J’ai fini l’album peu de temps après mon déménagement.

Est-ce que c’est différent pour toi de travailler sur un album à plusieurs endroits, en étant dans ta bulle peut-être, par rapport à le faire dans une métropole comme Berlin, ou dans le désert pendant une pandémie mondiale ?

L’environnement et les paysages n’ont jamais influencé ce que j’écris : tout vient de l’intérieur de moi, donc tu peux me mettre où tu veux, même sur une plage paradisiaque, et je suis sûr que j’écrirais quand même Exister [rires].

Revenons un instant sur Criminal : c’est un album très sombre, très direct, et son titre comme ses paroles tournent autour du thème de la culpabilité…

Tout à fait, il y est beaucoup question de culpabilité. J’étais frustré par ma carrière, par le fait de vivre à Berlin, par l’industrie musicale, ce genre de choses. J’étais aussi très rebelle, je poussais mon corps à ses limites et m’auto-sabotais énormément. C’est pour cette raison qu’il y a beaucoup de colère dans cet album et qu’il est aussi direct : il est intitulé Criminal parce que je me considérais criminel. La dernière chanson, « Criminal » justement, est très franche, c’est une mise au pilori. C’est comme ça que cet album est né. J’étais vraiment furieux quand je l’ai écrit, je voulais exprimer ça, cette partie de moi. Je crois que c’est avec cet album que j’ai commencé à écrire des choses plus lourdes, plus agressives.

Il y a aussi des passages très lourds sur Exister, je pense à « The Pit » par exemple qui est assez extrême, mais il y a aussi des moments plus léger : la gamme d’émotions qu’il aborde est large. Est-ce que c’est intentionnel ?

Oui, j’ai fait ça intentionnellement. L’une des raisons pour lesquelles je l’ai appelé Exister, c’est que c’est ça, exister. En tant qu’humains, nous ressentons des émotions multiples, différentes, nous ne sommes pas bloqués sur une seule, nous ressentons des choses très variées. Cet album, c’est presque une façon d’exprimer ce que c’est qu’être un humain avec des émotions, et puis aussi une façon de prendre mes distances avec les scènes dans lesquelles on m’a catalogué. Je suis vraiment content de faire partie des scènes indus et post-punk, mais j’ai aussi une palette plus large que ça, et je veux la laisser s’exprimer. J’espère être un musicien capable de faire ça, qui peut repousser les limites et avoir une palette assez large. C’est l’un de mes objectifs principaux avec ce projet : exprimer différentes facettes.

« J’ai une obsession un peu bizarre pour le corps lui-même. Ce n’est pas une obsession dans le sens où j’aime ça : c’est dingue, à mes yeux, ça me fait peur, c’est presque trop quand j’y pense. »

De la même manière, ta gamme en tant que chanteur est aussi plus large sur cet album. C’est intéressant parce que tu as vraiment évolué de ce point de vue-là au cours de ta carrière : au début, ta voix était vraiment enfouie, cachée derrière la musique…

Oui, ce n’étaient que des murmures…

Comment s’est fait ce processus ?

Je crois qu’au fil du temps, certains aspects de ma personnalité se sont développés, j’ai aussi beaucoup appris sur moi, j’ai donc été en mesure de plus m’exprimer. Et puis avec le succès de ce projet, je me suis devenu plus assuré, plus en confiance pour partager ma voix. C’est une évolution naturelle au niveau de ma confiance en soi, c’est à peu près tout je pense. C’était mon objectif depuis le début de parvenir à cette sensation suprême : être moi-même et de ne pas en avoir peur.

Tu as déclaré dans une interview avoir toujours eu du mal avec les mots. Comment est-ce que tu approches l’écriture des paroles ? Est-ce que ce fait d’avoir plus confiance en toi aide, surtout maintenant que les paroles s’entendent beaucoup plus facilement ?

Pour Exister, j’ai utilisé une nouvelle méthode. C’était presque une forme de flux de conscience en parallèle de l’écriture d’une mélodie, par exemple : j’avais un micro à portée de main et j’enregistrais tout ce qui sortait de ma bouche. Auparavant, généralement j’écrivais une chanson en entier, puis je me demandais : « Qu’est-ce que ça me fait ressentir ? Comment je mets ça en mots ? », ce qui est très difficile pour moi. Mais oui, j’ai changé de méthode. Ça fait partie de mon apprentissage de l’écriture, c’est une façon de rendre les choses plus fluides.

Je ne sais pas si ça a un rapport, mais tu disais plus tôt te sentir plus à l’aise dans ta façon de t’exprimer et de parler de ce que c’est d’être humain, d’avoir un corps. A Body Of Errors n’a pas beaucoup de paroles mais il y est aussi question du corps. Est-ce que c’est lié pour toi ?

Oui. Je ne sais pas trop – je crois que quand je créé de la musique, c’est filtré par moi, et j’ai une obsession un peu bizarre pour le corps lui-même. Ce n’est pas une obsession dans le sens où j’aime ça : c’est dingue, à mes yeux, ça me fait peur, c’est presque trop quand j’y pense. Donc ça explique pourquoi c’est récurrent dans mon travail.

Ta musique emprunte à plusieurs styles mais dans la musique industrielle comme dans l’EBM, le corps est un thème qui revient souvent souvent en opposition ou en rapport avec la machine. Comment tu vis ça, toi ? Est-ce que ton matos de musicien est une extension de toi-même, une manière de dépasser la peur dont tu parles ?

Bonne question, je ne sais pas vraiment. Je pense que c’est toujours une manière de surmonter quelque chose. Grâce à la musique, je veux me sentir puissant, parce que ce n’est pas du tout ce que je ressens dans ma vie de tous les jours. C’est sur scène par exemple que j’ai confiance en moi, que j’ai l’impression d’avoir de la valeur – c’est pendant cette heure-là chaque soir. Mais… Je ne sais plus où je voulais en venir [rires].

Pour rester sur la thématique du live : tu joues avec deux autres musiciens sur scène. Comment travailles-tu avec eux ?

Ça fait dix ans je crois que le batteur [Matteo Vallicelli] joue avec le groupe, et huit il me semble pour le bassiste [Luigi Pianezzola]. Ils vivent tous les deux en Italie – je les ai rencontrés lorsque je travaillais sur Deeper, je vivais à Venise à l’époque. C’est là que nous nous sommes formés, ils viennent de là-bas. Ça fait un moment qu’ils jouent avec moi maintenant, ce qui est surprenant ! [rires]

Est-ce que ça change ta manière de ressentir une chanson de la jouer en live avec eux comparé au moment où tu l’écris tout seul, en contrôlant tous les paramètres toi-même ?

Je suis très ouvert à leur façon d’interpréter les choses. L’un de mes sentiments favoris, c’est quand tu créés un groupe avec des amis et que tu commences à écrire des chansons ensemble – ce sentiment que cette amitié est vraiment spéciale. Je sais que beaucoup de membres des groupes qui jouent ce soir ont cette dynamique. Et je ressens un peu ça avec ces musiciens. Je ne suis pas un control freak du tout, j’aime beaucoup quand ils proposent leurs propres interprétations ou qu’ils ont des idées parce que ça me permet de ressentir ce sentiment justement.

Tu as joué dans d’autres groupes avant The Soft Moon ?

Oui, je crois que j’avais quatorze ou quinze ans quand j’ai eu mon premier groupe. Et puis ça a continué : j’ai joué dans beaucoup de groupes, souvent de punk, et plus tard, dans un groupe qui jouait une sorte de space rock psychédélique, et seulement ensuite The Soft Moon.

« Grâce à la musique, je veux me sentir puissant, parce que ce n’est pas du tout ce que je ressens dans ma vie de tous les jours. C’est sur scène par exemple que j’ai confiance en moi, que j’ai l’impression d’avoir de la valeur – c’est pendant cette heure-là chaque soir. »

Pourquoi cette fois-ci tu as choisi de travailler seul ?

En fait, à un moment – je ne sais pas trop, j’avais sans doute plus ou moins vingt-et-un ans – je me suis mis à écrire. J’ai acheté un synthétiseur et l’équipement nécessaire pour écrire dans mon coin. Je pense que c’est parce qu’au bout d’un moment, je m’étais senti frustré, peut-être que je n’avais pas rencontré les personnes qu’il fallait, donc j’ai commencé à écrire de la musique de mon côté il y a un moment, et il a fallu du temps avant que ça aboutisse à quelque chose. The Soft Moon a été découvert au moment où j’avais à peu près renoncé à essayer. J’écrivais juste de la musique dans mon coin. Peut-être que c’est pour ça que j’ai enregistré A Body Of Errors : parce qu’au début, The Soft Moon, c’est juste moi qui bossait sur de la musique pour m’amuser après ma journée de travail. Il y avait une forme d’authenticité là-dedans : je n’avais pas d’objectif particulier, je n’essayais pas de faire partie d’un style en particulier.

Ça s’est fait spontanément, en gros ?

Oui, et les gens s’en rendent compte.

Sur Exister, il y a des collaborations avec fish narc et Alli Logout de Special Interest. Comment est-ce que ça s’est passé ?

Les chansons étaient déjà terminées lorsque je les leur ai envoyées. Je leur en ai envoyé plusieurs à chacun et je les ai laissé choisir celle qu’ils voulaient. Je savais laquelle Alli choisirait : la plus agressive, bien sûr ! [rires] Ensuite, ils ont enregistré leur voix sur les chansons puis m’ont envoyé les fichiers, c’était plutôt simple. Ce n’était pas de véritable collaborations dans la mesure où ils n’ont pas écrit leurs propres parties, ce sont plutôt des apparitions en tant qu’invités.

Apparemment, au début de ta carrière, tu étais vraiment attaché à utiliser du matériel analogique et que c’est moins le cas maintenant : la technologie actuelle, plus compacte, te va bien. Qu’est-ce qui a changé ?

C’est les temps qui ont changé, je crois. Au début de The Soft Moon, tout le monde était obsédé par le matos, les gens se plaignaient quand tu n’avais pas le bon matériel sur scène etc. C’était une autre époque. Maintenant, il y a beaucoup de groupes qui ont beaucoup de succès mais qui sont pratiquement du karaoké, soit ils jouent sur des bandes pré-enregistrées, soit il y a une personne au synthé et une personne qui chante, par exemple. Le public apprécie vraiment, donc les temps ont changé, tout simplement. Et ça me plaît bien parce que c’est moins de pression de ne pas avoir à voyager avec des tonnes de trucs. Ça me va, cette tendance au minimaliste, et ça convient au public aussi. Dans le rock et le metal, il peut y avoir cette idée de revival et tout ça, mais à côté de ça, il y a des DJs qui ont énormément de succès et qui se produisent devant des foules de 20 000 personnes avec seulement une clé USB [rires]. Quelque soit la direction que tu prends, il y aura des gens qui apprécieront.

Nous avons parlé du fait qu’Exister boucle la boucle. Tu dis que tu te sens plus libre que par le passé et que tu as trouvé ce que tu recherchais, d’une certaine façon : qu’est-ce que ça signifie pour The Soft Moon ? Est-ce que tu penses explorer une autre direction à l’avenir ?

Oui, je vais essayer d’écrire un album de reggae peut-être [rires]. Non, mais plus sérieusement, j’ai vraiment envie d’aller de l’avant. Je pense pas que je vais continuer à écrire ces trucs qui parlent d’auto-détestation, de culpabilité, etc. Je crois qu’à l’avenir, ma musique sera plus puissante, qu’elle donnera du pouvoir. Je pense qu’il y aura plus de force derrière : c’est comme ça que je me sens, en ce moment.

Dans ton cas, la catharsis a fonctionné. On voit souvent la trajectoire d’artistes qui sortent leurs tripes dans leur musique sans que ça marche comme ça : la musique peut être géniale, mais ils ne se sentent pas mieux pour autant.

Absolument, et certains n’en sortent pas vivant. Dans mon cas, c’est toujours un processus qui est en train de se faire, mais je n’en ai clairement jamais été aussi près. Et c’est vraiment la musique qui m’a aidé : avoir l’opportunité de pouvoir faire de la musique et de m’exprimer… J’ai vraiment de la chance, de ce point de vue-là.

Tu disais que tu avais l’impression que certaines choses étaient attendues de toi parce que tu appartiens à certains genres. Est-ce que tu te sens émancipé de ça aussi désormais ?

Je créé ça, je créé ma propre liberté en écrivant des choses qui s’étalent sur un vaste spectre musical. Je créé pour moi la liberté qu’il me faut pour m’exprimer, je construis une voie qui me permet d’écrire un morceau techno, punk, ou une chanson d’amour si j’en ai envie. C’est quelque chose qui se passe inconsciemment, je crois.

Ça fait déjà quelques semaines que tu es en tournée : qu’est-ce qui t’attend pour la suite ?

Oui, aujourd’hui, c’est officiellement la troisième semaine. C’est une tournée relativement courte, c’est souvent comme ça que nous faisons. Nous reviendrons dans trois semaines pour jouer en France, en Italie, je crois qu’il y aura aussi quelques dates au Royaume-Uni. C’est une tournée plutôt courte à nouveau, puis nous retournerons aux États-Unis où nous jouerons au Cruel World Festival. Est-ce que tu en as entendu parler ? Il y aura Siouxsie and the Banshees !

Non, pas du tout !

Il fallait juste que je le mentionne parce que j’ai vraiment hâte [rires]. Elle sera tête d’affiche. Techniquement, ça se passera à Pasadena, mais c’est à côté de Los Angeles. Il y aura aussi Billy Idol, ce qui va être très intéressant – il y aura un peu de tout, des groupes récents et d’autres plus anciens.

Interview réalisée par téléphone le 20 avril 2023 par Chloé Perrin.
Retranscription & traduction : Chloé Perrin.
Photos : Caroline Bonarde (1), Andrea Rigano (2, 5) & Matteo Nazzari (4).

Site officiel de The Soft Moon: www.thesoftmoon.com



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